Hyper-impérialisme : une nouvelle étape dangereuse et décadente

Notre dernière étude explore comment le déclin de l'hégémonie du Nord global a modifié le paysage géopolitique et ouvert de nouvelles possibilités pour les organisations émergentes du Sud global.

Les recherches à l’origine de ce document ont été menées collectivement pendant plus d’un an, et ont bénéficié des contributions de nombreux universitaires et professionnels socialistes. Ce document a été compilé à partir de données et de graphiques fournis par Global South Insights (GSI), sous la direction et avec la coordination de Gisela Cernadas, Mikaela Nhondo Erskog, Tica Moreno et Deborah Veneziale. Les données et graphiques figurant en partie IV du document s’appuient en grande partie sur les recherches publiées par l’économiste John Ross.

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Introduction

Il y a à peine 30 ans, sous la pression de l’impérialisme étasunien et désireux d’assoir son inviolabilité, des idéologues bourgeois ont décrété la fin de l’histoire.1 Mais pour les luttes et les mouvements populaires affectés par l’impérialisme, une telle fin n’était pas en vue.

En 1996, le Brésil est secoué par le massacre de Carajás. Face à une répression violente, le Mouvement des travailleurs sans terre entreprend de récupérer ses terres afin de mener une réforme agraire populaire via l’occupation et la production, et défie les géants de l’agro-industrie, notamment la multinationale américaine Monsanto.2 Hugo Chávez, le « soldat qui a secoué le continent », remporte le vote populaire de 1999, un virage à gauche brutal, qui ouvrira la voie à de nombreux autres en Amérique latine. En 2005, une vague de mobilisation massive de millions d’ouvriers, paysans, autochtones, femmes et étudiants s’oppose et met un terme au projet étasunien de zones de libre-échange des Amériques, une remise en question directe de près de 200 ans de doctrine Monroe.3

En 2002, des femmes nigérianes se rassemblent aux portes de Shell et Chevron pour protester contre la destruction et l’exploitation de l’environnement dans le delta du Niger. En 2004, les Haïtiens disent non à des siècles d’humiliation avec les manifestations de masse qui suivent l’éviction de Jean-Bertrand Aristide et l’occupation étasunienne. En 2006, des millions de Népalais célèbrent le renversement de la monarchie par la résistance armée sous la direction des communistes. En 2010, lorsque Mohamed Bouazizi s’immole par le feu, le peuple tunisien se révolte contre le système néolibéral qui a poussé le vendeur de fruits à prendre des mesures aussi extrêmes.

Au cours des années suivantes, des changements, parfois mineurs et imperceptibles, parfois volatils et explosifs, se produisent. Ces évolutions impliquent à la fois des mouvements populaires et des acteurs étatiques, parfois extrêmement puissants. Les États-Unis sont confrontés à une puissance économique en plein essor en Chine, à des économies en croissance dans les pays du Sud (qui dépassent le PIB du Nord global en termes de PPA en 2007), à des années de négligence dans les investissements nationaux, à la financiarisation de l’économie et à la perte de supériorité de leur industrie manufacturière.

En 2009, la montée du Tea Party marque une fracture interne de la politique intérieure étasunienne. Sur le plan international, les États-Unis ne parviennent pas à perturber le régime chinois, et à dénucléariser et renverser le régime en Russie. Après une réduction temporaire des dépenses militaires avec la fin de la désastreuse guerre en Irak (2003-2011), les États-Unis optent pour le recours et la menace de la puissance militaire comme pilier central de leur réponse à ces évolutions.

Historiquement, la fin d’une hégémonie se remarque dans trois secteurs : la production, la finance et l’armée.4 Les États-Unis ont perdu leur hégémonie en matière de production, même s’il leur reste encore certains domaines de puissance technologique, notamment en ce qui concerne les applications militaires. L’hégémonie financière du pays est remise en question, même si cette tendance n’en est qu’à ses débuts et dépend beaucoup du statut du dollar. Même si les aspects économiques et politiques de leur déclin s’accélèrent, les États-Unis conservent toujours leur puissance militaire, ce qui les incite à tenter de surmonter les conséquences de leur déclin économique par des moyens militaires ou connexes.

Les États-Unis ont fait de la Chine leur concurrent stratégique. A minima, les États-Unis travaillent à l’endiguement et au ralentissement économique de la Chine, ce qui suffirait à garantir une perpétuelle hégémonie économique du pays à l’avenir.

De son propre point de vue, le capitalisme étasunien fait preuve d’une grande rationalité lorsqu’il tente de limiter la montée de la Chine. Toute action contraire éroderait l’avantage relatif dont disposent les États-Unis dans le contrôle de niveaux accrus de forces productives et les monopoles qu’un tel contrôle implique. Les acteurs étatiques étasuniens sont quasiment unanimes dans leur volonté de continuer à gérer le découplage de la Chine (malgré la quasi-impossibilité de remoderniser complètement les forces productives étasuniennes au niveau national) et à faire progresser les préparatifs militaires à l’encontre de la Chine.

En février 2022, l’entrée des troupes russes en Ukraine (résultat des violations continues des garanties fournies par les États-Unis quant à la non-expansion de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et de la poursuite de la guerre civile entre Kiev et le Donbass) a marqué une nouvelle phase explicite de l’alignement militaire mondial des États-Unis. Avec une série de mesures rapides, les États-Unis ont ouvertement subordonné tous les pays du Nord à leur position et, ce faisant, ont à nouveau subordonné leurs appareils militaires. Les États-Unis ont eux-mêmes imposé l’hégémonie militaire de ce que l’on appelle l’« OTAN+ », qui comprend tous les membres de l’ancien bloc de l’Est, à l’exception de trois d’entre eux. Tous les pays ayant assisté au sommet de l’OTAN de 2023 à Vilnius, en Lituanie, en tant que membre ou observateur (notamment l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Japon et la République de Corée) sont de facto membres de l’OTAN+. Seuls Israël (dont la non-participation est excusée pour des raisons d’opportunisme politique) et quelques petits pays du Nord n’y ont pas participé.

En octobre 2023, Israël lance une campagne de déplacement, de nettoyage ethnique, de punition collective et de génocide des Palestiniens avec le soutien total et éhonté du gouvernement des États-Unis. L’évolution de la situation en Ukraine, suivie des récentes escalades à Gaza, est un indicateur significatif d’un changement qualitatif au sein du système impérialiste. Les États-Unis ont désormais achevé leur subordination économique, politique et militaire de tous les autres pays impérialistes. Un bloc impérialiste intégré et axé sur la puissance militaire est ainsi créé. Le bloc entend maintenir son emprise sur l’ensemble du Sud global et tourne son attention vers la domination de l’Eurasie, la dernière région du monde échappant encore à son contrôle.

Nous pouvons déclarer, sans exagération, que le Nord global fait preuve d’une hostilité ouverte et entend déclarer la guerre à toute région du Sud global qui ne se conformerait pas aux politiques du Nord. Une telle volonté se remarque dans la déclaration conjointe sur la coopération entre l’UE et l’OTAN publiée le 9 janvier 2023 :

Nous continuerons de mobiliser toute la gamme des moyens à notre disposition – qu’ils soient politiques, économiques ou militaires – pour favoriser la réalisation de nos objectifs communs, dans l’intérêt de la population de nos pays, soit un milliard de personnes.5

Le peuple palestinien de Gaza ressent certainement la barbarie palpable de l’OTAN+ et le « consensus de masse » imposé que le Nord global est capable d’adopter. Comme le disait récemment la dirigeante palestinienne de la libération, Leila Khaled :

Nous savons qu’ils parlent de terrorisme, mais ils sont les héros du terrorisme. Les forces impérialistes partout dans le monde, en Irak, en Syrie, dans différents pays… se préparent à attaquer la Chine. Tout ce que ces pays disent sur le terrorisme tourne autour d’eux. Les peuples ont le droit de résister par tous les moyens, y compris la lutte armée. Il s’agit d’un droit garanti par la Charte des Nations Unies. Tous ces pays violent le droit des peuples à résister, alors qu’ils cherchent à retrouver leur liberté. Encore une fois, il s’agit d’une loi fondamentale : là où il y a répression, il y a résistance. Les peuples ne vivront pas sous l’occupation et la répression. L’histoire nous a appris que lorsque les populations résistent, elles peuvent conserver leur dignité et leurs terres.6

***

L’impérialisme a entamé sa transformation vers une nouvelle étape : l’hyper-impérialisme.7 Il s’agit d’un impérialisme mené de manière exagérée et cinétique, tout en étant soumis aux contraintes que l’empire en déclin s’est imposé. L’ératisme de son épuisement est ressenti par les millions de Congolais, de Palestiniens, de Somaliens, de Syriens et de Yéménites qui vivent soumis au militarisme étasunien, et qui ont le réflexe de se cacher en cas de bruits soudains.

Pourtant, il ne s’agit pas de la marche sur le monde initiée par la guerre froide, et qui a donné lieu à des batailles par procuration et à un impérialisme économique par le biais de la Banque mondiale et d’autres institutions du développement. Il s’agit de l’impérialisme d’un milliardaire qui se noie et qui croit fermement qu’il devrait retourner sur son yacht. La puissance exerce alors les seuls muscles dont elle est encore dotée : son armée. Cependant, en l’absence de puissance productive et compte tenu du fait que la puissance financière est à un point critique, les technologies impériales de contrôle que les États-Unis possédaient autrefois ne sont plus à leur disposition. Le pays concentre donc ses efforts sur les mécanismes dont il dispose : la culture (le contrôle de la vérité) et la guerre.

Les tactiques de l’hyper-impérialisme sont façonnées en partie par la modernisation de la guerre hybride, c’est-à-dire l’application de la loi, les hyper-sanctions, la saisie des réserves et des actifs nationaux et d’autres modes de guerre non militaire. Les nouveaux outils technologiques de surveillance et de communication ciblée qui caractérisent l’ère numérique sont déployés pour exercer le contrôle de l’impérialisme sur la bataille des idées. Des méthodes plus perverses et plus secrètes sont alors mises en œuvre à l’encontre de la vérité, comme l’emprisonnement politique de l’éditeur de WikiLeaks, Julian Assange, qui a dénoncé de nombreux crimes commis contre les pays du Sud.8

Le Nord global est un bloc intégré militairement, politiquement et économiquement et composé de 49 pays. On y retrouve les États-Unis, le Royaume-Uni, le Canada, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, Israël, le Japon et des pays secondaires d’Europe occidentale et orientale. Dans le domaine militaire, la Turquie (membre de l’OTAN), la République de Corée et les Philippines (colonies militarisées de facto des États-Unis) sont incluses dans notre définition du « bloc militaire dirigé par les États-Unis », même s’il s’agit de pays du Sud.

Au cours des vingt dernières années, le Nord global a connu un déclin économique relatif important, ainsi qu’un déclin politique, social et moral. Ses fausses affirmations « morales » en matière de droits civils et de « liberté de presse » sont désormais sans aucun fondement, dans la mesure où elles cherchent à rendre illégal le soutien public (y compris en ligne) en faveur des droits des Palestiniens. Ce soutien total à l’humiliation et à la destruction des peuples non-blancs du monde n’est pas sans rappeler les siècles passés, et révèle ce qui pourrait être décrit comme une « fragilité blanche » collective.

Les pays du Sud regroupent d’anciennes colonies et semi-colonies, quelques États indépendants non européens et des projets socialistes, actuels et anciens. Les luttes pour la libération nationale, l’indépendance, le développement et la souveraineté économique et politique totale doivent encore être menées à bien dans la plupart des pays du Sud.

Malgré les limites de la terminologie, nous utiliserons le terme « Nord global » et parfois « Occident » (une expression creuse souvent utilisée) de manière interchangeable avec le terme plus précis de « Camp impérialiste dirigé par les États-Unis ». Nous analyserons le Nord global selon quatre « aires ». Le reste du monde est actuellement désigné sous le terme de « Sud global » (une grande partie de celui-ci était auparavant appelée « Tiers Monde »). Dans notre analyse, nous diviserons le Sud global en six « groupes » en fonction de la possibilité relative qu’un pays soit la cible d’un changement de régime et du rôle que son gouvernement joue dans la promotion publique de positions anti-impérialistes et internationales (Figure 1 dans les deux cas). Le Nord global est engagé dans des conflits généralisés à des niveaux bien plus élevés avec le reste du monde, le Sud global.

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PARTIE I : La montée d’un bloc militaire du Nord global dirigé par les États-Unis

Évolutions et consolidation

Le bloc militaire dirigé par les États-Unis a connu deux changements internes au cours des trois dernières décennies :

  1. la poursuite de l’élargissement du bloc pour inclure tous les pays de l’Europe de l’Est (il ne manque que la Biélorussie);
  2. la difficulté à maintenir la pleine subordination des États capitalistes de l’Europe occidentale, qui ont abandonné toute indépendance fondamentale, et dans de nombreux cas, toute prétention d’indépendance.

Ce dernier point devient évident en 2018, lorsque les États de l’Europe occidentale s’agenouillent devant le retrait de Donald Trump de l’accord sur le nucléaire iranien de 2015, un coup dur porté à leurs intérêts économiques. Nous discuterons plus loin du déroulé de ce processus.9

Le centre du « bloc militaire dirigé par les États-Unis », comme nous l’appelons, est l’OTAN. Ce bloc comprend également le Japon, l’Australie, Israël, la Nouvelle-Zélande, trois pays du Sud et les quelques autres pays européens qui ne sont pas membres de l’OTAN.

Le bloc militaire dirigé par les États-Unis est le seul bloc au monde, la seule alliance militaire de facto et de jure qui comporte un commandement central. Il n’existe aucun autre bloc de ce type. Sa clarté et son unité d’objectif sont évidentes. Les États-Unis sont sortis de nombreux traités importants visant à empêcher la prolifération nucléaire au cours des dix dernières années (Traité sur les missiles anti-balistiques en 2002, Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire en 2019 et Traité Ciel ouvert en 2020).10 Les planificateurs militaires ont pu ainsi se préparer à la potentielle installation de missiles nucléaires à portée intermédiaire capables d’anéantir Moscou en quelques minutes.

Dépenses militaires

Dans le numéro de novembre 2023 de la Monthly Review, un article bien documenté rédigé par Gisela Cernadas et John Bellamy Foster sur la base unique des statistiques économiques officielles étasuniennes du Bureau of Economic Analysis et de l’Office of Management and Budget (OMB), a révélé que les dépenses militaires réelles des États-Unis sont plus de deux fois plus élevées que celles reconnues par le gouvernement étasunien ou même par le Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI).11

Les dépenses militaires réelles des États-Unis en 2022 s’élevaient à 1 537 milliards de dollars.12

Pour calculer les dépenses militaires totales mondiales, nous avons utilisé comme source principale les chiffres publiés par le SIPRI pour tous les pays, à l’exception des États-Unis.13 Nous utilisons uniquement les chiffres de la Monthly Review pour les États-Unis. En 2022, le SIPRI a rehaussé le budget de la défense nationale annoncé par le gouvernement chinois de 229 milliards de dollars à 292 milliards de dollars, soit une augmentation de 27,5 %.14 Depuis 2021, le SIPRI utilise une nouvelle méthodologie pour réviser les dépenses militaires de la Chine.15 Le SIPRI a modifié ses calculs concernant les dépenses militaires de la Chine pour les années précédentes et pour les années en cours.16

Le SIPRI a ajusté le budget militaire annuel des États-Unis déclaré par l’OMB pour l’année 2022 de 14,5 %, de 765,8 milliards de dollars à 876,9 milliards de dollars.17 Ce chiffre représente environ la moitié du pourcentage d’augmentation ajouté à la Chine.

La manière dont le SIPRI traite les dépenses militaires chinoises est assez différente de la méthode adoptée pour les États-Unis. Son approche est beaucoup plus circonspecte à l’égard des calculs étasuniens.

Même si le SIPRI doublait les dépenses militaires déclarées par la Chine elle-même pour les porter à 458 milliards de dollars, cela représenterait 2,6 % de son PIB. Ce chiffre est nettement inférieur aux 6 % réellement dépensés par les États-Unis et, même dans ce cas, les dépenses militaires de la Chine ne représenteraient que 29,8 % de celles des États-Unis, avec une population plus de quatre fois supérieure à la population étasunienne.18

De plus, contrairement aux États-Unis, la Chine ne possède pas 902 bases militaires à l’étranger.19 Les bases et les interventions étasuniennes pèsent non seulement sur le budget annuel, mais aussi sur la dette économique à long terme. D’autres informations sont disponibles dans les notes de fin.20

Notre analyse révèle une série de conclusions évidentes. La première est que les États-Unis contrôlent, par l’intermédiaire de l’OTAN et d’autres moyens, un chiffre stupéfiant de 74,3 % de toutes les dépenses militaires mondiales (Figure 2). Cela représente plus de 2 000 milliards d’USDétasuniens.21

La figure 3 montre que les pays impérialistes représentent 12 des 16 principaux budgets militaires du monde.

La figure 4 montre les 16 dépenses militaires par habitant les plus élevées des pays du Nord par rapport aux trois pays du Sud qui dépensent le plus en matière militaire. Les États-Unis dépensent 21 fois plus par personne pour leur armée que la Chine.22 La signification de ces résultats ne laisse aucune place au doute.

Figure 5

Pays dont les dépenses militaires dépassent 20 milliards USD

Nord global et Sud global, 2022

Nom du pays(GSI) Dépenses militaires Pourcentage du PIB(CER) Par habitant moyenne mondiale(fois)

Bloc militaire dirigé par les États-Unis

États-Unis 1 536 859 6,0% 12,6
Royaume-Uni 68 463 2,2% 2,8
Allemagne 55 760 1,4% 1,9
France 53 639 1,9% 2,3
Rép. du Corée 46 365 2,8% 2,5
Japon 45 992 1,1% 1,0
UkUkraine 43 998 27,4% 3,1
Italie 33 490 1,7% 1,6
Australie 32 299 1,9% 3,4
Canada 26 896 1,3% 1,9
Israël 23 406 4,5% 7,2
Espagne 20 307 1,4% 1,2
Sud global
Chine 291 958 1,6% 0,6
Russie 86 373 3,8% 1,7
Inde 81 363 2,4% 0,2
Arabie saoudite 75 013 6,8% 5,7
Brésil 20 211 1,1% 0,3
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données du FMI, des Nations Unies, du SIPRI et de la Monthly Review

La figure 5 répertorie tous les pays dont le budget militaire dépasse 20 milliards de dollars étasuniens. Onze d’entre eux se trouvent dans le Nord global, contre six (sur 145) dans le Sud global. Dans ce graphique, la République de Corée figure dans la liste du bloc militaire dirigé par les États-Unis.

Il est clair que les pays du Sud, contrairement au ceux du Nord, ne sont pas un bloc et encore moins un bloc militaire. Le Sud global fait donc face au monopole extrême des dépenses militaires du bloc militaire dirigé par les États-Unis. Il s’agit d’un danger clair et réel pour tous les pays du Sud, soit un danger imminent pour la pérennité de l’humanité et de la planète.

De même, l’aspect le plus important de la puissance d’un État (c’est-à-dire la puissance militaire) et le danger central absolu pour les classes ouvrières de tous les pays, en particulier pour les nations non-blanches du monde, réside dans le camp impérialiste dirigé par les États-Unis. Objectivement, il n’existe pas de sous-impérialisme ou de puissances impérialistes non occidentales (de tels concepts sont des tromperies subjectives qui obscurcissent les réalités factuelles).

Bases militaires étasuniennes et britanniques

En mars 2002, la Monthly Review a publié un article contenant une liste et une carte des pays possédant des bases militaires étasuniennes connues, affirmant que l’étendue de l’empire étasunien pouvait être représentée par ses bases.23 Cet article a fait des remous dans certains cercles militaires des États-Unis. D’autres chercheurs ont approfondi ces travaux au cours des années suivantes, notamment David Vine et World Beyond War (qui ont rendu publique une carte interactive). 24

Les informations sur l’emplacement de ces bases ont ouvert une fenêtre sur la nature absolument omniprésente de l’hégémonie militaire des États-Unis. L’emplacement et le nombre de bases sont précieux pour comprendre la forme et la trajectoire de l’impérialisme en éclairant ses frontières et en montrant son rôle dans leur maintien de l’ordre.

Il existe 902 bases militaires étasuniennes connues et 145 bases militaires britanniques connues, décrites ci-dessous.25

En raison du secret autour de l’armée et du gouvernement étasuniens, il n’existe pas de données sur les fonctions militaires étasuniennes déployées à l’intérieur de ces bases et sur les actions lancées par les forces militaires étasuniennes qui y sont implantées. Il est donc impossible de réaliser une analyse qualitative complète ses activités militaires à l’étranger. Certaines des lacunes analytiques sont les suivantes :

  • Les bases répertoriées excluent les installations et les emplacements des nombreuses fonctions militaires privatisées que les États-Unis ont créées au cours des 40 dernières années. Des sociétés telles que DynCorp International, Fluor Corporation, AECOM et KBR, Inc. exercent leurs activités dans le monde entier, notamment au Koweït, en Arabie saoudite et en Indonésie.26
  • Les projets « non officiels » de l’armée étasunienne, comme la réquisition du terminal 1 de l’aéroport international de Kotoka, dans la capitale du Ghana, dans lequel les soldats étasuniens n’ont pas besoin de passeport ni de visa pour entrer (uniquement leur carte d’identité militaire) et les avions militaires étasuniens sont « exemptés d’arraisonnement et d’inspection » ne sont pas inclus.27 Le terminal 1 est donc de facto une base militaire étasunienne. Le Ghana a cédé sa souveraineté nationale aux États-Unis.28
  • Les projets essentiels au complexe de communications militaro-industriel-numérique étasunien ne sont pas pris en compte. De nombreux sites de terminaison de câbles sous-marins sont contrôlés uniquement par des responsables étasuniens habilités par les services de renseignement. Le contrôle des communications par câble sous-marin dans le monde est l’une des principales priorités du renseignement étasunien.29 Ces actions s’inscrivent dans le cadre du programme « Collect It All » de la NSA visant à rassembler toutes les communications du monde et à les stocker dans des endroits comme le Bluffdale Utah Data Center (nom de code « Bumblehive »), le premier centre de données de l’Intelligence Community Comprehensive National Cybersecurity Initiative.30
  • Les projets et lieux militaires secrets (y compris les installations du pays hôte connues sous le nom de « nénuphars ») sont exclus, bien que certains aient été dévoilés et inclus.31
  • Il existe peu d’informations sur les mouvements militaires étasuniens entre les sites, la nature des activités menées (telles que les mouvements de troupes ou les assassinats ciblés) et le volume de marchandises, d’avions et de navires.
  • Toutes les bases ne sont pas égales en termes de taille ou de fonction, et évaluer leur importance relative est presque impossible. Parfois, un seul bâtiment est considéré comme une base, car il est distinct des autres bâtiments situés à un kilomètre de distance. Certaines bases sont massives et détruisent tout sur leur passage, comme les installations militaires de Guam, qui détruisent l’environnement naturel et la vie de ses habitants. D’autres sont considérées comme de petites installations de réseaux d’espionnage.

Compte tenu de ces limites, il existe une tendance à décrire ce qui est mesurable, et non pas ce qui est inconnu, mais stratégique.

Premièrement, nous proposons une carte qui utilise les données de World Beyond War et qui illustre les pays dans lesquels sont installées des bases, sans indiquer le nombre exact dans chaque pays. Cela permet de réduire d’éventuelles comparaisons incorrectes. L’existence d’une seule base étasunienne dans un pays signifie que ce dernier a déjà cédé une certaine souveraineté nationale aux États-Unis. Deuxièmement, par souci d’exhaustivité, nous incluons ci-dessous deux graphiques (un pour les pays du Nord et un pour ceux du Sud) qui répertorient les pays dotés de bases connues selon World Beyond War.

La figure 6 montre que les États-Unis possèdent au moins 902 bases militaires à l’étranger. Celles-ci sont fortement concentrés dans les régions frontalières ou les zones tampons autour de la Chine et portent gravement atteinte à la souveraineté des pays du Sud.32

Figure 7

Bases militaries étasuniennes dans les pays et les territoires du Nord global

2023

Nombre de bases Pays/territoire
50+ Allemagne (171), Japon (98)
20-49 Italie (45), Royaume-Uni (25)
5-19 Australie (17), Belgique (12), Portugal (9), Roumanie (9), Norvège (8), Israël (7), Pays-Bas (7), Grèce (5), Pologne (5)
1-4 Bulgarie (4), Islande (3), Espagne (3), Canada (2), Géorgie (2), Hongrie (2), Lettonie (2), Slovaquie (2), Chypre (1), Danemark (1), Estonie (1), Groenland (1), Irlande (1), Kosovo (1), Luxembourg (1)
Total 445
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données de World Beyond War

Les bases militaires étasuniennes à l’étranger existent non seulement dans les pays du Sud, mais sont également très présentes dans les pays du Nord (Figure 7). Plus des deux tiers des bases connues sont concentrées dans les deux pays vaincus lors de la Seconde Guerre mondiale : l’Allemagne et le Japon.

Figure 8

Bases militaires étasuniennes dans les pays et les territoires du Sud global

2023

Nombre de bases Pays/territoire
50+ Rép. du Corée (62)
20-49 Guam (45), Porto Rico (34), Syrie (28), Arabie saoudite (21)
5-19 Panama (15), Turquie (12), Philippines (11), Bahreïn (10), Irak (10), Îles Marshall (10), Bahamas (9), Bélize (9), Honduras (9), Niger (9), Guatemala (8), Jordanie (8), Koweït (8), Oman (8), Pakistan (8), Égypte (7), Colombie (6), Salvador (6), Somalie (6), Îles Mariannes du Nord (5), Pérou (5), Qatar (5)
1-4 Cameroun (4), Costa Rica (4), Îles Vierges (États-Unis) (4), Argentine (3), République centrafricaine (3), Tchad (3), Kenya (3), Mauritanie (3), Nicaragua (3), Palaos (3), Thaïlande (3), Émirats arabes unis (3), Samoa américaines (2), Brésil (2), Diego Garcia (2), Djibouti (2), République dominicaine (2), Gabon (2), Ghana (2), Mali (2), Singapour (2), Surinam (2), Tunisie (2), Ouganda (2), Yémen (2), Antarctique (1), Aruba (1), Ascension (1), Botswana (1), Burkina Faso (1), Burundi (1), Cambodge (1), Chili (1), Cuba (1), RD Congo (1), Indonésie (1), Antilles néerlandaises (1), Samoa (1), Sénégal (1), Seychelles (1), Soudan du sud (1), Uruguay (1), Île de Wake (1)
Total 457
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données de World Beyond War

La figure 8 répertorie les emplacements des bases militaires étasuniennes à l’étranger dans les pays et territoires du Sud. La République de Corée abrite 62 bases militaires étasuniennes permanentes.

Figure 9

Structures militaires étasuniennes à l’étranger

Nombre de bâtiments, superficie des bâtiments, superficie du terrain et nombre de bases

2023

Pays/territoire Superficie du bâtimentm2 Bâtiments nombre total Superficie du terrain hectares Bases militairesnombre total
Japon 10 339 000 12 079 41.715 76
Allemagne 9 135 000 12 537 2 682 93
Rép. du Corée 5 631 000 5 832 12 262 62
Italie 2 011 000 2 032 945 31
Guam 1 382 000 2 807 25 322 45
Royaume-Uni 1 364 000 2 883 3 253 14
Koweït 676 000 1 503 2 549 6
Qatar 661 000 663 2
Cuba 588 000 1 540 11 662 1
Turquie 478 000 817 1 356 8
Espagne 419 000 889 3 802 2
Porto Rico 411 000 794 7 042 29
Bahreïn 390 000 468 83 9
Belgique 362 000 479 10
Îles Marshall 286 000 633 551 6
Groenland 220 000 197 94 306 1
Djibouti 171 000 379 459 2
Pays-Bas 151 000 150 5
Émirats arabes unis 128 000 400 5 059 3
Portugal 114 000 170 532 6
Honduras 92 000 336 1
Singapour 86 000 120 3
Roumanie 70 000 179 177 4
Bahamas 62 000 179 219 6
Grèce 61 000 85 41 4
Sainte-Hélène 43 000 124 1 402 1
Australie 41 000 83 8 124 5
Bulgarie 39 000 93 2
Îles Vierges (États-Unis) 26 000 29 5 964 5
Jordanie 17 000 31 3 978 1
Chypre 16 000 38 1
Israël 13 000 19 2
Samoa américaines 11 000 10 2 1
Niger 11 000 45 1
Pologne 11 000 20 3
Curaçao 9 000 15 17 1
Salvador 6 000 14 14 1
Îles Mariannes du Nord 5 000 17 6.499 10
Pérou 5 000 7 1
Norvège 3 000 4 1
Islande 2 000 7 425 1
Kenya 2 000 5 1
Canada 91 1
Total 35 548 000 48 712 240 533 468
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données du Département de la Défense des États-Unis

La figure 9 illustre l’ampleur de l’empreinte militaire des États-Unis : 36 millions de mètres carrés répartis dans 49 000 bâtiments couvrant 245 000 hectares. En termes de nombre de bâtiments, les trois puissances de l’Axe se trouvent parmi les quatre premières places.

Alors que l’Empire britannique ne brille plus de sa splendeur d’antan, la figure 10 montre l’ampleur du réseau de bases britannique, axé sur l’Asie occidentale et l’Afrique.

Invasions, interventions et « déploiements » militaires étasuniens et britanniques

Les pays de l’OTAN mènent de vastes déploiements et interventions militaires dans le monde entier, soutenus par leur vaste réseau de bases.

Les figures 11 et 12 concernent uniquement l’année 2022. Les forces impérialistes ont déployé 317 opérations militaires dans les pays du Sud et 137 dans les pays alliés du Nord, pour un total de 454 (dont 45 ne sont pas des États membres des Nations Unies). Les nations impérialistes qui ont effectué le plus grand nombre de déploiements militaires sont les États-Unis (56), le Royaume-Uni (32), la France (31), l’Italie (20), l’Allemagne (17), l’Espagne (15), le Canada (13) et les Pays-Bas (13) (Figure 11).33

La figure 12 montre comment l’Afrique et l’Asie occidentale restent les points focaux des projets occidentaux. Les cinq pays suivants ont subi le plus de déploiements militaires en 2022 : Mali (31), Irak (30), Liban (18), République centrafricaine (13) et Soudan du Sud (13).34

Lorsque l’on se penche sur la géographie des bases américaines et britanniques et les déploiements dans le Nord global, on identifie clairement où se situent les frontières du maintien de l’ordre étasunien et on comprend comment l’Eurasie et les régions qui la protègent sont les champs de bataille de notre époque.

Comme le montrent les figures 13 et 14, les États-Unis et leurs alliés du Nord global, en particulier le Royaume-Uni, ont des siècles d’interventions derrière eux. Congressional Research Services (CRS), étant une publication officielle du gouvernement étasunien, constitue la principale source de données sur son intervention militaire. Il est utilisé pour démontrer l’ampleur et la longue durée historique de l’intervention militaire étasunien. Il convient toutefois de noter que CRS n’inclut pas les missions secrètes et n’agrège pas ses données pour différencier les différents types d’interventions des forces armées à l’étranger. Les données ne sont pas organisées en fonction de la nature qualitative et quantitative ou de l’échelle des théâtres d’opération. Les instances répertoriées (plus de 480) varient considérablement en termes de taille, de durée, d’autorisation légale et d’importance.35

Le Military Intervention Project (MIP) utilise une définition plus complète de l’intervention militaire qui englobe « les cas unis de conflit international ou de conflit potentiel en dehors des activités normales en temps de paix dans lesquels la menace, la démonstration ou l’utilisation délibérée de la force militaire par les canaux officiels du gouvernement étasunien sont explicitement dirigées vers le gouvernement, les représentants officiels, les forces officielles, la propriété ou le territoire d’un autre acteur étatique ».36 Le MIP n’a pas publié sa base de données. Les situations exactes de toutes les interventions militaires identifiées ne sont donc pas encore accessibles au public. Par conséquent, ce rapport n’a accédé qu’aux données récapitulatives de la publication Introducing the Military Intervention Project (2023) et n’a pas pu produire une carte basée sur les travaux du MIP.

Comme le montre la figure 13, en juin 2023, les données reconnues du US Congressional Research Service montrent que les forces armées des États-Unis ont été déployées dans 101 pays entre 1798 et 2023.37 La figure 14 montre que le Royaume-Uni a envahi militairement 170 pays et territoires entre 1169 et 2012.

Selon le MIP, entre 1776 et 2019, les États-Unis ont mené plus de 392 interventions militaires dans le monde.38 La moitié de ces opérations ont été menées entre 1950 et 2019, et 25 % d’entre elles ont eu lieu dans l’après-guerre froide.39 Le rythme de ses interventions militaires s’est clairement accéléré depuis 1991.

En 1950, lors de la Journée internationale des travailleuses, Claudia Jones, une communiste noire et immigrée, s’adresse à un rassemblement de militantes aux États-Unis. Dans des circonstances différentes, mais avec le même esprit, nous partageons ce rapport dans le but de, pour citer Jones, « renforcer [notre ] conscience de la nécessité de campagnes militantes de front unique autour des revendications brûlantes du moment, contre l’oppression monopolistique, contre la guerre et le fascisme ».40

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PARTIE II : Évolution de l’impérialisme

La nouvelle étape de l’impérialisme

Le monopole du dollar étasunien, le passage du statut de pays créancier à celui de débiteur à partir des années 70, et la chute de l’Union soviétique en 1991, ont marqué le début d’une période où les États-Unis ont tenté de créer un ordre mondial unipolaire. L’unipolarité n’a pas pu être pleinement établie : certains États, qualifiés d’« États voyous » par les États-Unis, ont refusé de se soumettre à ce nouveau système.41

Au cours des quinze dernières années, le projet d’unipolarité étasunienne a été considérablement affaibli. La période comprise entre la « grande récession financière » de 2008 et le conflit de février 2022 entre l’OTAN et la Russie a consolidé un changement quantitatif et qualitatif dans l’impérialisme mondial.

Il en résulte une question historique : celle de la profondeur et des conséquences des rivalités inter-impérialistes. Cette tendance a de profondes implications stratégiques et politiques. Les autres puissances impérialistes rompront-elles avec les États-Unis sur des questions fondamentales ou subordonneront-elles leurs propres intérêts à ceux des États-Unis ?

Aujourd’hui, les faits montrent que ces différences ne sont plus stratégiques. L’impérialisme a consolidé une nouvelle étape de son existence, mieux décrite sous le nom d’hyper-impérialisme. Nous expliquons plus loin pourquoi nous avons choisi ce terme.

Certaines des caractéristiques de cette nouvelle étape sont les suivantes :

  • La Chine est devenue l’économie la plus grande et la plus dynamique au monde. La croissance du Sud global dépasse celle du Nord global. La croissance du produit intérieur brut (PIB) en Asie est nettement supérieure à celle des pays du G7.
  • Malgré leurs atouts économiques, les États-Unis sont confrontés à une croissance fragile et en déclin par rapport à la montée en puissance des pays du Sud (la croissance de la Chine en étant un moteur). Le PIB total, l’industrie, le commerce, les infrastructures et les communications 5G en sont des indicateurs. Les États-Unis font des tentatives agressives pour freiner la croissance économique de la Chine et son rôle dans les initiatives mondiales comme les BRICS10. Les États-Unis orientent le monde vers un protectionnisme accru.
  • Les États-Unis ont rapidement fait progresser la guerre hybride, y compris les sanctions américaines (infligées à plus d’un pays sur quatre dans le monde).42 La saisie par les États-Unis des réserves nationales (de Russie, du Venezuela, d’Iran et d’Afghanistan) a été un réveil brutal pour de nombreuses personnes dans les pays du Sud.
  • Les États-Unis visent désormais la domination de l’Eurasie, où l’Occident fait face à la Russie et à la Chine, deux pays puissants dotés d’une forte capacité économique, technologique, militaire, énergétique et alimentaire. La démilitarisation complète de la longue frontière entre la Chine et la Russie et leur partenariat « sans limite » annoncé témoignent des intérêts communs des deux pays en matière de paix et de sécurité.
  • Il existe un danger clair et réel que l’impérialisme poursuive sa voie militariste et s’appuie sur sa domination militaire pour compenser son déclin économique et politique relatif croissant. Les intérêts politiques et militaires des impérialistes sont désormais devenus primordiaux. Des pertes économiques à court terme peuvent être attendues. 43 Les intérêts des individus ou groupes capitalistes sont secondaires.
  • L’hégémonie du dollar étasunien, la financiarisation et la capacité technologique permettent à la finance de déplacer des milliers de milliards de dollars en transactions en quelques millisecondes, ce qui a modifié les mécanismes de l’accumulation capitaliste et sa propriété. Les capitalistes européens et japonais investissent leurs capitaux dans les mêmes structures que celles de leurs pairs étasuniens, bien que sous le contrôle de ces derniers.
  • Les États-Unis ont renforcé leur infrastructure de « soft power » déjà vaste en s’appuyant sur l’essor d’une nouvelle génération de réseaux sociaux et de streaming vidéo, sous le contrôle total de ses monopoles , tous explicitement intégrés dans le complexe numérique militaro-industriel américain.
  • Les contradictions entre les pays impérialistes sont désormais non-antagonistes et secondaires. L’Allemagne, le Japon, la France et toutes les autres puissances impérialistes doivent subordonner leurs intérêts à court et moyen terme aux intérêts fondamentaux des États-Unis. Leur travail est coordonné au sein de l’OTAN+. Les documents politiques officiels indiquent que leur stratégie à l’égard de la Chine consiste à réduire les risques. Pourtant, les responsables du Bundestag allemand, par exemple, sont à la pointe des appels en faveur de l’isolement de la Chine, même si cela implique une perte considérable de marchés pour les fabricants « allemands ».44 Il existe également une volonté interne simultanée de remilitariser l’Allemagne.
  • Les nouvelles institutions multilatérales et les modèles alternatifs de financement du développement émergent des pays du Sud prennent de l’ampleur. Cette tendance se remarque clairement dans l’ampleur du soutien en faveur de la Belt and Road Initiative (BRI) et de l’intérêt croissant pour l’adhésion aux BRICS, désormais BRICS10. Près de 80 % des États membres des Nations Unies participent à la BRI, ce qui représente environ 64 % de la population mondiale, leurs économies combinées représentant 52 % du PIB (en parité de pouvoir d’achat) mondial en 2022.45 Les pays des BRICS10 regroupent désormais 45,5 % de la population mondiale, avec 35,6 % de la part du PIB mondial (PPA). En comparaison, bien que les pays du G7 (Canada, France, Allemagne, Italie, Japon, Royaume-Uni et États-Unis) ne représentent que 10 % de la population mondiale, leur part du PIB mondial (PPA) est de 30,4 %.46
  • Les pays du Sud perdent confiance dans le leadership économique, politique et moral des États-Unis et de l’Europe. C’est la Chine, et non les États-Unis, qui a facilité la conclusion d’un accord diplomatique décisif entre l’Arabie saoudite et l’Iran. La Russie et la Chine effectuent désormais la majeure partie des échanges commerciaux entre les deux pays dans leur propre monnaie. Les BRICS10 mettent en place un groupe de travail pour explorer des alternatives à l’utilisation du dollar étasunien, notamment des systèmes de paiement internationaux et une éventuelle nouvelle monnaie de réserve. Lors du vote en faveur de la résolution des Nations Unies sur un cessez-le-feu à Gaza (A/ES-10/L.25), le Nord a été dépassé en nombre, avec 14 voix contre et 120 pour.
  • Pour la première fois depuis plus de 600 ans, il existe désormais une alternative économique et politique crédible à la domination des affaires mondiales par les européens et leurs descendants d’États coloniaux blancs. Premièrement, le groupe socialiste dirigé par la Chine. Deuxièmement, les aspirations croissantes à la souveraineté nationale, à la modernisation économique et au multilatéralisme, qui émergent du Sud global.

Compte tenu de ces changements, la classe dirigeante politique étasnunienne a défini, dans le cadre du Center for New American Security (CNAS, le groupe de réflexion basé à Washington et noyau intellectuel du gouvernement américain) la géostratégie des États-Unis comme la double défaite de la Russie et de la Chine, ce qui signifierait que le Nord global prendrait le contrôle de l’Eurasie. La taille, la part des ressources naturelles, la puissance militaire, la proximité géographique et l’indépendance vis-à-vis de la domination impérialiste de la Chine et de la Russie sont les facteurs clés de leur vision mondiale et de leur partenariat stratégique respectifs.

Ces facteurs objectifs sont bien plus dominants que les facteurs idéologiques. Les États-Unis veulent accomplir leur mission inachevée de dénucléarisation de la Russie. À Washington, on trouve des cartes dessinées pour montrer les deux pays divisés en petits morceaux, États vassaux de l’Occident, sans indépendance et certainement sans armes nucléaires.

Comme le montre la figure 15, la Chine, la Russie, la RPD de Corée et l’Iran sont les quatre puissances nucléaires (ou potentiellement nucléaires) qui sont au centre de l’attaque de première ligne de l’impérialisme. La Chine et la Russie sont les deux principales cibles, la première en raison de sa puissance économique et la seconde en raison de son arsenal nucléaire. La Syrie, le Venezuela, Cuba et la Biélorussie sont également des cibles immédiates d’un renversement de régime.

Le monde est confronté à un moment très difficile et dangereux. Les pays du Sud sont très divers et hétérogènes, ne forment pas un bloc et ne sont pas alignés idéologiquement. Ils n’ont certainement aucune alliance militaire. Certains (la République de Corée et les Philippines) se sont retrouvés mêlés à la sphère militaire américaine.

Ce qu’ils ont, c’est une histoire commune. Ils ont subi des centaines d’années d’abus coloniaux et semi-coloniaux de la part du Nord global. Les nations les plus blanches ont passé les cinquante dernières années à essayer d’effacer de l’histoire la terreur qu’elles ont déclenchée sur les peuples non-blancs du monde, y compris ceux qui vivent à l’intérieur de leurs propres frontières.

Les médias occidentaux se délectent des vastes différences au sein des pays du Sud. Bien qu’affaiblis, le « Groupe des 77 » et le « Mouvement des non-alignés » continuent d’exister. L’évolution vers un sentiment plus fort d’identité partagée parmi les pays du Sud ne peut être ignorée. La revendication de souveraineté nationale est profondément démocratique. Elle demeure une question cruciale pour améliorer la vie des classes populaires dans les pays du Sud et constitue également une étape nécessaire vers le socialisme.

La Première Guerre mondiale a marqué le début de la Révolution russe (1917), suivie de la création de l’Union soviétique, le premier État ouvrier pleinement opérationnel au monde, et d’une vague de luttes révolutionnaires de libération nationale. La Seconde Guerre mondiale s’est terminée par la création de la République populaire démocratique de Corée (1948) et de la République populaire de Chine (1949), qui ont été suivies par une autre vague de luttes de libération nationale comprenant d’importantes victoires socialistes, comme celle du Viêt Nam (1954 et 1975) et de Cuba (1959).

Aujourd’hui, nous ne vivons pas une telle période révolutionnaire. Pourtant, il existe clairement un nouvel état d’esprit et une volonté d’éveil pour faire avancer les projets inachevés de libération nationale qui ont commencé au cours des deux périodes précédentes. La domination du système néocolonial occidental est remise en question. Nous assistons à des « changements jamais vus depuis 100 ans » et entrons dans une nouvelle période de l’histoire.

En résumé, nous pouvons dire qu’il existe huit contradictions principales évidentes dans le monde :47

  • Impérialisme dirigé par les États-Unis moribond vs. socialisme dirigé par la Chine émergent.
  • Capital en quête de rentabilité parasite vs. exigences des sociétés en matière de développement, d’industrie, d’agriculture et d’emploi écologiquement durables.
  • Impérialisme dirigé par les États-Unis vs. nécessité urgente d’une souveraineté nationale des pays socialistes et capitalistes du Sud.
  • Classes dirigeantes du Nord global vs. bourgeoisie des pays capitalistes du Sud.
  • Classe dirigeante suprémaciste blanche du G7 (et du reste du Nord global) vs. classes populaires (ouvriers, paysans et petits bourgeois) dans les nations non-blanches du Sud global.
  • Bourgeoisie et couches supérieures des pays capitalistes du Sud vs. classes populaires du Sud global.
  • Impérialisme occidental vs. avenir de la planète et de la vie humaine.
  • Contradiction interne au Nord global entre sa bourgeoisie et les millions de travailleurs (des sections pauvres et de plus en plus nombreuses de travailleurs qualifiés et semi-qualifiés).

Comme nous avons déjà commencé à le faire avec l’armée, nous tentons ici d’analyser cette nouvelle étape de l’impérialisme, le fonctionnement interne du camp impérialiste, et d’examiner la composition et les connotations du Sud global pour comprendre les principales contradictions du monde aujourd’hui.

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Conquête, racisme et génocide : l’histoire commune du camp impérialiste

La richesse des pays du Nord est issue de vols historiques et de dépossessions violentes au fil des siècles (Figure 16).48 La stagnation économique et les exigences de croissance ont entraîné le pillage des ressources d’autres régions. Tout commence dès les invasions militaires des croisades contre les régions arabes et musulmanes de l’Asie occidentale (1050-1291).

La fin de l’optimum climatique médiéval européenne (d’environ 950 à 1250 après J.-C.) et la catastrophe de la peste noire (1346-1353) ont fait pencher la balance en faveur des paysans, et non plus de l’aristocratie. Les rébellions paysannes et les chartes de la forêt dans toute l’Europe étaient le signe que l’avenir du capitalisme était loin d’être scellé.

L’Europe a alors entamé sa trajectoire d’hégémonie mondiale grâce à ses puissances maritimes militarisées, dès 1415 avec l’invasion et la prise de Ceuta par le Portugal, un port marocain fortifié, date que nous utilisons pour marquer les plus de 600 ans de domination occidentale. La première puissance coloniale européenne, le Portugal, a utilisé les capitaux génois pour financer ses expéditions, et le reste de l’Europe a emboîté le pas dans les années 1400.

Les conquêtes des nations non-blanches du monde, la dépossession ultérieure des peuples de leurs terres et la subordination de leur travail ont vu émerger des idéologies raciales. Cette couche idéologique a infiltré la base et la superstructure des sociétés européennes et des peuples qu’elles ont conquis. Cette situation est particulièrement prononcée dans les États coloniaux blancs, qui étaient dès le début de leur existence des projets raciaux. Au sein de ces États coloniaux blancs, les États-Unis et Israël représentent désormais la version la plus aiguë, la plus permanente et la plus profondément enracinée des projets raciaux et religieux.

Les analyses économiques montrent que la véritable augmentation de l’investissement capitaliste au Royaume-Uni a commencé lorsque les profits de l’esclavage et des pillages de pays comme l’Inde ont permis une augmentation historique de l’investissement en capital fixe et ont été décisifs dans ce qu’on appelle l’accumulation primitive capitaliste et le financement de la « révolution industrielle ». Dans une étude de 2022, Utsa Patnaik a indiqué que le Royaume-Uni avait extrait 45 000 milliards de dollars étasuniens (en utilisant une formule de taux d’intérêt composés puisqu’ils restent impayés) de l’Inde entre 1765 et 1936.49 La grande majorité des principales institutions britanniques ont profité de la traite transatlantique des esclaves. Les fondements idéologiques racistes ont également façonné le développement ultérieur du capitalisme et de l’impérialisme.

Au fil des siècles, l’Europe a créé plusieurs autres projets coloniaux en dehors du noyau historique, dans les Amériques et en Australasie, notamment au Kenya, en Afrique du Sud et au Zimbabwe. Les projets « réussis » ne se sont pas installés sur des terres inhabitées (le mythe de la terra nullius), mais sont passés par le génocide et la conquête militaire en créant des populations et des États majoritairement blancs. L’Allemagne a perpétré le premier génocide du XXe siècle, et a assassiné environ 80 000 peuples Herero et Nama en Namibie entre 1904 et 1908. Cinq d’entre eux subsistent aujourd’hui : les États-Unis, le Canada, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et Israël, tous des projets de la Grande-Bretagne, cette dernière ayant commencé ses conquêtes coloniales au milieu des années 1500 en Irlande. Le rôle de la Grande-Bretagne dans les Amériques a abouti à la création des États-Unis d’Amérique. La tristement célèbre Déclaration Balfour britannique (1917) a joué un rôle central dans la formation d’Israël aux dépens de la Palestine, alors colonie britannique. La mission sioniste devait créer en Israël une barrière contre les « hordes barbares » d’Asie. Aucune autre nation n’est aussi influente aux États-Unis qu’Israël. Les États-Unis, en raison de leur taille et de leur rôle, restent la force dominante du terrorisme mondial, mais Israël joue un rôle démesuré dans la violence et les dépenses militaires. Le pays possède des armes nucléaires que les médias occidentaux minimisent commodément.

De leur création aux temps modernes, les États-Unis ont été et demeurent un projet racial. Dans American Holocaust: The Conquest of the New World (1992), David E. Stannard estime qu’au cours des 150 premières années de la conquête européenne des Amériques, jusqu’à 100 millions de peuples autochtones pourraient être morts à cause de la conquête et de ses conséquences, notamment la maladie, la guerre et l’esclavage.

En 1860, près de quatre millions de Noirs étaient esclaves rien qu’aux États-Unis.50 En 2022, plus de 720 000 Noirs étaient incarcérés dans les prisons étasuniennes. Les Noirs représentent 38 % de la population carcérale contre 12 % de la population totale. Les États-Unis comptent près de 20 % de tous les prisonniers dans le monde, alors qu’ils ne représentent que 5 % de la population mondiale.51 Plus de 500 ans après le début de l’esclavage (la première arrivée d’un navire négrier remontant à 1519), les États-Unis placent toujours des dizaines de milliers de Noirs à l’isolement, bien que cela soit considéré comme une forme de torture par les Nations Unies.52 Ce n’est qu’en 2013 que l’État du Mississippi a officiellement ratifié le 13e amendement abolissant l’esclavage, officiellement inscrit pour la première fois dans la constitution le 6 décembre 1865.53 Nous ne pouvons comprendre l’idéologie de la classe dirigeante étasunienne qu’en reconnaissant le caractère racialisé de sa structure de classe.

La déclaration de l’OTAN de 2023 et le soutien unifié au génocide israélien contre les Palestiniens sont une preuve suffisante que l’impérialisme ne peut être dissocié des aspects raciaux historiques. Depuis plus de 600 ans, les États européens et les États de colons blancs ont cherché à dominer le monde, et y sont parvenu.

Depuis la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis ont cherché à étendre cette règle pour au moins un millénaire. Au départ, tous les États du camp impérialiste étaient blancs. Avec la défaite totale du Japon lors de la Seconde Guerre mondiale, notamment grâce à l’utilisation des bombes atomiques, le pays a été assimilé au camp impérialiste, obtenant finalement le statut de « blanc honoraire » inventé par les Sud-Africains. Le Japon était auparavant une puissance fasciste qui liait également son expansion impérialiste à des pratiques racialisées.

L’impérialisme a également des fondements patriarcaux racialisés, qui remontent à la façon dont la division sexuelle du travail, le contrôle des capacités reproductives des femmes et l’exploitation de leur travail non rémunéré ont été remodelés au sein de la colonisation occidentale, comme conditions préalables à l’expansion internationale de l’accumulation du capital.54 Depuis lors et jusqu’à aujourd’hui, la subordination et la violence basées sur le genre ont été largement utilisées dans les guerres et les conquêtes, depuis l’esclavage sexuel de dizaines de milliers de « femmes de réconfort » pendant l’occupation militaire japonaise en Chine et en Indonésie, jusqu’à l’exploitation sexuelle actuelle qui se déroule à l’intérieur des bases militaires américaines aux Philippines.55

Ce n’est pas un hasard si les États-Unis apparaissent dans sept des huit catégories de violence historique illustrées sur la figure 16. Ce processus n’a pas commencé dans les années 1890, avec le développement de l’impérialisme moderne. On peut remonter à 1492 avec la première invasion européenne des Amériques.

En octobre 2023, sur 193 membres des Nations Unies, seuls les États-Unis et Israël ont voté contre la fin de l’embargo et du blocus illégaux contre l’héroïque Cuba. Lorsqu’un premier projet de résolution appelant à un cessez-le-feu à Gaza a été rédigé le 16 octobre 2023, pas un seul membre blanc du Congrès étasunien ne l’a initialement signé.56 Il existe une filiation entre les marchands d’esclaves portugais en Afrique de l’Ouest et les génocidaires israéliens et étasuniens en Palestine.

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Histoire et définition de l’« hyper-impérialisme »

Préhistoire

La préhistoire de l’impérialisme moderne commence en 1415 avec l’avènement de l’expansion maritime européenne. L’Afrique en est alors la première victime, suivie par la colonisation des Amériques et le génocide de millions de peuples autochtones, puis par la dépendance rapide de l’Europe (et de ses États colonisateurs) à l’égard du capital imbibé de sang provenant de l’esclavage humain, qui se prolonge pendant 400 ans.

L’existence de la Grande-Bretagne en tant que puissance moderne commence avec la dépendance vampirique au sang des esclaves et des travailleurs coloniaux. Les Britanniques sont responsables de millions de morts avec la traite négrière atlantique et les conquêtes coloniales. Le travail des esclaves dans les Amériques (ainsi que la capture par les Britanniques d’une bonne partie des gains des colonies espagnoles et portugaises) apporte la touche « spéciale » à ce qu’on appelle l’accumulation primitive ou originale (ursprüngliche Akkumulation, terme utilisé par Marx dans Le Capital).57

Outre le fait d’être un projet racial, l’impérialisme des États-Unis suit une trajectoire unique de développement capitaliste :

  • Une forme d’esclavage capitaliste très rentable.
  • Un État suivant une expansion effrénée sur un vaste territoire, sans aucun vestige de la féodalité.
  • Le seul grand pays impérialiste dont le territoire n’a pas été attaqué militairement par d’autres pays impérialistes.
  • Une puissance impériale qui a commencé à se développer après la division du monde par l’Europe.
  • Un pouvoir illimité auto-défini à travers la doctrine Monroe (1823), ainsi que des concepts tels que la destinée manifeste et l’exceptionnalisme étasunien.

Depuis l’avènement de l’industrie moderne, le système capitaliste mondial a connu deux périodes successives de domination par une seule puissance capitaliste, d’abord le Royaume-Uni, puis les États-Unis. De la fin du XVIIIe siècle jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, la Grande-Bretagne était considérée comme la force dominante de la finance internationale. Cependant, cette situation s’effondre ouvertement lorsque la Grande-Bretagne abandonne la convertibilité de la livre sterling en or et met fin à l’étalon or/livre en 1931. En réalité, la domination étasunienne était évidente dès la Première Guerre mondiale et son hégémonie reconnue démarre en 1945, sur les cendres de l’Europe. Au cœur du système impérialiste se trouve donc ce que l’on peut appeler le Projet anglo-américain.

La taille de l’économie des États-Unis dépasse celle de la Grande-Bretagne dans les années 1870, mais son PIB par habitant (PPA) étasunien n’égale celui de la Grande-Bretagne qu’au XXe siècle. En 1913, l’économie étasunienne représente deux fois la taille de celle de la Grande-Bretagne en termes de PIB (PPA).58 Cependant, ce n’est qu’en 1945 (les États-Unis étant cinq fois plus grands que le Royaume-Uni) que son hégémonie est pleinement et formellement établie. À cette époque, les États-Unis fabriquent plus de la moitié des produits mondiaux.

Histoire

S’appuyant largement sur le livre de Rudolf Hilferding de 1910, Finance Capital, l’ouvrage de Vladimir Lénine, L’Impérialisme, stade suprême du capitalisme (1916), explique la montée du capital financier au cours de la dernière période du XIXe siècle, passant du capitalisme libéral classique à un impérialisme financier.59 L’augmentation de la composition organique du capital signifie que des dépenses de capital de plus en plus importantes sont nécessaires pour accroître la production. Il ne s’agit plus de la simple capacité de la plupart des capitalistes individuels à s’engager dans une concurrence classique, conduisant à la domination des oligopoles et des monopoles avec la réorganisation du système financier pour répondre à leurs besoins.

Parallèlement à cela, des changements technologiques ont lieu. Le passage de l’énergie à vapeur à l’énergie électrique dans les années 1890 provoque un bond dans les forces productives et dans la production en usine : une efficacité énergétique plus élevée, une maintenance moindre, la décentralisation, une configuration reconfigurée des usines, une production de masse et une augmentation massive de la division et de la socialisation du travail. Ce type de changement rapide dans les forces productives se reproduit plus tard avec l’invention du transistor et l’essor des ordinateurs.

Lénine souligne cinq caractéristiques de cette nouvelle étape : la montée du capital financier et de l’oligarchie financière ; la concentration de la production et des monopoles ; l’exportation de capitaux ; la montée des cartels monopolistes, qui se « partagent » le monde ; et l’achèvement de la division territoriale du monde entre les plus grandes puissances capitalistes, ainsi que le conflit croissant entre les États impérialistes.

Ces développements sont synonymes d’une nouvelle étape pour le capitalisme, la plus importante et la plus récente : l’étape de l’impérialisme moderne. Il ne pourra y avoir d’autre étape du capitalisme (un système sans concurrence ne serait pas capitaliste).

Le livre de Lénine a été écrit à la veille de la révolution soviétique. Une fois l’Union soviétique formée, le conflit entre le travail et le capital change qualitativement et n’est plus seulement une contradiction interne au sein des pays, mais inclut des contradictions entre États ayant des bases de classe différentes.

L’impérialisme moderne hérite pleinement de l’histoire de la domination et de l’exploitation du monde par le projet européen. Lénine définit les superprofits, résultat de l’impérialisme moderne, comme « un excédent de profits dépassant les profits capitalistes normaux et coutumiers dans le monde entier ».60

Au lendemain de la Première Guerre mondiale, les divisions capitalistes internationales s’intensifient encore pendant la Grande Dépression (1929-1939), alors que diverses puissances impérialistes enferment leurs économies derrière des droits de douane et autres barrières. Avant la fin de la Seconde Guerre mondiale, la réorganisation du système financier mondial menée par les États-Unis est décidée à Bretton Woods en juillet 1944. La convertibilité des principales monnaies en dollar étasunien et de celui-ci étasunien en or établit la suprématie du nouvel « or vert ». Afin de garantir la mise en œuvre et le respect de ses réglementations, le Fonds monétaire international et la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD) (plus tard renommée Banque mondiale) sont créés. Ces deux institutions sont maintenant des piliers clés de la domination étasunienne sur les pays du Sud.

Après la Seconde Guerre mondiale

En 1945, les États-Unis remportent une victoire décisive parmi les puissances capitalistes et le dollar étasunien commence à dominer. La période de 1945 à 1971 est une phase expansionniste de l’impérialisme étasunien. Les États-Unis subissent d’importantes pertes politiques au cours de cette période, notamment un certain nombre de projets socialistes nouvellement formés. Cependant, confiants dans leur propre suprématie productive, les États-Unis entament une réorganisation radicale du système capitaliste mondial après la Seconde Guerre mondiale. Le pays démantèle les droits de douane et autres mesures protectionnistes qu’il estime inutile à son propre progrès (mais conserve des mesures de subventions qui avantagent ses propres entreprises capitalistes). La nouvelle organisation « mondialisée » du capitalisme mondial post-Seconde Guerre mondiale diffère considérablement, dans sa structure internationale, du système capitaliste d’avant 1945. Elle permet un développement des forces productives plus rapide que celui des empires coloniaux précédents. Comme le disait Karl Marx à propos de la Grande-Bretagne, les XIXe et XXe siècles restent marqués par des monopoles, derrière l’image du libre-échange. Les États-Unis renforcent encore cette domination grâce à des monopoles impérialistes protégés par un appareil militaire international.

Créée en 1949, l’OTAN avait initialement trois objectifs : premièrement, arrêter la propagation du spectre communiste en Europe occidentale ; deuxièmement, garantir la subordination militaire de tous les autres impérialistes aux États-Unis ; et troisièmement, créer un bloc militaire pour contenir et éventuellement renverser les pays du bloc socialiste. Les États-Unis commencent également à domestiquer l’élite européenne et obtiennent son soutien au projet de l’Atlantique Nord par le biais de l’intégration économique et de la dépendance (symbolisée par le Plan Marshall à partir de 1948) et de la subordination politique (par exemple à travers des institutions comme la conférence de Bilderberg à partir de 1954).61

Les États-Unis avaient trois objectifs dans le monde colonial. Premièrement, finaliser la défaite du contrôle européen et supprimer les obstacles aux intérêts économiques étasuniens. Deuxièmement, interdire leur alignement sur le bloc socialiste. Troisièmement, vaincre tout projet révolutionnaire d’inspiration communiste ou dirigé par le communisme.

À quelques exceptions près, comme à Cuba et aux Philippines au tournant du XXe siècle, les États-Unis n’ont jamais eu l’objectif ou le désir de gouverner ou de gérer l’ensemble des relations politiques, économiques et sociales au niveau local dans ce que l’on appelait autrefois le Tiers Monde. En utilisant la puissance militaire, des opérations secrètes, des incitations économiques et le « soft power », les États-Unis ont développé une stratégie de néocolonialisme : indépendance politique nominale et subordination économique quasi totale. La première institution responsable de l’enrôlement des Européens dans le projet hégémonique étasunien après la Seconde Guerre mondiale, la BIRD, a orienté ses travaux vers les pays du Sud après l’entrée en vigueur du plan Marshall.

Néolibéralisme

L’étape suivante de l’impérialisme est généralement appelée néolibéralisme. Elle apparaît comme une réponse à la stagnation économique qui débute dans les années 1960 (et qui s’aggrave avec la crise de 1974) et à la menace politique des projets de gauche du Tiers Monde.62 Le néolibéralisme est expérimenté pour la première fois au Chili (1973) et en Argentine (1976) par les « Chicago Boys » de Milton Friedman. Les deux projets sont mis en œuvre par des coups d’État sanglants qui tuent des dizaines de milliers de personnes pour éradiquer le soutien aux projets de gauche, avec le soutien des États-Unis. Les élections de Margaret Thatcher (1979) au Royaume-Uni et de Ronald Reagan (1980) aux États-Unis ouvrent la voie à l’ascension du néolibéralisme.

En 1981, les États-Unis sont devenus, en termes courants, un pays débiteur. La chute de l’Union soviétique en 1991 permet aux États-Unis de s’engager dans une projection impérialiste plus ouverte, notamment dans le domaine militaire. Les principales caractéristiques du néolibéralisme sont les suivantes :

  • Le monde subit une mondialisation économique et la financiarisation du capitalisme monopolistique, avec des privilèges de monopole financier « super-impérialistes » créés par les États-Unis qui soutiennent le retrait du dollar étasunien de l’étalon-or.
  • Les États-Unis étendent de manière agressive leurs droits de propriété intellectuelle au monde entier et obtiennent des monopoles mondiaux quasi perpétuels. L’économie des biens tangibles est subordonnée à l’économie virtualisée. De vastes secteurs de petite production sont impitoyablement détruits.
  • Le Fonds monétaire international et la Banque mondiale mènent des politiques d’austérité qui appauvrissent et endettent les pays du Sud. Cette dette ne peut être remboursée qu’en exportant des produits que le Nord global paierait en dollars étasuniens. Contrairement à toute autre banque, la Banque mondiale définit la politique économique de ses créanciers, en réduisant le rôle de l’État et en dévaluant la monnaie locale pour assurer la primauté du dollar étasunien. La privatisation, le confinement du secteur public, le retrait du rôle de l’État dans l’économie et la société (en particulier dans les pays du Sud) et la précarisation accrue du travail sont les principales revendications de leurs politiques. La pauvreté et les inégalités se creusent, notamment l’intensification du travail reproductif non rémunéré des femmes.63
  • La désarticulation de la production industrielle et des chaînes logistiques (notamment grâce à d’énormes changements technologiques et aux prix du pétrole subventionnés par les États-Unis) crée non seulement des augmentations massives de productivité, mais aussi d’énormes avantages pour le capital mondial et ses sociétés multinationales aux dépens de la classe ouvrière. Le capital peut facilement déplacer une partie de la production dans divers petits pays faibles du Sud, et les pays industrialisés du Sud, comme le Brésil et l’Afrique du Sud, subissent une désindustrialisation. Le socialisme et la grande taille de la Chine la protègent de ce sort.
  • Un glissement se produit de la production vers la finance spéculative et le capital en quête de rente monopolistique. Une forte déréglementation des marchés financiers partout dans le monde et une révolution dans les technologies de communication ont rendu possibles d’énormes flux de capitaux financiers spéculatifs en temps réel.
  • Une nouvelle forme avancée de production et de circulation monopolistiques est devenue évidente dans de multiples secteurs de l’économie. Notamment, dans le cadre de la montée du capital monopolistique numérique, quelques monopoles et oligopoles, tels que Google, dominent le monde entier (à l’exception de la Chine, la Russie, l’Iran, la RPD de Corée, Cuba et quelques autres).
  • On remarque une croissance de l’État coercitif, des niveaux élevés d’inégalité et une montée du populisme néofasciste.
  • La montée de l’hégémonie culturelle, politique et étrangère occidentale est possible grâce à l’omniprésence et au statut de monopole économique des technologies étasuniennes, notamment Google, Facebook, WhatsApp, Instagram et Twitter.64

L’ouvrage de Michael Hudson sur le super-impérialisme (1972) décrit la grande défaite du reste du monde au moment où les États-Unis abandonnent l’étalon-or.65 Plutôt que d’acheter de l’or pour préserver leur monnaie, les États-Unis forcent les autres banques centrales à recycler leurs excédents de dollars en achetant des bons du Trésor étasunien. Cette mesure leur permet de contraindre le reste du monde à payer ses dettes, y compris celles résultant de la guerre contre le peuple vietnamien. Les États-Unis sont devenus un pays débiteur, mais ont pu externaliser leur dette grâce à l’instrument du complexe Dollar-Wall Street.

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Technologie et « soft power »

Ce processus s’accompagne d’énormes changements technologiques et du développement des forces productives. Les semi-conducteurs, par exemple, sont synonymes de la multiplication par 100 milliards de la densité de transistors entre 1954, date de la création du premier transistor en silicium fonctionnel, et juin 2023, avec le lancement de la puce Apple M2 Ultra dotée de 134 milliards de transistors.66

La puissance du secteur technologique étasunien naît d’abord de l’importance du progrès technologique pour le complexe militaro-industriel et, ensuite, de la domination des États-Unis dans le commerce mondial, qui lui permet de déployer sa puissance commerciale pour renforcer le rôle central de la Silicon Valley. Ainsi, la Silicon Valley est à la fois un catalyseur des fonctions essentielles du renseignement militaire de l’État et l’un des bénéficiaires de celui-ci.

La nature sous-jacente de ce que l’on appelle « l’effet de réseau » permet l’établissement rapide de monopoles et d’oligopoles « naturels » dans de nombreux domaines technologiques. Comme les échanges téléphoniques il y a cent ans, lorsque Google franchit un certain nombre de parts de marché dans les fonctions de recherche et les monétise, elle devient un oligopole. Des technologies comme le cloud computing ont permis à Amazon de passer du statut de monopole du secteur de la vente au détail à celui de concurrent de Google et Microsoft sur de nouveaux marchés.

Le terme « soft power » est développé par Joseph Nye à la fin des années 1980, mais il s’agit simplement d’une étiquette désignant l’extension des concepts d’hégémonie de Gramsci à l’impérialisme étasunien. Les « secteurs » suivants font partie de l’hégémonie mondiale des États-Unis : la culture, l’information, le divertissement, les organisations à but non lucratif (ONG), le monde universitaire et les groupes de réflexion. Ils dépendent tous d’une industrie des communications centralisée commune, qui couvre les câbles optiques sous-marins, les satellites, les réseaux de télécommunications, les data centres massifs, les sociétés de communications numériques comme Twitter (X), Facebook et Google.

On peut remarquer environ cinq étapes dans le développement des technologies de communication au cours du siècle dernier :

  1. Radio, téléphone et « talkies » (1920-1950).
  2. Télévision et essor de la publicité sur Madison Avenue (1950-1970).
  3. Révolution numérique, croissance à grande échelle d’Internet (qui débute en réalité sous la forme d’un projet militaire étasunien en 1969) (1980-2000).
  4. Téléphones portables et première génération de réseaux sociaux (2000-2005).
  5. Téléphones portables omniprésents, appareils intelligents et monopoles de diffusion de vidéo, comme Netflix, Amazon Prime, Disney+, CGI, réalité augmentée et virtuelle, et bientôt, les médias influencés par l’IA (de 2005 à aujourd’hui).

Chacune de ces cinq générations de technologies a été commercialisée puis « militarisée » sous l’œil vigilant de l’armée et des agences de renseignement des États-Unis. Hollywood est tristement célèbre pour ces liens. La cinquième génération de technologies représente un saut quantitatif et qualitatif en matière de capacités. Les entreprises technologiques et médiatiques, vecteurs de l’hégémonie des États-Unis, contrôlent désormais efficacement la majeure partie des voix entendues par la jeunesse du Sud global. Si X est en déclin et était principalement un espace réservé aux classes bavardes, Facebook, Instagram et les services de streaming comme Netflix pénètrent la vie de milliards de travailleurs.

Prenons le cas de l’Inde. Au cours des dix premiers mois de 2023, 510 millions de personnes ont regardé des vidéos sur Internet en Inde, soit un total de 371 milliards (B) d’heures avec 2,9 billions de vues. 105 milliards de ces heures ont été consacrées aux réseaux sociaux, 74 milliards au divertissement, 10,5 milliards à l’actualité, 10 milliards au commerce en ligne et 12,8 milliards à d’autres sujets (principalement la finance). Au cours du mois d’octobre 2023, les 18-24 ans ont passé en moyenne 940 minutes sur Instagram, 708 sur YouTube, 387 sur Facebook et 117 sur X. Pour tous les âges, le temps passé sur Facebook, Instagram et X a plus que doublé depuis janvier 2020. En octobre 2023, les services de streaming vidéo suivants ont généré des millions de téléspectateurs : 170 millions – Disney, 99 millions – MX Player (société indienne qui serait en pourparlers avec Amazon), 92 millions – JioCinema (Reliance, Paramount et James Murdoch) et d’autres comme ZEE5, Netflix et Sony. Malgré l’essor de Bollywood, Hollywood est toujours présent en Inde.67

À l’échelle mondiale, les médias occidentaux ont recours à quatre types de censure sur les réseaux sociaux : le « shadow banning » ou « ghosting » (suppression secrète de téléspectateurs), les listes blanches et noires (priorité au contenu souhaitable ; dépréciation ou élimination du contenu indésirable), manipulation algorithmique privée non visible, et maintenant même suppression et élimination directes du contenu et/ou des utilisateurs.

On estime que 73 % du trafic Internet est réalisé par des « bad bots », notamment de faux comptes d’utilisateurs contrôlés par l’État, en particulier aux États-Unis et en Israël.68 Plus de la moitié de ce trafic utilise des techniques d’évasion pour imiter le comportement humain. Ces techniques sont systématiquement déployées dans le cadre de diverses campagnes étasuniennes de soft power, notamment pour les élections et l’opinion publique.

Le Financial Times, soulignant la « suprématie culturelle de l’Amérique », s’inquiète ainsi au nom de l’empire : « conserver une immense portée culturelle est un merveilleux outil pour une superpuissance en perte de vitesse. Le truc, c’est de ne pas s’endormir dessus. »69

Cependant, le niveau de contrôle de chaque appel téléphonique, message et frappe de touche par les renseignements étasuniens entraîne des enjeux très élevés pour les pays du Sud. La souveraineté numérique nécessite une attention particulière et ne peut être ignorée.

Capital fictif

Karl Marx a analysé de manière critique la montée du capital fictif dans le tome III du Capital.70 Le dernier rapport de la Banque des règlements internationaux indique que la valeur notionnelle totale des produits dérivés en circulation (dont les trois types sont les taux d’intérêt, le change et les actions) a atteint 715 000 milliards de dollars étasuniens à la fin juin 2023, en hausse de 16 % en six mois, soit plus de quatre fois le PIB mondial (PPA) et plus de sept fois le PIB mondial en taux de change courants (TCC).71 La valeur marchande brute de ces produits dérivés s’élevait à près de 20 000 milliards de dollars étasuniens.

Des fonds spéculatifs comme Bridgewater Associates et des sociétés de capital-investissement comme BlackRock se livrent à cette hyper-spéculation. Une analogie est utilisée pour expliquer les produits dérivés : si vous vous tenez entre deux miroirs légèrement inclinés l’un par rapport à l’autre, vous pouvez voir une longue série d’images de vous-même. Vous restez réel, mais les images sont éphémères.

Si le capital est fictif, les résultats ne le sont pas. L’expropriation des biens naturels et des entreprises du Sud global se produit désormais à une échelle de plusieurs milliards de dollars étasuniens et à une vitesse de quelques millisecondes.72

2008-2022 : une transition

La défaite de l’Union soviétique en 1991 a suscité chez le capital étasunien un nouveau sentiment de confiance éternelle dans l’impérialisme. Ses acteurs pourraient désormais exproprier les marchés de l’ex-Union Soviétique et avoir le sentiment d’accomplir leur destinée manifeste. L’idée de la « fin de l’histoire » et l’émergence d’un sentiment d’unilatéralisme ont dominé la réflexion du Council of Foreign Relations et des autres institutions stratégiques des États-Unis.

Confrontés à un déclin du taux de création de capital dans leurs économies et à mesure que la financiarisation et les droits de propriété intellectuelle renforçaient la prédominance des monopoles, une plus grande proportion de capitaux évite les investissements productifs et recherche de plus en plus des gains à court terme, devenant encore plus spéculatif.

La crise financière de 2007-2008, ce que nous considérons comme le début de la Troisième Grande Dépression, rend les anciens outils de lutte contre la stagnation de moins en moins efficaces. L’imperméabilité de la Chine face à cette crise ajoute à l’inquiétude du Nord global. Les 14 années suivantes sont marquées par une période de transition marquant la fin de la phase néolibérale. Du début des années 2000 jusqu’en 2022, des changements majeurs commencent à se produire. Certains accélèrent la consolidation du capital, d’autres témoignent du début d’une crise existentielle du capital :

  1. Le changement le plus important est la montée de la Chine en tant que plus grande économie du monde, en parité de pouvoir d’achat (PPA).
  2. Les pays du Sud passent de 40 % du PIB mondial à 60 % lorsque ce dernier est mesuré en PPA.
  3. La Troisième Grande Dépression entraîne une nouvelle baisse des taux de croissance du PIB. En 2022, les taux de croissance moyens par habitant sur 10 ans en Europe étaient inférieurs à 1 % et aux États-Unis, à 1,5 %.
  4. Les capitaux européens et japonais sont « dénationalisés », et cette tendance s’accélère compte tenu des changements rapides sur les marchés des capitaux. Ils sont désormais pleinement intégrés, dépendants et subordonnés aux États-Unis sur les questions fondamentales.
  5. La Chine s’est consolidée en tant que projet socialiste et l’espoir occidental d’un nouveau « Gorbatchev chinois » a complètement échoué.
  6. Les pays de l’OTAN ont augmenté le nombre de leurs interventions militaires mondiales, mais ont été confrontés à une série de défaites, notamment en Afghanistan, en Irak et même, dans une certaine mesure, en Syrie.
  7. La décision américaine d’étendre l’OTAN à l’Europe de l’Est et d’utiliser l’Ukraine comme intermédiaire au centre de la tentative de contrôle de la Russie a donné lieu à un conflit militaire important entre puissances nucléaires.
  8. Les États-Unis, confrontés à une relative hégémonie économique et politique, ont commencé à étendre massivement le recours aux sanctions, aux législations, aux droits de douane et à la saisie des réserves de devises étrangères.
  9. Pour tenter d’arrêter l’avancée technologique de la Chine, les États-Unis ont commencé à recourir aux droits de douane et au protectionnisme. Il en a résulté une réelle attaque de « soft power » à l’encontre de la Chine, début d’une Nouvelle Guerre froide.
  10. Au sein de la classe dirigeante étasunienne, des voix importantes parlent ouvertement de la possibilité d’utiliser l’hégémonie militaire pour bloquer la Chine. Puisqu’ils ont également « perdu » la Russie, du moins avec Vladimir Poutine au pouvoir, les États-Unis se concentrent sur la manière de mener à bien leur mission historique consistant à subordonner l’Eurasie une fois pour toutes. Cela entraînerait à terme la dénucléarisation et le démembrement potentiel de la Russie et de la Chine.

Périodisation de l’impérialisme

L’impérialisme a changé de visage au cours des 100 dernières années. Ses périodes clés peuvent être décrites comme suit :

  • 1890-1916 : montée de l’impérialisme moderne.
  • 1917-1939 : naissance de l’Union soviétique, déclin de l’hégémonie britannique, poursuite d’une rivalité inter-impérialiste extrême, montée du fascisme, propagation des idées socialistes à travers le monde et Grande Dépression.
  • 1940-1945 : bataille mondiale contre le fascisme et l’agression allemande et japonaise.
  • 1945-2008 : établissement de la République populaire de Chine, ère de l’hégémonie étasunienne au sein du camp impérialiste, avancée des luttes de libération nationale dans les pays du Sud et fin du colonialisme direct, importance croissante des projets socialistes comme Cuba et le Vietnam, changements spectaculaires dans les forces productives et nombreuses guerres au cours desquelles les États-Unis ont assassiné des dizaines de millions de personnes. Cette période pourrait être divisée en deux parties : ce que l’on appelle l’âge d’or de l’impérialisme étasunien dans les années 1950 et 1960, suivie par les années 1970 et le tournant vers la stagnation et le néolibéralisme.
  • 2008-2023 : faux espoir de l’unilatéralisme étasunien remplacé par la prise de conscience qu’un puissant projet socialiste non blanc pourrait, en l’espace d’une vie, vaincre économiquement les États-Unis. En 1918, le 73e jour de la République socialiste fédérative soviétique de Russie, Vladimir Lénine quitte son bureau à l’Institut Smolny (Petrograd) et danse dans la neige. Il célèbre le fait que l’expérience soviétique a survécu à la Commune de Paris. Le 18 novembre 2023, la République populaire de Chine fête 27 077 jours d’existence, dépassant la durée du projet socialiste soviétique. Comme l’a souligné le président Xi Jinping, nous entrons dans une période jamais vue depuis 100 ans.

En résumé, ces changements montrent une transition vers ce que l’on peut décrire comme une nouvelle étape de l’impérialisme : l’hyper-impérialisme.

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PARTIE III : Le monde défini

La définition du Nord global

Le Nord global est un bloc militaire, politique et économique intégré composé actuellement de 49 pays, tel qu’illustré sur la figure 17. On y retrouve les États-Unis, le Royaume-Uni, le Canada, l’Australie, la Nouvelle-Zélande, Israël, le Japon et des pays secondaires d’Europe occidentale et orientale. Ce bloc dirigé par les États-Unis constitue le camp impérialiste du monde d’aujourd’hui.

Comme le montre la figure 18, le Nord global est fondamentalement un projet de l’Atlantique Nord, avec trois pays périphériques : l’Australie, la Nouvelle-Zélande et le Japon.

Inspirée par le concept de Triade de Samir Amin, mais en l’élargissant et en le modifiant pour l’adapter aux réalités du présent, l’organisation du bloc du Nord peut être envisagée comme les couches de quatre aires concentriques.73 La position de chaque pays au sein de chaque aire dépend de ses relations avec les États-Unis et de la proximité de ses services de renseignement avec ceux des États-Unis, ce qui est expliqué ci-dessous.

Aire du Nord 1 : les six pays impérialistes du noyau anglo-américain dirigé par les États-Unis

Figure 19

Aire 1 : noyau anglo-américain dirigé par les États-Unis

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Partie 1

Pays Généralités Relations avec les services de renseignement américains
Nations Uniesannée d’adhésion Population
(millions
PIB PIB (PPA)
(milliards)
Taux de croissance
moyenne annuelle mobile sur 10 ans
PIB(PPA)
par habitant
Groupe «5 eyes» Groupe «9 eyes» Groupe «14 eyes»
États-Unis 1945 338 25 463 2,1% 76.343 O O O
Royaume-Uni 1945 68 3 717 1,5% 54 824 O O O
Canada 1945 38 2 265 1,8% 58 316 O O O
Australie 1945 26 1 629 2,4% 62 026 O O O
Israël 1949 9 502 4,1% 51 990
New Zealand 1945 5 266 3,1% 51 962 O O O
Total 6 pays
485 33 843 70 326
Pourdentage du monde
6,1% 20,7%
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données des Nations Unies, du FMI
Figure 19

Aire 1 : noyau anglo-américain dirigé par les États-Unis

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Partie 2

Pays Militaire
OTANannée d’adhésion OTAN+ Dépenses militaires
ajustées (millions)
Dépenses militaires
ajustées par habitant
›moyenne mondiale(fois)
Bases américaines
sauf aux États-Unis
Déploiements
intra-impéralistes
Déploiements
militaires
dans des pays du Sud
Puissance
nucléaire
États-Unis 1949 O 1 536 859 12,6 22 34 O
Royaume-Uni 1949 O 68 463 2,8 25 8 24 O
Canada 1949 O 26 896 1,9 2 6 7
Australie O 32 299 3,4 17 8
Israël 23 406 7.2 7 O
Nouvelle-Zélande O 2 829 1,5 4
Total 1  690 752 51 36 77
Pourcentage
du monde
58,9%
Source: élaboration de Global South Insights basée sur les données des SIPRI et de Monthly Review, des Nations Unies, de World Beyond War, de l’IISS

L’aire 1 (décrite sur la figure 19) représente le noyau interne de l’impérialisme. Les vainqueurs blancs anglophones de la Seconde Guerre mondiale, les « Five Eyes » (États-Unis, Royaume-Uni en 1946, Canada en 1948, Australie et Nouvelle-Zélande en 1956) se sont constitués en tant que garde prétorienne de ce que l’on peut appeler le Projet anglo-américain. Il est composé du Royaume-Uni et des États colonisateurs blancs dont il est originaire. Israël, traité par les États-Unis comme le sixième œil, fait officieusement partie du noyau interne. La cohésion des pays de cette aire demeure, comme en témoigne l’alliance de sécurité trilatérale AUKUS, créée en septembre 2021.

La relation particulière entre les États-Unis et Israël est une clé fondamentale pour comprendre le Nord global. Ce sont des États de colons blancs, fondés et justifiés par la suprématie blanche et le fanatisme religieux, et qui constituent le cœur de l’aire 1 du Nord. Les États-Unis ont été créés par des extrémistes religieux blancs qui, en 1690, ont conçu et établi leurs colonies comme des « plantations de religion ».74 Ils croyaient que seuls eux, les puritains blancs, pouvaient réaliser le plan de Dieu dans le « désert américain ». Leur génocide contre les Amérindiens et l’esclavage des Africains étaient considérés comme le résultat inévitable et évident de leur supériorité raciale et religieuse.

Israël est une création de l’impérialisme britannique et étasunien, et résulte de l’organisation des dirigeants du mouvement sioniste. Israël est décrit comme suit par l’expert militaire du Guardian, Herbert Sidebotham, pendant la Première Guerre mondiale : « Les seuls colons possibles de la Palestine sont les Juifs… À la fois protecteurs contre l’Orient étranger et médiateur entre lui et nous, une civilisation distincte de la nôtre, mais imprégnée de nos idées politiques ».75 Pour les impérialistes, « l’absence de discrimination » n’est qu’un prétexte pour créer l’État juif et suprématiste blanc d’Israël.

Comme indiqué précédemment, entre 1776, année de leur indépendance vis-à-vis des Britanniques, et 2019, les États-Unis ont passé 228 des 245 années en guerre/conflit, et seulement 17 années en « paix ».

Au cours de son histoire, les forces du Royaume-Uni (ou les forces dotées d’un mandat britannique) ont envahi, exercé un certain contrôle ou mené des conflits dans 171 des 193 pays du monde qui sont actuellement membres des Nations Unies, soit neuf pays sur dix.76

Au cours de ses 72 années d’existence, Israël a « officiellement » déclenché 16 conflits militaires avec les Palestiniens et d’autres pays arabes. Un quart d’entre eux ont eu lieu sous le règne de Benjamin Netanyahu (1996-1999 ; 2009-2023). Bien entendu, ces statistiques « officielles » n’incluent pas les multiples incursions des colons sionistes et de leurs frères de l’armée contre les Palestiniens.

Le racisme blanc israélien et la démagogie religieuse, auparavant des justifications idéologiques, sont désormais des forces matérielles qui ont contribué au changement qualitatif de l’impérialisme actuel. Cette tendance est illustrée notamment par les dépenses militaires par habitant des États-Unis, qui sont 12,6 fois supérieures à la moyenne mondiale, et celles d’Israël, 7,2 fois supérieures, les deux plus importantes du Nord global. Au cours du premier mois ayant suivi le 7 octobre 2023, Israël a tué plus de civils que tous les civils tués en Ukraine depuis 2022 et a fait exploser plus de tonnes d’explosifs que le poids combiné des deux bombes nucléaires d’Hiroshima et de Nagasaki.77

Le service de recherche du Congrès étasunien a rapporté qu’« Israël est le plus grand bénéficiaire cumulé de l’aide étrangère des États-Unis depuis la Seconde Guerre mondiale ». Israël est le premier opérateur international du F-35 Joint Strike Fighter, l’avion furtif de cinquième génération du ministère de la Défense étasunien, considéré comme l’avion de combat le plus avancé technologiquement jamais construit.78 En tenant compte de l’inflation, l’aide des États-Unis à Israël de 1951 à 2022 s’est élevée à 317,9 milliards de dollars.79

Néanmoins, ce sont les États-Unis, et non Israël, qui dirigent les discussions dans la région après le 7 octobre 2023. La « diplomatie de la navette » de Blinken donne le ton et définit les règles des opérations militaires israéliennes et des actions « proportionnées » contre la résistance palestinienne et les puissances régionales. Les États-Unis fournissent le soutien politique et militaire nécessaire à Israël pour éliminer «définitivement» la résistance palestinienne, dissuader l’Iran et ses alliés, et faire avancer la normalisation avec les pays arabes voisins. Toutes ces interventions des États-Unis visent à jeter les bases de la construction du corridor économique Inde-Moyen-Orient-Europe (IMEC), qui n’est pas seulement un axe économique, mais aussi un plan idéologique et politique visant à bloquer l’intégration et l’influence croissantes de la Chine dans la région. Israël constitue donc un «carrefour central» pour l’IMEC étasunien, qui s’inscrit dans le cadre du Partenariat du G7 pour l’investissement mondial dans les infrastructures (PGI), un plan mondial du Nord global, visant essentiellement à contrer la BRI chinoise et toute forme de Coopération durable dans les pays du Sud.

Aire du Nord 2 : neuf puissances impérialistes du noyau européen

Figure 20

Aire 2 : noyau européen

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Partie 1

Pays Généralités Relations avec les services de renseignement américains
Nations Uniesannée d’adhésion Population
(millions)
PIB (PPA)
(milliards)
Taux de croissance
moyenne annuelle mobile
sur 10 ans
PIB (PPA)
par habitant
Groupe «5 eyes» Groupe «9 eyes» Groupe «14 eyes»
Allemagne 1973 83 5 370 1,2% 64 086 O
France 1945 65 3 696 1,1% 56 305 O O
Italie 1955 59 3 059 0,4% 51 827 O
Espagne 1955 48 2 272 1,4% 47 711 O
Pays-Bas 1945 18 1 244 1,9% 70 728 O O
Belgique 1945 12 735 1,5% 63 268 O
Suède 1946 11 695 2,4% 66 091 O
Norvège 1945 5 427 1,6% 78 014 O O
Danemark 1945 6 419 2,1% 71 332 O O
Total 9 Pays 306 17 918 58 334
Pourcentage du monde 3,8% 10,9%
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données des Nations Unies, du FMI
Figure 20

Aire 2 : noyau européen

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Partie 2

Pays Militaire
OTANannée d’adhésion OTAN+ Dépenses militaires
ajustées (millions)
Dépenses militaires
ajustées par habitant
›moyenne mondiale (fois)
Bases américaines
sauf aux États-Unis
Déploiements intra-
impéralistes
Déploiements militaires
dans des pays du Sud
Puissance
nucléaire
Allemagne 1955 O 55 760 1,9 171 8 9
France 1949 O 53 639 2,3 5 26 O
Italie 1949 O 33 490 1,6 45 5 15
Espagne 1982 O 20 307 1,2 3 3 12
Pays-Bas 1949 O 15 607 2,5 7 6 7
Belgique 1949 O 6 867 1,6 12 2 6
Suède O 7 722 2,0 2 7
Norvège 1949 O 8 388 4,3 8 2 7
Danemark 1949 O 5 468 2,6 1 4 4
Total 207 247 247 37 93
Pourcentage du monde 7,2%
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données des SIPRI et de Monthly Review, des Nations Unies, de World Beyond War, de l’IISS

Comme le montre la figure 20, les pays de l’aire 2 sont les plus proches du noyau interne dirigé par les États-Unis, à savoir l’Allemagne, la France, l’Italie, l’Espagne, les Pays-Bas, la Belgique, la Suède, la Norvège et le Danemark. L’aire 2 est définie par la proximité et l’affinité de chaque pays, ainsi que par la fiabilité de leurs fonctions de renseignement par rapport à celles des États-Unis.

«La politique est une expression concentrée de l’économie», expliquait Lénine.80 La fonction militaire est l’expression essentielle de cette concentration politique. Après la Seconde Guerre mondiale, et avec l’avènement d’Internet et des réseaux sociaux, le contrôle des communications et de toutes les fonctions connexes est devenu un nouvel atout de renseignement stratégique de l’État et a fait progresser davantage le contrôle hégémonique dominant des États-Unis sur de vastes parties du monde.

Grâce au travail de Wikileaks et au courage de Julian Assange et d’Edward Snowden, le monde a pu découvrir pour la première fois le monde secret des relations existant entre les forces impérialistes en matière de renseignement.81

Il est intéressant de noter que les États-Unis ont eu besoin d’aller au-delà du réseau « Five Eyes » et de leur relation spéciale cachée avec Israël. Par la suite, dans le secret mais de manière officielle, les États-Unis créent les «Nine Eyes», auxquels s’ajoutent le Danemark, la Norvège, la France et les Pays-Bas. Les Européens ne voulaient pas que l’on sache, même en privé, qu’Israël en était un membre officiel. En outre, Israël ne faisait pas entièrement confiance à de nombreuses puissances européennes en matière de renseignement, de sorte que toutes les parties ont permis aux États-Unis de continuer à entretenir leurs relations privilégiées avec Israël.

Cinquante ans après la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis ont continué d’exclure les anciennes puissances fascistes que sont l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne des « Five Eyes » et « Nine Eyes ». Après la fin de la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis ont construit un système international fondé sur la subordination et l’intégration des anciennes puissances fascistes et du reste de l’Europe. Ce processus de subordination et d’intégration était évident dans l’appareil militaire construit par les États-Unis, dont l’OTAN est un des piliers. L’établissement d’un système de bases militaires étasuniennes dans les puissances vaincues (l’Allemagne, l’Italie et le Japon) a permis à Washington de mettre de côté toute discussion sur un projet militaire ou diplomatique souverain pour les vaincus.

En 2001, cinq autres pays (Allemagne, Belgique, Italie, Espagne et Suède) sont ajoutés aux « Nine Eyes » pour devenir les « Fourteen Eyes ».82 Entre 2005 et 2009, les États-Unis se montrent de plus en plus inquiets à propos de la Russie et de la Chine. La « bascule vers l’Asie » officieuse démarre alors, mais son officialisation est retardée jusqu’à l’entrée en fonction de Barak Obama en 2012.83

Aire du Nord 3 : le Japon et quatorze petites puissances impérialistes européennes

Figure 21

Aire 3 : Japon + puissances européennes secondaires

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Partie 1

Pays Généralités Relations avec les services de renseignement américains
Nations Uniesannée d’adhésion Population
(millions)
PIB (PPA)
(milliards)
Taux de croissance
moyenne
annuelle mobile sur 10 ans.
PIB (PPA)
or habitant
Groupe « 5 eyes » Groupe « 9 eyes » Groupe « 14 eyes »
Japon

 

1956 124 6 145 0,5% 49 090
Suisse

 

2002 9 754 1,9% 86 262
Irlande

 

1955 5 684 8,9% 132 359
Autriche

 

1955 9 604 1,2% 66 889
Portugal

 

1955 10 439 1,6% 42 692
Grèce

 

1945 10 393 0,6% 37 526
Finlande

 

1955 6 324 1,0% 58 445
Luxembourg

 

1945 1 91 2,6% 141 333
Chypre

 

1960 1 47 2,5% 51 774
Malte

 

1964 1 31 6,1% 59 408
Islande

 

1946 1 25 3,2% 67 176
Andorre

 

1993 1 5 1,3% 66 155
Saint Marin

 

1992 1 3 1,8% 79 633
Liechtenstein

 

1990 1
Monaco

 

1993 1
Total

 

15 Pays 176 9 543 53 935
Pourcentage du monde 2,2% 5,8%
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données des Nations Unies, du FMI
Figure 21

Aire 3 : Japon + puissances européennes secondaires

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Partie 2

Pays Militaire
OTAN année d’adhésion OTAN+ Dépenses militaires
ajustées (millions)
Dépenses militaires
ajustées par habitant
›moyenne mondiale (fois)
Bases américaines
sauf aux États-Unis
Déploiements
intra-impéralistes
Déploiements
militaires dans des pays du Sud
Puissance
nucléaire
Japon O 45 992 1,0 98 3
Suisse 6 145 2,0 2 8
Irlande 1 164 0.6 1 3 4
Autriche O 3 626 1.1 3 3
Portugal 1949 O 3 500 0,9 9 1 6
Grèce 1952 O 8 105 2,2 5 4 5
Finlande 2023 O 4 823 2,4 1 6
Luxembourg 1949 O 565 2,4 1 1 3
Chypre 494 1,1 1 1
Malte 87 0,5 1
Islande 1949 O 3
Andorre
Saint Marin
Liechtenstein
Monaco
Total 74 501 118 15 40
Pourcentage du monde 2,6%
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données des SIPRI et de Monthly Review, des Nations Unies, de World Beyond War, de l’IISS

L’aire 3 (illustrée sur la figure 21), bien que composée de 15 pays, se concentre particulièrement sur le Japon, qui est devenu un atout décisif en première ligne dans les efforts visant à restreindre et à réprimer la Chine et la Russie. Cependant, nous avons ajouté ici d’autres puissances secondaires d’Europe occidentale, qui, bien que fidèles aux États-Unis, sont moins stratégiques que d’autres. Quelques-unes d’entre elles, comme le Portugal, la Finlande et l’Islande, font partie de l’OTAN. Le Portugal est la seule ancienne puissance coloniale fasciste qui ne fait pas partie de l’aire 2 en raison de sa faible importance pour le renseignement militaire étasunien (le pays n’est pas intégré au « Fourteen Eyes ») et de son PIB plus modeste.

La troisième aire du camp impérialiste comprend donc le Japon et 14 autres pays européens (Suisse, Irlande, Autriche, Portugal, Grèce, Finlande, Luxembourg, Chypre, Malte, Islande, Andorre, Saint-Marin, Liechtenstein et Monaco).

Au cours des derniers siècles, les pays des trois premières aires du camp impérialiste, à l’exception de l’Irlande, ont provoqué d’énormes désastres humains. Le Royaume-Uni, les États-Unis et les Pays-Bas se sont approprié des richesses grâce à la traite négrière africaine. Les Européens ont implanté le colonialisme dans le monde entier ; l’intégralité des Amériques, presque toute l’Afrique et plus de la moitié de l’Asie étaient dominées par les colonisateurs. Les immigrants blancs anglo-saxons ont expulsé de force ou assassiné des peuples autochtones dans les Amériques, en Australie et en Nouvelle-Zélande. Plusieurs tentatives impérialistes visant à briser la Chine ont eu lieu, notamment la première guerre de l’opium, lors de la cession de Hong Kong en 1842, puis celle de Taïwan à la fin de la première guerre sino-japonaise en 1895. En 1884-1885, les colonisateurs européens divisent arbitrairement l’Afrique lors de la Conférence de Berlin. Cette méthode violente de partition se poursuit sans relâche jusqu’à aujourd’hui, comme en témoigne la partition du Soudan en 2011 et la destruction continue du pays et de sa population. En 1919, ils démantèlent les empires austro-hongrois et allemand par le Traité de Versailles, transfèrent les droits de certaines régions de Chine (Shandong) au Japon, cèdent les colonies allemandes en Afrique aux puissances européennes victorieuses et rétablissent un ordre mondial dirigé par les forces anglo-américaines. À la suite de crises internes et de rivalités impérialistes, des États fascistes apparaissent au sein de ce camp, ce qui déclenche la Seconde Guerre mondiale et entraînent la mort d’au moins 50 millions de Soviétiques et de Chinois. Au cours des dernières phases de la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis utilisent des bombes atomiques contre des civils. À ce jour, les États-Unis refusent toujours de renoncer au premier recours aux armes nucléaires et se sont retirés unilatéralement des principaux traités nucléaires et balistiques.

Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, le Japon est devenu un allié stratégique des États-Unis. Avec la signature du Traité de sécurité américano-japonais en 1951, le Premier ministre japonais Shigeru Yoshida accepte la domination de l’armée étasunienne sur son pays. Pendant la Guerre froide, le Japon joue un rôle important pour contenir l’Union soviétique et la Chine sur le front de l’Est, et ce rôle perdure aujourd’hui. Le Japon est le deuxième pays comptant le plus de bases militaires étasuniennes en juillet 2023 (98), juste derrière l’Allemagne (171). À ce jour, aucune base allemande ne se trouve dans l’ancienne République démocratique allemande.

Bien qu’il ne soit pas officiellement membre de l’OTAN, le Japon coopère depuis 2014 avec l’OTAN sur une base individuelle (récemment, en acceptant le programme de partenariat personnalisé en juillet 2023) et a participé aux deux derniers sommets de l’OTAN. Le Japon participe également régulièrement aux réunions organisées au siège de l’OTAN à Bruxelles entre les Alliés et les quatre partenaires de la région indo-pacifique au niveau des ambassadeurs. Cette intégration pratique peut s’expliquer par le concept stratégique OTAN 2022, qui établit que « la coopération avec les partenaires de cette région est essentielle pour faire face à un environnement de sécurité mondial de plus en plus complexe, y compris la guerre de la Russie contre l’Ukraine, le changement dans l’équilibre des forces mondial, la montée de la Chine et la situation sécuritaire dans la péninsule coréenne ».

De plus, le Japon est le seul membre du G7 à ne pas faire partie de l’OTAN. En 2022, la Chine a été qualifiée par le gouvernement japonais de « plus grand défi stratégique jamais posé pour assurer la paix et la stabilité du Japon » et ce dernier a annoncé son intention de doubler ses dépenses militaires officielles pour les porter à 2 % du PIB (à égalité avec les pays de l’OTAN) d’ici 2027, une nouvelle étape pour le plafond fixé par le Japon après la Seconde Guerre mondiale, qui limitait officiellement les dépenses militaires à 1 % du PIB.84

Aire du Nord 4 : dix-neuf anciens membres du bloc européen de l’Est intégrés à l’OTAN

Figure 22

Aire 4 : ancien bloc européen de l’Est

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Partie 1

Pays Généralités Relations avec les services de renseignement américains
Nations Uniesannée d’adhésion Population
(millions)
PIB (PPA)
(milliards)
Taux de croissance
moyenne annuelle
mobile sur 10 ans
PIB (PPA)
par habitant
Groupe «5 eyes» Groupe «9 eyes» Groupe «14 eyes»
Pologne 1945 40 1 643 3,7% 43 624
Roumanie 1955 20 737 3,5% 38 703
République tchèque 1993 10 519 2,2% 47 955
Ukraine 1945 40 449 -4,0% 12 886
Hongrie 1955 10 408 3,3% 42 121
Slovaquie 1993 6 219 2,3% 40 211
Bulgarie 1955 7 205 2,3% 31 857
Serbie 2000 7 164 2,6% 24 564
Croatie 1992 4 155 2,4% 40 128
Lituanie 1991 3 133 3,2% 47 107
Slovénie 1992 2 103 2,6% 48 757
Géorgie 1992 4 75 4,2% 20 243
Lettonie 1991 2 73 2,5% 39 167
Bosnie-Herzégovine 1992 3 64 2,9% 18 518
Estonie 1991 1 60 2,9% 44 630
Albanie 1955 3 52 2,8% 18 164
Macédoine du Nord 1993 2 41 2,2% 20 129
Moldavie 1992 3 40 2,9% 15 710
Monténégro 2006 1 16 2,7% 25 862
Total 19 pays 167 5 156 32 662
Pourcentage du monde 2,1% 3,1%
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données des Nations Unies, du FMI
Figure 22

Aire 4 : ancien bloc européen de l’Est

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Partie 2

Pays Militaire
OTANannée d’adhésion OTAN+ Dépenses militaires
ajustées (millions)
Dépenses militaires
ajustées par
›moyenne mondiale (fois)
Bases américaines
sauf aux États-Unis
Déploiements
intra-impéralistes
Déploiements
militaires dans des pays du Sud
Puissance
nucléaire
Pologne 1999 O 16 573 1,2 5 4 7
Roumanie 2004 O 5 187 0,7 9 2 9
République tchèque 1999 O 4 005 1,1 6 6
Ukraine O 43 998 3,1 1
Hongrie 1999 O 2 572 0,7 2 4 4
Slovaquie 2004 O 1 994 1,0 2 3 4
Bulgarie 2004 O 1 336 0,5 4 2 2
Serbie 1 426 0,5 1 4
Croatie 2009 O 1 309 0,9 3 5
Lituanie 2004 O 1 732 1,8 2 4
Slovénie 2004 O 735 1,0 4 4
Géorgie O 360 0,3 2 2
Lettonie 2004 O 849 1,3 2 1 3
Bosnie-Herzégovine O 184 0,2
Estonie 2004 O 811 1,7 1 5
Albanie 2009 O 289 0,3 4 1
Macédoine du Nord 2020 O 225 0,3 2 4
Moldavie O 48 0,1 1 4
Monténégro 2017 O 98 0,4 2 1
Total 83 732 27 42 69
Pourcentage du monde 2,9%
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données des SIPRI et de Monthly Review, des Nations Unies, de World Beyond War, de l’IISS

L’aire 4 est composée des membres européens de l’ancien bloc de l’Est et des membres d’Europe de l’Est de l’ancien Conseil d’assistance économique mutuelle (Comecon, qui a existé de 1949 à 1991). Il s’agit d’une nouvelle catégorie au sein du camp impérialiste et ses membres ne sont donc pas inclus par Samir Amin dans son travail fondateur sur la Triade.

L’aire 4 (décrite à la figure 22) du camp impérialiste comprend la Pologne, la Roumanie, la République tchèque, l’Ukraine, la Hongrie, la Slovaquie, la Bulgarie, la Serbie, la Croatie, la Lituanie, la Slovénie, la Lettonie, la Bosnie-Herzégovine, l’Estonie, l’Albanie, la Macédoine du Nord, la Moldavie, et le Monténégro (sauf la Biélorussie). Cinq pays étaient des républiques formelles de l’Union soviétique.

Ces pays ne faisaient pas auparavant partie du camp impérialiste. Pour étendre leur hégémonie, les États-Unis ont ciblé cette région militairement, politiquement et culturellement. La Serbie, partie de l’ex-Yougoslavie, a été soumise à un bombardement de l’OTAN pendant 78 jours en 1999. Bien qu’elle ne soit pas membre de l’OTAN à ce jour, la Serbie a été contrainte de participer à des exercices militaires conjoints avec les pays de l’OTAN en juin 2023.

L’entrée de la Roumanie dans l’OTAN n’a pas nécessité de référendum. Au lieu de cela, le gouvernement au pouvoir a modifié la constitution, permettant aux sénateurs de prendre la décision sans consulter le peuple roumain.

L’expansion des États-Unis et de l’Europe occidentale s’est faite principalement par la subordination économique et l’expansion vers l’Est de l’OTAN. Quatorze pays sont membres de l’OTAN, tandis que quatre (Bosnie-Herzégovine, Géorgie, Moldavie et Ukraine) ont assisté à la réunion de l’OTAN à Vilnius en juin 2023. Certains de ces pays sont gouvernés par des régimes de droite pro-OTAN (par exemple la Pologne, l’Ukraine et l’Estonie) et jouent activement le rôle de troupes de première ligne contre la Russie.

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La définition du Sud global

Outre les 49 pays du camp impérialiste du Nord global, qui constituent la grande majorité de la population mondiale, 145 pays constituent le Sud global (Figure 23).

L’utilisation du terme « Sud global » est avant tout une référence vague et imprécise. Les actions menées au cours des quatre dernières années par le bloc militaire désormais pleinement aligné et intégré dirigé par les États-Unis ont cependant créé un vaste groupe de pays qui constituent le « Reste du monde ». Le « Reste du Monde » est donc initialement un tout regroupé sur la base d’une idée négative, c’est-à-dire le statut d’exclu de ses membres. Par conséquent, ils sont devenus une négation du camp impérialiste. Ces pays comprennent la Russie et la Biélorussie, qui ne sont pas des pays en développement, mais sont la cible d’un renversement de régime et d’un asservissement.

Le Sud global comprend principalement des pays dits « moins développés » ou « en développement », géographiquement associés à des pays d’Amérique latine, d’Asie, d’Afrique et d’Océanie. Ce terme fait implicitement référence à des pays qui ont été historiquement marginalisés dans le système économique mondial et qui sont tous aux prises avec l’héritage du colonialisme et de l’impérialisme. Autrefois, on désignait ces pays sous le terme de «Tiers Monde».

Le Sud manque de cohésion, d’une identité collective convenue, d’une organisation et d’une action unifiées. Contrairement au bloc intégré du Nord, le Sud global n’est pas un groupe ou un bloc unifié. Ces 145 pays ont chacun des idéologies et des programmes politiques distincts, avec des différences de proximité et d’orientation les uns envers les autres et envers les pays du Nord. Divers conflits existent entre certains d’entre eux, allant de conflits territoriaux (prenons le cas de l’Érythrée et de l’Éthiopie) à des luttes de pouvoir politiques intra-régionales (cas historique de l’Arabie saoudite et de l’Iran).

Une grande partie des pays du Sud aspirent à la souveraineté, à la paix et au développement, mais ces pays parviennent rarement à un consensus mondial sur quelque question que ce soit. Cela indique souvent des différences dans le degré de proximité d’un pays donné avec le noyau interne du Nord global. C’est pourquoi nous classons ces pays en « groupes » basés sur certains attributs communs plutôt qu’en une aire intégrée, en couches, ou en blocs distincts.

Cependant, cela ne signifie pas que le Sud global soit, comme le voudraient certains points de vue occidentaux, un concept fabriqué et dénué de substance. Il (Figure 24) est constitué d’anciennes colonies ou semi-colonies du camp impérialiste du Nord, ayant subi des siècles d’oppression et d’humiliation sous l’impérialisme. Une poignée de ces pays partagent, à des degrés divers d’engagement ou de réalisation, une orientation politique socialiste. En réalité, le revenu par habitant actuel de la Chine en 2022 (12 850 dollars étasuniens) en fait un pays en développement.85 C’est également en raison de ce contexte historique commun que Xi Jinping a déclaré dans son discours au BRICS Business Forum 2023 (lu par Wang Wentao) : « En tant que pays en développement et membre du Sud global, la Chine respire le même souffle que les autres pays en développement et poursuit un avenir partagé avec eux ».86

Les racines généalogiques du Sud global remontent au Projet du Tiers Monde qui tentait de modifier l’équilibre international des forces en faveur des intérêts des pays nouvellement indépendants d’un point de vue politique, mais toujours soumis économiquement au milieu du XXe siècle. Cela comprenait les efforts de la Conférence de Bandung (1955), du Mouvement de non-alignement (1961), de l’Organisation de solidarité avec les peuples d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine (1966) et la poursuite d’un nouvel ordre économique international (1974) à travers la formation de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (1964) par les pays en développement.87

Ces pays ont en commun une marginalisation historique et contemporaine dans l’ordre économique et politique mondial. Les dommages environnementaux et écologiques que le Nord global a infligés aux pays du Sud sont un des exemples les plus poignants, mais aussi les plus dévastateurs de ce statut commun. L’extraction des ressources et la spéculation financière sur les terres et les cultures ont conduit à la déforestation, à la destruction des habitats, à la dégradation des sols et à la pollution de l’eau. Cela a entraîné une perte importante de biodiversité et de vastes étendues de terres agricoles incultes, détruisant les écosystèmes et les espèces locales et entraînant une famine généralisée.

En outre, les sociétés multinationales du Nord global sont responsables de la pollution de l’air, de l’eau et du sol par des méthodes néfastes. Le néolibéralisme garantit qu’il n’existe aucune réglementation pour empêcher ces pratiques. Interdits dans le Nord, mais répandus dans le Sud, les produits agrochimiques et la production de matières dangereuses et autres déchets ont accru les risques pour la santé, en particulier pour les peuples autochtones, les femmes, les enfants et les personnes âgées.88 Les entreprises manufacturières, minières, énergétiques et de transport émettent continuellement des gaz à effet de serre, qui contribuent le plus au changement climatique, mettant les pays du Sud en danger imminent de catastrophe. Les investissements étrangers directs des sociétés multinationales du Nord ont décimé l’environnement, détruit les terres agricoles et accru la précarité de tous les travailleurs. Dans le même temps, les pays du Nord profitent de la crise climatique pour encourager davantage d’accaparement de terres et de privatisation des ressources de la biodiversité à travers la financiarisation de la nature.89

Ces 145 pays subissent désormais l’immense pression de l’expansion impérialiste excessive. Certains des défis communs auxquels ces pays continuent d’être confrontés comprennent, sans s’y limiter, le sous-développement historique, la dépendance du secteur primaire, une industrialisation limitée, la dette extérieure, les déséquilibres commerciaux, les écarts technologiques, le déficit infrastructurel et une crise environnementale disproportionnée.

Désillusionnées par les défis mentionnés ci-dessus, des portions croissantes de la nouvelle bourgeoisie des pays du Sud (qui ont émergé grâce à une croissance économique rapide au cours des deux dernières décennies, en particulier en Asie) perdent progressivement confiance dans le leadership politique, économique et moral des États-Unis et de l’Europe. De nouveaux centres de pouvoir économique, comme la Chine, offrent des modèles alternatifs de développement et d’investissement (par exemple, grâce à des initiatives comme la Nouvelle route de la soie) et sont devenus plus attractifs pour la bourgeoisie du Sud.

Parmi les 145 pays du Sud, six groupes de pays peuvent être identifiés. Bien que chaque groupe présente des traits communs identifiables, il est important de noter que le numéro du groupe est donné en corrélation avec l’ordre décroissant des pays considérés comme une menace pour le bloc impérialiste anglo-américain dirigé par les États-Unis. La catégorisation dans les groupes est dynamique et peut évoluer en fonction de la conjoncture politique et économique.

Groupe du Sud 1 : six pays socialistes indépendants

Figure 25

Groupe 1 : Pays socialistes indépendants

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Partie 1

Pays Généralités Histoire coloniale
Nations Uniesannée d’adhésion Population
(millions)
PIB (PPA)
(milliards)
Taux de croissance
moyenne
annuelle mobile sur 10 ans
PIB (PPA)
por habitant
Statut
colonial
Principales
puissances
coloniales
Année de
l’indépendance
Chine 1945 1 426 30 217 6,2% 21 404 Semi-colonie Royaume-Uni
Japon
1949
Viêt Nam 1977 98 1 321 6,1% 13 284 Colonie France Japon 1945
Venezuela 1945 28 197 -11,8% 7 302 Colonie Espagne 1811
Laos 1955 8 69 5,1% 9 207 Colonie France 1953
RPD de Corée 1991 26 Colonie Japon 1945
Cuba 1945 11 Colonie Espagne 1959
Total 1 597 31 804 20 577 6 Col + Semi-col
Pourcentage du monde 20,0% 19,4%
Source : élaboration de Global South Insights basées sur les données des Nations Unies, du FMIF
Figure 25

Groupe 1 : Pays socialistes indépendants

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 20222

Partie 2

Pays Militaire Cible militaire étasunienne
Dépenses militaires
ajustées (millions)
Dépenses militaires
ajustées par habitant
> moyenne mondiale (fois)
Liste de sanctions
étasunienne
Intervention militaire
étasunienne
hist.
Bases étasuniennes
Chine 291 958 0,6 O O
Viêt Nam O
Venezuela 5 0,1 O O
Laos O O
RPD de Corée O O
Cuba O O 1
Total 291 963 5 6 1
Pourcentage du monde 10,2%
Source : élaboration de Global South Insights basées sur les données des SIPRI et de Monthly Review, des Nations Unies, du CRS, de World Beyond War
Figure 25

Groupe 1 : Pays socialistes indépendants

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Partie 3

Pays Affiliations internationales Votes à l’ONU
Amis de la Charte
des Nations Unies
Org.
de coop. de Shanghai
BRICS10 Cessez-le-feu à Gaza
10/2023
Retrait de la Russie
02/2023
Chine O Complet Original O Abstention
Viêt Nam O Abstention
Venezuela O N’a pas voté N’a pas voté
Laos O O Abstention
RPD de Corée O O N
Cuba O O Abstention
Total 5 1 1 5 O 5 N+Abstention
Source : Global South Insights

Les six pays du groupe 1 (Figure 25) font progresser le socialisme à des degrés divers et adoptent souvent des positions internationales progressistes. Cinq des six membres font partie du Groupe des Amis pour la défense de la Charte des Nations Unies.

La Chine est le membre essentiel de ce groupe. Son PIB, mesuré en parité de pouvoir d’achat, se classe au premier rang mondial, presque le triple de celui de l’Inde. Le PIB (PPA) de la Chine correspond à 119 % de celui des États-Unis.90 La Chine a réalisé les progrès les plus significatifs en matière de développement humain en sortant 850 millions de personnes de l’extrême pauvreté au cours des quatre dernières décennies.91 Bien que la pays ne recherche pas l’hégémonie sur le système mondial, elle est considérée par les États-Unis et leurs alliés comme la principale menace à leur hégémonie, et est qualifiée ces dernières années de concurrent « quasi égal » dans les documents stratégiques des départements d’État et de la Défense étasuniens. La Chine représente non seulement une menace économique mais, avec la résurgence d’un parti communiste plus fort sous la présidence de Xi Jinping, elle représente une menace politique majeure en raison de sa revitalisation manifeste des traditions socialistes et communistes. La Chine est poussée par ses intérêts nationaux et sociaux et son soutien historique aux pays du Sud. Elle contribue activement aux processus et projets contre-hégémoniques. La Chine continue de déclarer publiquement son engagement à « réduire le fossé Nord-Sud ».92

Alors que la Chine représente aujourd’hui le principal défi économique et politique pour l’hégémonie du Nord global, Cuba et le Venezuela représentent la ligne de front de la résistance socialiste historique. Cuba continue de lutter contre les souffrances causées par plus de six décennies d’embargo et de blocus économiques imposés par les États-Unis. Cuba et le Venezuela, lourdement sanctionnés, n’ont fait aucune tentative pour cacher leur poursuite d’un programme socialiste. La RPD de Corée reste le « croque-mitaine » de l’Occident à l’est, tandis que le Laos et le Vietnam ont des partis communistes de longue date à la tête de leurs gouvernements et connaissent un développement économique rapide.

Depuis la fondation de l’Union soviétique, les forces de gauche mondiales sont confrontées à une contradiction entre les besoins de l’État et du peuple des projets socialistes et les besoins de la classe ouvrière dans des pays ou des régions spécifiques. Une réflexion stratégique de la part des dirigeants de la classe ouvrière dans tous les pays est nécessaire pour que les « contradictions entre les peuples » ne soient pas antagonistes et pour garantir que le coup décisif soit dirigé vers le centre de l’impérialisme. Pour pouvoir affirmer que les communistes n’ont « aucun intérêt distinct de celui du prolétariat dans son ensemble », il est nécessaire de procéder à une enquête concrète.93 Par exemple, des défaites telles que la chute de l’Union soviétique sont catastrophiques pour tous les travailleurs. De nombreuses décisions tactiques doivent être prises pour profiter des fissures du camp impérialiste afin de protéger les projets et les mouvements socialistes, qu’ils soient au pouvoir ou non.

Groupe du Sud 2 : dix pays en forte recherche de souveraineté

Figure 26

Groupe 2 : Forte recherche de souveraineté

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Partie 1

Pays Généralités Histoire coloniale
Nations Uniesannée d’adhésion Population
(millions)
PIB (PPA)
(milliards)
Taux de croissance
moyenne
annuelle mobile sur 10 ans
PIB (PPA)
par habitant
Statut
colonial
Principales
puissances
coloniales
Année de
l’indépendance
Russie 1945 145 4 770 0,8% 33 253 Indépendant
Iran 1945 89 1 617 2,0% 18 865 Semi-colonie Royaume-Uni 1979
Biélorussie 1945 10 210 0,1% 22 679 Indépendant
Burkina Faso 1960 23 58 4,9% 2 549 Colonie France 1960
Mali 1960 23 57 4,1% 2 514 Colonie France 1960
Guinée 1958 14 44 5,8% 3 025 Colonie France 1958
Niger 1960 26 40 5,7% 1 518 Colonie France 1960
Syrie 1945 22 Colonie France 1946
Afghanistan 1946 41 Semi-colonie « Royaume-Uni États-Unis » 2021
Érythrée 1993 4 Colonie Italie 1993
Total 395 6 795 20 938 « 8 Col + Semi-col »
Pourcentage du monde 5,0% 4,1%
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données des Nations Unies, du FMI
Figure 26

Groupe 2 : Forte recherche de souveraineté

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Partie 2

Pays Militaire Cible militaire étasunienne
Dépenses militaires
ajustées (millions)
Dépenses militaires
ajustées par habitant
> moyenne mondiale (fois)
Liste de sanctions
étasunienne
Intervention militaire
étasunienne
hist.
Bases étasuniennes
Russie 86 373 1,7 O O
Iran 6 847 0,2 O O
Biélorussie 821 0,2 O
Burkina Faso 563 0,1 1
Mali 515 0,1 O 2
Guinée 441 0,1 O
Niger 243 0,1 O 9
Syrie O O
Afghanistan O O
Érythrée O O 28
Total 95 802 8 6 40
Pourcentage du monde 3,3%
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données des SIPRI et de Monthly Review, des Nations Unies, du CRS, de World Beyond War
Figure 26

Groupe 2 : Forte recherche de souveraineté

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Partie 3

Pays Affiliations internationales Votes à l’ONU
« Amis de la Charte
des Nations Unies »
« Org. de coop.
de Shanghai »
BRICS10 Cessez-le-feu à Gaza
10/2023
Retrait de la Russie
02/2023
Russie O Complet Original O N
Iran O Complet Nouveau O Abstention
Biélorussie O Observateur O N
Burkina Faso N’a pas voté N’a pas voté
Mali O O N
Guinée O Abstention
Niger O O
Syrie O O N
Afghanistan Observateur O O
Érythrée O O N
Total 6 4 2 9
O
« 7 N+Abstention »
Source : Global South Insights

Les pays de ce groupe (Figure 26) ne sont pas des États socialistes, mais sont des cibles privilégiées d’un renversement de régime mené par les États-Unis. Ces pays défendent farouchement leur souveraineté et celle des autres (comme le montrent sept des neuf États qui ont voté contre la résolution soutenue par les États-Unis pour le retrait de la Russie en février 2023 et leur plein soutien à un cessez-le-feu à Gaza).

Bien que ces nations aient des raisons différentes, elles sont confrontées à certaines des situations les plus aiguës de la lutte pour la souveraineté nationale. Elles sont en première ligne de la lutte des pays du Sud contre l’impérialisme. Même si elles dépendent toutes, totalement ou partiellement, économiquement de l’Occident, elles recherchent activement leur indépendance politique. Elles sont donc soumises à une guerre hybride extrême de la part de l’impérialisme. En d’autres termes, la plupart de ces pays figurent parmi les cibles critiques des services de renseignement étasuniens pour un renversement de régime.

Ainsi, depuis le coup d’État de droite soutenu par les États-Unis en Ukraine en février 2014, suivi de l’annexion de la Crimée en vue de l’unification, la Russie est devenue une cible privilégiée d’un renversement de régime par le camp impérialiste. Les États-Unis et leurs alliés ont consacré des ressources considérables à l’affaiblissement, au démantèlement et à la dénucléarisation de la Russie. Les États-Unis ont fourni plus de 90 milliards de dollars d’assistance militaire à l’Ukraine pour la campagne contre la Russie de février 2014 à février 2022.94 La Biélorussie est géopolitiquement et économiquement alignée sur la Russie (comme par le biais de l’Organisation du traité de sécurité collective, créée en 1992, ainsi que de l’Union de la Russie et de la Biélorussie, formée en 1996) et reste donc dans la ligne de mire des services de renseignement étasuniens.

Depuis les révolutions de 1978 et 1979 qui ont chassé les dirigeants alignés sur les États-Unis, l’Afghanistan et l’Iran ont été la cible de l’intervention militaire et de l’ingérence politique des États-Unis. L’Iran a constitué un obstacle aux avancées occidentales dans la région, avec son programme d’énergie nucléaire, sa forte influence régionale dans les conflits par procuration et sa position anti-occidentale (et anti-israélienne) constante. L’Afghanistan a été envahi par les États-Unis en 2001, et les États-Unis ont passé vingt ans et dépensé plus de 2 000 milliards de dollars (300 millions de dollars par jour) pour obtenir une position en Asie centrale, pour finalement se retirer en 2021.95 Depuis 2011, la Syrie est un champ de bataille pour les tentatives étasuniennes d’assurer le contrôle de l’ensemble de l’Asie occidentale, une guerre qui confirme la définition de la Syrie donnée par le journaliste Patrick Seale en 1965 : « le miroir d’intérêts rivaux ».96

Ce groupe s’agrandit, avec des pays comme l’Érythrée, le Mali, le Burkina Faso et le Niger qui prennent des mesures plus audacieuses pour protéger leur souveraineté nationale. L’Érythrée est depuis longtemps hostile aux États-Unis et a été la cible de son intervention par l’intermédiaire de l’Éthiopie. Le Burkina Faso, le Mali et le Niger ont rejeté la présence néocoloniale de la France au Sahel et ont écarté leurs dirigeants politiques alignés sur l’Occident. Ils ont créé l’Alliance économique du Sahel et l’Alliance des États du Sahel, en vue d’une coopération économique et militaire. Cependant, leur situation politique est encore instable et ces pays luttent pour garantir leur indépendance réelle vis-à-vis des puissances impérialistes.

Groupe du Sud 3 : onze pays progressistes actuels ou historiques

Figure 27

Groupe 3 : Pays progressifs, historiquement ou actuellement

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Partie 1

Pays Généralités Histoire coloniale
Nations Uniesannée d’adhésion Population
(millions)
PIB (PPA)
(milliards)
Taux de croissance
moyenne annuelle
mobile sur 10 ans
PIB (PPA)
par habitant
Statut
colonial
Principales
puissances coloniales
Année de
l’indépendance
Brésil 1945 215 3 837 0,5% 18 897 Colonie Portugal 1822
Colombie 1945 52 966 3,2% 18 720 Colonie Espagne 1819
Afrique du Sud 1945 60 953 0,9% 15 728 Colonie Royaume-Uni 1931
Algérie 1962 45 584 1,8% 12 900 Colonie France 1962
Népal 1955 31 144 4,5% 4 787 Indépendant
Bolivie 1945 12 119 3,2% 9 936 Colonie Espagne 1825
Honduras 1945 10 70 3,1% 6 832 Colonie Espagne 1821
Nicaragua 1945 7 48 2,9% 7 229 Colonie Espagne 1821
Zimbabwe 1980 16 41 1,6% 2 603 Colonie Royaume-Uni 1980
Palestine 5 34 1,9% 6 364 Colonie « Israël Royaume-Uni »
Namibie 1990 3 29 1,4% 11 080 Colonie « Allemagne Afrique du Sud » 1990
Total 456 6 826 15 397 10 Col
Pourcentage du monde 5,7% 4,2%
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données des Nations Unies, du FMI
Figure 27

Groupe 3 : Pays progressifs, historiquement ou actuellement

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Partie 2

Pays Militaire Cible militaire étasunienne
Dépenses militaires
ajustées (millions)
Dépenses militaires
ajustées par habitant
moyenne mondiale (fois)
Liste de sanctions
étasunienne
Intervention militaire
étasunienne
hist.
Bases étasuniennes
Brésil 20 211 0,3 O 2
Colombie 9 938 0,5 O 6
Afrique du Sud 2 995 0,1
Algérie 9 146 0,6 O
Nepal 428 0,1
BoliviE 640 0,1 O
Honduras 478 0,1 O 9
Nicaragua 84 0,1 O O 3
Zimbabwe 182 0,1 O
Palestine O O
Namibie 369 0,4
Total 44  471 3 7 20
Pourcentage du monde 1,6%
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données des SIPRI et de Monthly Review, des Nations Unies, du CRS, de World Beyond War
Figure 27

Groupe 3 : Pays progressifs, historiquement ou actuellement

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Partie 3

Affiliations internationales Votes à l’ONU
Amis de la Charte
des Nations Unies
« Org.de coop. de
Shanghai »
BRICS10 Cessez-le-feu à Gaza
10/2023
Retrait de la Russie
02/2023
Brésil Original O O
Colombie O O
Afrique du Sud Original O Abstention
Algérie O O Abstention
Népal Dialogue O O
Bolivie O O Abstention
Honduras O O
Nicaragua O O N
Zimbabwe O O Abstention
Palestine O
Namibia O Abstention
Total 5 1 2 10
O
« 6 N+Abstention »
Source : Global South Insights

Les pays énumérés dans la figure 27 sont classés dans ce groupe en fonction de deux critères essentiels : la mesure dans laquelle ils sont la cible d’un changement de régime et le rôle qu’ils jouent dans la promotion publique des positions anti-impérialistes internationales. Les pays de ce groupe sont soit les prochains à faire l’objet d’un changement de régime (après le groupe 2), soit ceux qui jouent un rôle clair en s’élevant contre les intérêts du camp impérialiste.

En ce qui concerne les pays qui poursuivent des programmes progressistes, on peut citer le Brésil sous l’égide du Parti des travailleurs (PT) et l’Afrique du Sud sous l’égide de l’alliance tripartite (qui comprend le Congrès national africain, le Parti communiste sud-africain et le Congrès des syndicats sud-africains). Les premiers ont fait preuve de leadership dans la mise en place d’institutions intergouvernementales alternatives telles que l’Union des nations sud-américaines (UNASUR) en 2008, la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes (CELAC) en 2011 et le Forum de dialogue IBSA, qui a été complété par les BRICS en 2009. Quant aux seconds, ils ont joué un rôle important dans la mise en place de l’Union africaine. Ces pays défendent parfois des positions progressistes sur la scène internationale, comme le fait de soutenir Cuba contre les sanctions étasuniennes au sein des organisations internationales. Le Népal a aboli la monarchie en 2008, a instauré une république dirigée par la gauche et a accompli des progrès considérables en matière d’émancipation juridique et politique des communautés historiquement marginalisées.

La Palestine est occupée et assiégée depuis plus de sept décennies. L’Algérie a fermement soutenu l’autodétermination et l’indépendance palestiniennes et, au sein de l’Union africaine, a joué un rôle influent dans la promotion de positions progressistes sur l’unité africaine et le développement économique. Après le coup d’État populaire au Niger, l’Algérie a été le seul État africain à préconiser rapidement des solutions non militaires aux crises politiques.

Ces pays tentent de trouver une voie de développement souveraine au sein d’un système capitaliste mondial, tout en étant confrontés à de graves contradictions internes. Par exemple, l’Afrique du Sud a été contrainte de faire d’importantes concessions économiques dans les années 1990, notamment en matière de désindustrialisation et de privatisation, ce qui a eu des conséquences catastrophiques. Aujourd’hui, 57 % des Sud-Africains vivent en dessous du seuil de pauvreté, 46 % sont au chômage, et la part de l’industrie manufacturière dans le PIB est passée de 25 % en 1981(sous le régime de l’apartheid), à 12 % en 2022.97

Contrairement à la Chine, par exemple, ces nations ont vu leur potentiel révolutionnaire réduit (ou leurs révolutions n’ont pas abouti au socialisme) mais ont essayé de poursuivre des programmes progressistes dans les sphères nationales, régionales et/ou internationales. Ces pays sont considérés par les États-Unis comme ayant des positions politiques contraires à l’hégémonie du Nord global. Nombre de ces pays ont connu des interventions étasuniennes, des guerres hybrides, des sanctions et des coups d’État. Parmi les exemples récents de ces interventions, citons les coups d’État au Honduras (2009), au Brésil (2016) et en Bolivie (2019). Le Zimbabwe continue de faire l’objet de sanctions de la part des États-Unis.

Groupe du Sud 4 : cinq nouveaux pays non alignés

Figure 28

Groupe 4 : Nouveaux pays non alignés

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Part 1

Pays Généralités Histoire coloniale
Nations Uniesannéed’adhésion Population
(millions)
PIB (PPA)
(milliards)
Taux de croissance
moyenne
annuelle mobile sur 10 ans
PIB (PPA)
par habitant
Statut
colonial
Principales
puissances
coloniales
Année de
l’indépendance
Inde 1945 1 417 11 901 5,7% 8 398 Colonie Royaume-Uni 1947
Indonésie 1950 276 4 037 4,2% 14 687 Colonie Pays-Bas 1945
Turquie 1945 85 3 353 5,3% 39 314 Indépendant
Mexique 1945 128 3 064 1,2% 23 548 Colonie Espagne 1810
Arabie saoudite 1945 36 2 150 2,5% 66 836 Indépendant
Total 1 942 24 505 12 634 3 Col
Pourcentage du monde 24,3% 15,0%
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données des Nations Unies, du FMI
Figure 28

Groupe 4 : Nouveaux pays non alignés

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Partie 2

Pays Militaire Cible militaire étasunienne
Dépenses militaires
ajustées (millions)
Dépenses militaires
ajustées par habitant
> moyenne mondiale (fois)
Liste de sanctions
étasunienne
Intervention militaire
étasunienne
hist.
Bases étasuniennes
Inde 81 363 0,2
Indonésie 8 987 0,1 O 1
Turquie 10 645 0,3 O O 12
Mexique 8 536 0.2 O
Arabie saoudite 75 013 5,7 O 21
Total 184 543 1 4 34
Pourcentage du monde 6,4%
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données des SIPRI et de Monthly Review, des Nations Unies, du CRS, de World Beyond War
Figure 28

Groupe 4 : Nouveaux pays non alignés

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Partie 3

Pays Affiliations internationales Votes à l’ONU
« Amis de la Charte
des Nations Unies »
Org.
de coop. de Shanghai
BRICS10 Cessez-le-feu à Gaza
10/2023
la Russie
02/2023
Inde Complet Original Abstention Abstention
Indonésie O O
Turquie Dialogue O O
Mexique O O
Arabia saoudite Dialogue Nouveau O O
Total 3 2 4
0
1 Abstention
Source : Global South Insights

Avec des économies d’échelle considérables, le non-alignement qui caractérise les pays de ce groupe est économique et non politique (figure 28). Ces pays non socialistes ne relancent pas le projet politique du mouvement des non-alignés. La plupart de ces pays sont indépendants depuis 50 ans ou plus des anciens dirigeants coloniaux et entretiennent aujourd’hui des relations très différentes avec eux.

Sur le plan économique, les cinq pays non alignés ont tous un PIB important (ils se classent tous parmi les 20 plus grandes économies en termes de PIB (PPA) en 2022) et prennent des mesures économiques de plus en plus indépendantes.

Ces pays ont reconnu que la thésaurisation par les États-Unis de leurs réserves de change et les sanctions prises à l’encontre de pays représentant 30 % de la population mondiale constituaient de graves menaces. Aujourd’hui, plus d’un pays sur quatre fait l’objet de sanctions de l’ONU ou d’un gouvernement occidental, tandis que 29 % du PIB mondial est produit dans des pays sanctionnés, contre 4 % dans les années 1960.98

Sur le plan politique, ils sont ambivalents. Sur le plan militaire, l’Indonésie, la Turquie et l’Arabie saoudite entretiennent des relations très étroites avec les États-Unis. L’Arabie saoudite est l’un des principaux acheteurs d’armes étasuniennes de pointe. Le président turc Recep Tayyip Erdoğan est un partenaire moins fiable pour l’Occident, bien que la Turquie soit membre de l’OTAN.

Ce groupe affiche des comportements très contradictoires sur la scène internationale. Ses membres affichent un certain degré de dépendance économique et d’alignement sur l’Occident, qui diminue lentement, et/ou sont prêts à s’opposer à lui sur certaines questions clés.

Malgré l’alignement de l’Inde sur les États-Unis dans des organisations telles que le QUAD, ou ses positions réactionnaires à l’égard d’Israël dans sa guerre contre Gaza, depuis le début de la guerre en Ukraine, l’Inde a refusé d’accéder à certaines demandes importantes des États-Unis, telles que le refus d’appliquer les sanctions étasuninnes contre la Russie. Le ministre des affaires étrangères, S. Jaishankar, a vigoureusement défendu le refus de son gouvernement d’accéder aux pressions de Washington, déclarant lors d’une conférence de presse en juin 2023 : « Beaucoup d’Étasuniens ont encore en tête le traité de l’OTAN […]. On dirait presque que c’est le seul modèle ou prisme à travers lequel ils envisagent le monde… Ce n’est pas un modèle qui s’applique à l’Inde. »99 Le conflit avec le Canada, et maintenant avec les États-Unis, au sujet d’opérations de renseignement indiennes présumées dans leurs pays, complique le plan des États-Unis visant à obtenir le soutien de l’Inde contre la Chine. La grande bourgeoisie nationale de l’Inde commence à faire valoir ses intérêts.

L’Arabie saoudite se distingue des États-Unis lorsque ses intérêts économiques personnels l’exigent, par exemple en augmentant les investissements entre l’Arabie saoudite et la Chine (y compris les transactions pétrolières payées en yuans chinois) et en utilisant son partenariat avec la Russie au sein de l’OPEP+ pour fixer le prix mondial du pétrole. Cependant, simultanément, lors de la préparation du sommet de la Ligue arabe de novembre 2023, l’Arabie saoudite a bloqué les efforts algériens visant à fermer les bases étasuniennes, a bloqué l’aide militaire iranienne proposée à la Palestine, a mis un terme à une proposition de boycott commercial et a refusé de réduire les livraisons de pétrole à Israël. Le Pentagone, la CIA et l’Arabie saoudite ont été des alliés de premier plan dans la récente guerre contre le Yémen qui a fait des dizaines de milliers de morts. Les forces spéciales étasuniennes ont fourni aux pilotes saoudiens les coordonnées de leurs cibles pour les bombardements.100

L’Indonésie, qui abrite la plus grande population islamique au monde, a connu un taux de croissance moyen composé du PIB (PPA) de 4,2 % entre 2012 et 2022.101 Selon les prévisions du FMI, d’ici 2030, l’Indonésie pourrait être la cinquième économie mondiale en termes de PIB (PPA). Les actifs de ses entreprises publiques en proportion du PIB sont passés de 43 % en 2014 à 54 % en 2018.102 En 2020, l’Indonésie a interdit les exportations de nickel brut, un composant clé des batteries au lithium. L’Indonésie représentait 39 % de la production mondiale de nickel en 2022. Ses exportations totales en termes courants ont bondi de 183 à 323 milliards de dollars étasuniens entre 2020 et 2022.103 Le 2 février 2023, lors du Mandiri Investment Forum (MIF), le président Joko Widodo a mis en garde : « Nous devons nous souvenir des sanctions imposées par les États-Unis à la Russie. Visa et Mastercard pourraient poser problème ». Il a également déclaré : « Si nous utilisons nos propres plateformes, et que tout le monde les utilise, depuis les ministères et les administrations locales jusqu’aux gouvernements municipaux, alors nous pourrons sécuriser la situation ». Pourtant, en novembre 2023, les États-Unis (qui ont participé activement à la torture et à l’assassinat de plus de 500 000 communistes indonésiens) et l’Indonésie ont signé un accord transformant leurs relations en un partenariat stratégique global.104 L’Indonésie a retiré sa demande d’adhésion aux BRICS en 2023 et a exprimé publiquement son intérêt à devenir membre de l’OCDE.

Confrontée à une guerre d’agression en vertu du droit international, l’année 1846 a été le moment de facto qui a consolidé le projet impérial étasunien émergent au Mexique. Forcée d’échanger des terres contre la paix et de céder 50 % de son territoire, la nouvelle frontière entre le Mexique et les États-Unis est devenue une ligne historique qui constitue, sur le plan interne, une détermination inexorable et préétablie. D’autre part, le Mexique a une histoire qui revient inlassablement à ses racines anticoloniales, à sa culture indigène et à son histoire moderne anti-impérialiste. L’interdépendance complexe entre le Mexique et les États-Unis est très peu analysée, notamment en ce qui concerne la population, la culture et l’économie, mais elle est peut-être plus importante en termes de sécurité géopolitique pour la viabilité de l’hégémonie étasunienne.105 Le gouvernement de López Obrador est, à plusieurs niveaux, une tentative des mouvements sociaux mexicains de lancer une réforme contre-néolibérale de faible intensité. L’accent est mis sur la récupération de la propriété publique de toutes les ressources stratégiques, sur le lancement d’une nouvelle réforme agraire et sur la récupération de la terre en tant que propriété sociale. La réforme agraire en cours au Mexique garantit par la loi l’enregistrement de 50,6 % du territoire en tant que propriété sociale communale aux mains des paysans et des communautés indigènes (29 803 communes agraires sur 99,7 millions d’hectares). Cependant, l’accord États-Unis-Mexique-Canada (USMCA, anciennement Accord de libre-échange nord-américain) de 2020 représente un obstacle constant au découplage ou au désenchevêtrement de la position politique du Mexique vis-à-vis du Sud émergent. En juin 2023, les États-Unis ont entamé une procédure préliminaire (par le biais de l’arbitrage de l’USMCA) pour bloquer le décret présidentiel qui prendrait diverses mesures pour interdire le maïs génétiquement modifié, qui représente 96 % des exportations de maïs des États-Unis.106 Les États-Unis adoptent des politiques plus agressives et interventionnistes pour saper les acquis historiques de la souveraineté mexicaine, obtenus de haute lutte. En 2022, le président mexicain Lopez Obrador a refusé d’assister au VIIIe Sommet des Amériques à Los Angeles après avoir appris que les États-Unis n’inviteraient pas les dirigeants cubains, vénézuéliens et nicaraguayens à la réunion.

Les cinq pays de ce groupe affichent des perspectives politiques, économiques ou militaires différentes et des niveaux nuancés de proximité avec le Nord global. Cependant, leurs nouvelles bourgeoisies nationales en plein essor recherchent progressivement des relations économiques alternatives et des divergences politiques occasionnelles avec les États-Unis, bien que ce soit par intérêt personnel et pour leur propre préservation. La question de l’émergence d’une nouvelle bourgeoisie nationale dans les pays du Sud n’entre pas dans le cadre de ce texte ; elle sera abordée dans notre recherche de 2024 sur la formation et la propriété du capital dans le Sud global.

Groupe du Sud 5 : cent onze pays du Sud global diversifiés

Figure 29

Groupe 5 : Pays du Sud divers

Informations sélectionnées pour les 20 premiers pays, triées par PIB (PPA), 2022

Partie 1

Pays Généralités Histoire coloniale
Nations Uniesannée d’adhésion Population
(millions)
PIB (PPA)
(milliards)
Taux de croissance
moyenne annuelle mobile sur 10 ans
PIB (PPA)
par habitant
Statut
colonial
Principales
puissances
coloniales
Année de
l’indépendance
Égypte 1945 111 1 676 4,3% 16 174 Colonie Royaume-Uni 1922
Pakistan 1947 236 1 520 4,0% 6 695 Colonie Royaume-Uni 1947
Thaïlande 1946 72 1 482 1,8% 21 154 Semi Colonie Royaume-Uni, France
Bangladesh 1974 171 1 343 6,5% 7 971 Colonie Royaume-Uni 1971
Nigéria 1960 219 1 281 2,2% 5 909 Colonie Royaume-Uni 1960
Argentine 1945 46 1 226 0,3% 26 484 Colonie Espagne, Royaume-Uni 1816
Malaisie 1957 34 1 137 4,1% 34 834 Colonie Royaume-Uni 1957
Émirats arabes unis 1971 9 835 3,1% 84 657 Colonie Royaume-Uni 1971
Singapour 1965 6 719 3,3% 127 563 Colonie Royaume-Uni 1965
Kazakhstan 1992 19 603 2,9% 30 523 Indépendant
Chili 1945 20 579 2,2% 29 221 Colonie Espagne 1818
Pérou 1945 34 523 2,8% 15 310 Colonie Espagne 1821
Irak 1945 44 505 2,7% 11 948 Colonie Royaume-Uni 1932
Maroc 1956 37 363 2,4% 9 900 Colonie France, Espagne 1956
Éthiopie 1945 123 358 8,4% 3 435 Indépendant
Ouzbékistan 1992 35 340 5,9% 9 634 Indépendant
Sri Lanka 1955 22 320 1,8% 14 267 Colonie Royaume-Uni 1948
Kenya 1963 54 311 4,5% 6 151 Colonie Royaume-Uni 1963
Qatar 1971 3 309 2,2% 109 160 Colonie Royaume-Uni 1971
Myanmar 1948 54 261 3,3% 4 847 Colonie Royaume-Uni 1948
Total 2 242 21 171 9 687 103 Col+SemiCol
Pourcentage du monde 28,1% 12,9%
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données des Nations Unies, du FMI
Figure 29

Groupe 5 : Pays du Sud divers

Informations sélectionnées pour les 20 premiers pays, triées par PIB (PPA), 2022

Part 2

Pays Militaire Cible militaire étasuniennet
Dépenses militaires
ajustées (millions)
Dépenses militaires
ajustées par habitant
> moyenne mondiale (fois)
Liste de sanctions
étasunienne
Intervention militaire
étasunienne
hist.
Bases étasuniennes
Égypte 4 646 0,1 O O
Pakistan 10 337 0,1 8
Thaïlande 5 724 0,2 O 3
Bangladesh 4 806 0,1
Nigéria 3 109 0,1
Argentine 2 578 0,2 O 3
Malaisie 3 671 0,3
Émirats arabes unis 3
Singapour 11 688 5,4 2
Kazakhstan 1 133 0,2
Chili 5 566 0,8 O O
Pérou 2 845 0,2 O 5
Irak 4 683 0,3 O O 10
Maroc 4 995 0,4 O
Éthiopie 1 031 0,1 O O
Ouzbékistan
Sri Lanka 1 053 0,1 O
Kenya 1 138 0,1 O 3
Qatar 15 412 15,9 5
Myanmar 1 857 0,1 O
Total 131 182 17 63 192
Pourcentage du monde 4,6%
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données des SIPRI et de Monthly Review, des Nations Unies, du CRS, de World Beyond War
Figure 29

Groupe 5 : Pays du Sud divers

Informations sélectionnées pour les 20 premiers pays, triées par PIB (PPA), 2022

Part 3

Pays Affiliations internationales Votes à l’ONU
Amis de la Charte
des Nations Unies
Shangai
Coop. Org.
BRICS10 Cessez-le-feu
à Gaza
10/2023
Retrait de la Russie
02/2023
Égypte Dialogue Nouveau O O
Pakistan Complet O Abstention
Thaïlande O O
Bangladesh O Abstention
Nigéria O O
Argentine O O
Malaisie O O
Émirats arabes unis Dialogue Nouveau O O
Singapour O O
Kazakhstan Complet O Abstention
Chili O O
Pérou O O
IraK Abstention O
Maroc O O
Éthiopie Nouveau Abstention Abstention
Ouzbékistan Complet O Abstention
Sri Lanka Dialogue O Abstention
Kenya O O
Qatar Dialogue O O
Myanmar Dialogue O O
Total 3 17 3 77
O
20
Abstention
Source : Global South Insights

111 pays ne sont pas inclus dans les quatre groupes du Sud précédents, en raison de leurs multiples diversités. La figure 29 énumère les vingt plus grandes économies ; la liste complète figure en annexe. Ces pays ne partagent pas les mêmes opinions politiques, ni les mêmes systèmes gouvernementaux. L’Eswatini, le Qatar et le Bhoutan sont encore gouvernés par des monarchies, tandis que la Libye, la Syrie et la Somalie n’ont pas d’autorité gouvernementale unique. Une poignée de pays ont abandonné les programmes socialistes après avoir été paralysés par le financement du développement occidental, comme dans le cas de l’Angola et du Mozambique. En raison de l’intervention politique et économique impérialiste, plusieurs pays de ce groupe souffrent d’un grave dysfonctionnement gouvernemental (effondrement de la gouvernance, de l’autorité et de la loi) et sont presque entièrement incapables de subvenir aux besoins de leur population.

Les performances économiques de ces pays varient considérablement. Par exemple, bien que le Nigeria soit la deuxième économie d’Afrique et que son PIB (PPA) soit quatorze fois supérieur à celui du Cambodge, le premier a connu un taux de croissance annuel moyen négatif de 0,4 % entre 2012 et 2022, tandis que le second a enregistré une croissance annuelle de 5,3 %.

Ces pays n’ont pas tous le même degré d’allégeance militaire au Nord global. L’Égypte est un partenaire stratégique d’Israël et des États-Unis depuis 1979, tandis que le Bangladesh, les Comores et Djibouti ont participé à la saisine de la Cour pénale internationale concernant la situation dans l’État de Palestine le 17 novembre 2023.

Ces pays connaissent une série de conflits internes et de différends territoriaux, comme dans le cas de l’occupation coloniale du Sahara occidental par le Maroc, à partir de 1975.107 D’autres, comme la République démocratique du Congo et Haïti, font l’objet d’interventions militaires de l’ONU, auxquelles participent d’autres pays du Sud.

Les pays du groupe 5 participent à diverses plateformes multilatérales avec des pays du Sud et du Nord. L’appartenance à ce groupe peut changer si un pays développe des caractéristiques plus distinctives. Par exemple, si l’Argentine a toujours joué un rôle progressiste dans la région, la récente dérive droitière empêche aujourd’hui l’appartenance à ce groupe. Il ne s’agit donc pas d’une position statique ou permanente.

Groupe du Sud 6 : deux colonies militaires étasuniennes de facto

Figure 30

Groupe 6 : Pays à forte présence militaire étasunienne

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Part 1

Pays Généralités Histoire coloniale
Nations Uniesannée d’adhésion Population
(millions)
PIB (PPA)
(milliards)
Taux decroissance
moyenne annuelle mobile sur 10 ans
PIB (PPA)
par habitant
Statut
colonial
Principales
puissances
coloniales
Année de
l’indépendance
Rép. du Corée 1991 52 2 780 2,7% 53 845 Colonie Japon 1945
Philippines 1945 116 1 171 4,9% 10 495 Colonie Espagne États-Unis 1946
Total 167 3 951 24 210 2 Col
Pourcentage du monde 2,1% 2,4%
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données des Nations Unies, du FMI
Figure 30

Groupe 6 : Pays à forte présence militaire étasunienne

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Part 2

Pays Militaire Cible militaire étasunienne
Dépenses militaires
ajustées (millions)
Dépenses militaires
ajustées par habitant
> moyenne mondiale (fois)
Liste de sanctions
étasunienne
Intervention militaire
étasunienne
hist.
Bases étasuniennes
Rép. du Corée 46 365 2,5 O 62
Philippines 3 965 0,1 O 11
Total 50 331 2 73
Pourcentage du monde 1,8%
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données des SIPRI et de Monthly Review, des Nations Unies, du CRS, de World Beyond War
Figure 30

Pays à forte présence militaire étasunienne

Informations sélectionnées, triées par PIB (PPA), 2022

Part 3

Pays Affiliations internationales Votes à l’ONU
« Amis de la Charte
des Nations Unies »
« Org.
de coop. de Shanghai »
BRICS10 Cessez-le-feu à Gaza
10/2023
Retrait de la Russie
02/2023
Rép. du Corée Abstention O
Philippines Abstention O
Total 0
O
0
N+Abstention
Global South Insights

Les peuples de ces deux nations (figure 30) s’alignent largement sur le Sud global. Les deux pays ont eu des dirigeants pro-étasuniens, ainsi que des dirigeants indépendants. Cependant, ces pays sont (militairement) entièrement contrôlés par les États-Unis.

Historiquement, ces deux nations ont été subordonnées aux États-Unis par le biais de la conquête militaire. Après la Seconde Guerre mondiale, lorsque les États-Unis ont occupé militairement la péninsule coréenne et, plus tard, à la fin de la guerre de Corée, la République de Corée a conservé une importante présence militaire américaine. Sa reconstruction économique a été presque entièrement financée et dirigée par les États-Unis. Après la guerre hispano-américaine, les Philippines ont été une colonie étasunienne pendant près de cinq décennies (1898-1946).

Cette vassalité est évidente aujourd’hui : après les élections de Yoon Suk-yeol en République de Corée et de Ferdinand Marcos Jr. aux Philippines en 2022, ces deux pays ont été en première ligne pour contenir la Chine. En février 2023, les Philippines ont invité les États-Unis à étendre leur présence militaire dans le pays en ajoutant quatre bases supplémentaires aux cinq bases existantes exploitées par les États-Unis : 30 ans après que les législateurs philippins ont décidé de mettre définitivement fin à la présence militaire étasunienne dans le pays. La République de Corée a également renforcé l’expansion militaire des États-Unis, en participant aux côtés du Japon « à l’inauguration d’une nouvelle ère de partenariat trilatéral » avec les États-Unis.108 En outre, l’accord sur la sécurité générale des informations militaires entre le Japon et la République de Corée, facilité par leur alignement plus étroit sur les États-Unis, élargit le partage de renseignements entre les deux pays pour inclure les « menaces issues de la Chine et de la Russie ».109 Leurs dépenses militaires doivent être attribuées au bloc militaire dirigé par les États-Unis.

Figure 31

Pays du Sud dont les dépenses militaires par habitant dépassent la moyenne mondiale (sauf Russie)

2022

Nom du pays (GSI) Dépenses militairesdollars US(millions) Pourcentage du PIB (CER) Par habitant>moyenne mondiale(fois)
Arabie saoudite 75 013 6,8% 5,7
Rép. du Corée 46 365 2,8% 2,5
Qatar 15 412 6,5% 15,9
Singapour 11 688 2,5% 5,4
Koweït 8 244 4,7% 5,4
Oman 5 783 5,0% 3,5
Liban 4 739 21,8% 2,4
Bahreïn 1 381 3,1% 2,6
Uruguay 1 376 1,9% 1,1
Brunei 436 2,6% 2,7
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données des FMI, des Nations Unies, du SIPRI et de Monthly Review

La figure 31 énumère tous les pays du Sud dont les dépenses militaires dépassent la moyenne mondiale (à l’exception de la Russie, qui a été montrée plus haut). Nombre de ces pays entretiennent des relations militaires étroites avec les États-Unis, mais ne figurent pas dans le groupe 6.

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PARTIE IV :  l’Occident en déclin

L’érosion de l’hégémonie économique et politique des États-Unis

Le ralentissement de la croissance économique des États-Unis, mesuré par la décélération du taux de croissance du PIB, la chute de l’investissement net en pourcentage du PIB, l’augmentation des capacités de production inutilisées, le chômage et le sous-emploi, a commencé au milieu des années 60 et s’est accéléré entre le début et le milieu des années 70.110 Le fait que les États-Unis soient devenus un importateur net de capitaux a exacerbé les contradictions du capital monopolistique.

L’évolution du compte de capital des États-Unis, qui est devenu dépendant de l’importation continue et à grande échelle de capitaux à partir des années 1980, est la clé d’un processus de création de richesse financiarisée et un mécanisme économique crucial de l’impérialisme étasunien. Les capitaux mondiaux sont majoritairement libellés en dollars  et alimentent la position globale du capital financier monopoliste des États-Unis.

En 2009, les États-Unis ont commencé à planifier leur transition vers l’Asie afin de freiner la croissance économique de la Chine. Sous la période Obama, le pays a commencé à s’opposer à l’Organisation mondiale du commerce. Cette période a également été marquée par un recours accru aux droits de douane, aux sanctions, au protectionnisme et à la guerre hybride.

Étant donné qu’ils dépendent désormais d’importations nettes de capitaux à grande échelle, qui ont atteint 1 000 milliards de dollars par an en 2022, les États-Unis ont peu de moyens économiques internes pour offrir des avantages économiques à leurs alliés du Nord ou du Sud global.111 En effet, ils doivent continuer à tenter de leur soutirer encore plus d’excédents.

Sous le néolibéralisme, l’autonomie relative de l’État étasunien s’est érodée et le capital privé a exercé un contrôle plus direct sur une grande partie de l’État. Aujourd’hui, cependant, face aux menaces économiques internationales croissantes qui pèsent sur la position étasunienne et à l’incapacité du néolibéralisme à maintenir la domination économique des États-Unis, les intérêts politiques collectifs de la classe dirigeante sont défendus par un État de plus en plus autonome (au lieu de représenter les intérêts de groupes capitalistes individuels). Pour reprendre les termes de Lénine, pour les capitalistes aussi, « la politique doit prendre le pas sur l’économie ».112

La financiarisation ou l’accumulation sous la phase du capital financier monopoliste est véritablement un développement parasitaire visant à tirer sur l’ambulance et à marquer la crise structurelle du capital. Le capital étasunien est confronté à une contradiction interne. Alors qu’il cherche à accroître l’extraction de surplus de sa propre classe ouvrière, il risque de perdre le soutien à ses guerres militaires extérieures, qui visent à éliminer les obstacles internationaux aux intérêts économiques capitalistes étasuniens. Sa classe dirigeante est donc contrainte de s’attaquer simultanément au Sud global et à sa propre classe ouvrière, ce qui a nécessité la montée de courants de plus en plus à droite dans le capitalisme étasunien. Dans les années 1930, les États-Unis disposaient de réserves suffisantes pour faire face à une crise profonde du capitalisme avec un programme intérieur réformiste, contrairement à l’attaque ouverte contre la classe ouvrière en Allemagne ou au Japon. Toutefois, il a fallu la Seconde Guerre mondiale pour que les États-Unis sortent de la dépression économique et non, comme on le prétend généralement, le New Deal keynésien. Aujourd’hui, dans cette nouvelle situation, les États-Unis n’ont d’autre choix que de combiner l’agression extérieure avec un programme intérieur de plus en plus répressif.

Les États-Unis utilisent l’inflation pour tenter d’augmenter leurs profits : une tendance exacerbée par les dépenses militaires et la dette qu’ils contractent. Les intérêts de la dette militaire étasunienne représentent environ 70 % des paiements d’intérêts nets du gouvernement fédéral des États-Unis. Dans les années 1970, ils ont été en mesure de gérer les conséquences de leurs grosses dépenses militaires pour le Viêt Nam en se retirant de l’étalon-or afin de reporter le coût de cette dette sur d’autres pays. Cette attaque réussie contre les rivaux impérialistes a renforcé la puissance économique et financière des États-Unis par rapport à eux.

Une perspective historique précise, ainsi que des changements à court terme, sont nécessaires pour analyser le déclin potentiel d’un empire. En Europe, le passage de l’esclavage au féodalisme a pris plusieurs siècles, tout comme le passage du féodalisme au capitalisme. La France luttait encore contre les vestiges du féodalisme au XIXe siècle, des centaines d’années après que le capitalisme européen eut commencé à petite échelle dans les cités-États italiennes.

Le déclin économique relatif d’un État impérialiste peut être retracé par son besoin croissant d’extraire des capitaux de l’étranger : le Royaume-Uni et les États-Unis ayant tous deux suivi une tendance historique similaire. Le Royaume-Uni a cessé d’être un exportateur de capitaux au début des années 1930 (figure 32).

La balance des paiements d’un pays est égale à la différence entre sa création de capital domestique (épargne/excédent) et son investissement en capital domestique. Si la création de capital « intérieur » d’un pays est supérieure à son investissement intérieur, le pays exporte des capitaux et enregistre un excédent de sa balance des paiements. Si la création intérieure de capital d’un pays est inférieure à son investissement en capital « intérieur », il accuse un déficit de la balance des paiements et importe des capitaux, c’est-à-dire qu’il a un excédent sur son compte de capital.

De 1913 au début des années 1980, à de rares exceptions près, les États-Unis ont généré plus d’excédents qu’ils n’ont investi « sur le plan intérieur ». Ils disposaient d’un excédent de capitaux qu’ils pouvaient investir dans d’autres pays et étendre leur hégémonie internationale, et pas seulement par la violence. Après la Seconde Guerre mondiale, les bénéficiaires particuliers de cette situation étaient les pays impérialistes que les États-Unis souhaitaient intégrer et dominer, comme l’a montré le plan Marshall en Europe. D’autres bénéficiaires, tels que la République de Corée, sont devenus des États frontaliers militaires pour contraindre la Russie et la Chine et ont ainsi reçu des investissements économiques étasuniens.

À la fin des années 1960, les États-Unis ont compris que la menace économique la plus urgente, par opposition à la menace politique, ne provenait pas du communisme. L’attention a commencé à se porter sur la réduction de la croissance d’autres rivaux capitalistes. Quelques économies capitalistes (d’abord l’Allemagne dans l’immédiat après-guerre, puis le Japon jusqu’à la fin des années 1970) ont atteint des taux d’investissement bien supérieurs à ceux des États-Unis, atteignant 30 % du PIB ou plus. Cela a permis à ces pays d’atteindre des taux de croissance du PIB supérieurs à ceux des États-Unis. Il s’agit là d’un résultat historique des immenses défaites subies par les classes ouvrières allemandes et japonaises face au fascisme, dont les conséquences se sont poursuivies dans la période d’après-guerre. Les capitalistes allemands et japonais ont pu augmenter les taux d’exploitation, ce qui a permis de financer des taux élevés d’investissement en capital. Simultanément, leur « industrialisation tardive » leur a également permis d’accéder à des technologies de meilleure qualité, ce qui a encore accru la productivité. Alors que les États-Unis étaient prêts à accepter les conséquences économiques de cette situation dans l’immédiat après-guerre, la poursuite de ce processus a commencé à avoir un impact sur la croissance économique étasunienne.

Afin d’empêcher une véritable concurrence économique de la part de ces pays, les États-Unis ont exercé des pressions politiques et militaires pour faire baisser leurs taux d’investissement et, par conséquent, leurs taux de croissance. Le découplage du dollar étasunien par rapport à l’or en 1971, et donc la suppression des restrictions à la militarisation du contrôle étasunien du système monétaire international, a joué un rôle clé dans ce processus.

Les chiffres de la figure 33, positifs ou négatifs, indiquent l’équilibre entre l’épargne nationale/la création de capital et l’investissement national sur une période de 120 ans. Un chiffre positif, par exemple 0,8 % pour 1929, signifie que les États-Unis épargnent/créent plus de capital qu’ils n’en investissent au niveau national, c’est-à-dire qu’ils prêtent/exportent du capital à l’étranger. Un chiffre négatif, par exemple -3,9 % du PNB pour 2022, signifie que l’investissement intérieur des États-Unis est supérieur à la création/épargne de capital intérieur. Il y a donc un afflux de capitaux de 3,9 % du PNB en provenance de l’étranger. Un chiffre positif représente une sortie de capitaux des États-Unis et un chiffre négatif indique une entrée de capitaux aux États-Unis.113

Mais malgré cette capacité à ralentir les rivaux impérialistes, les États-Unis se sont révélés incapables d’augmenter leur propre taux de croissance économique (pour atteindre un nouveau taux d’investissement et d’exploitation plus élevé), en partie à cause du retrait des capitalistes basés aux États-Unis des investissements productifs à long terme sur le territoire étasunien. En effet, la croissance économique s’est encore ralentie : la croissance économique annuelle moyenne des États-Unis n’est aujourd’hui que de 2,0 %, soit moins de la moitié de son taux de croissance dans les années 1960 et loin derrière le taux de croissance de la Chine ou même de plusieurs États asiatiques. La figure 34 montre que les États-Unis ont connu une baisse globale à long terme de leur taux de croissance moyen depuis 1953.

Face à cette situation, les États-Unis se sont tournés vers les droits de douane, les sanctions économiques et les interdictions technologiques, ce qui a conduit à un environnement de plus en plus protectionniste. Toutefois, malgré ce déclin économique, comme nous l’avons déjà analysé, les États-Unis conservent une avance militaire sur tous les autres États. L’impérialisme étasunien se tourne donc désormais vers un recours croissant à la force.

Pour retracer les processus sous-jacents et montrer l’incapacité des États-Unis à augmenter leur taux de croissance sans une restructuration complète de leur économie  (qui n’est pas à l’ordre du jour), la ligne 1 de la figure 35 montre qu’à partir de 1965, l’épargne nette/création de capital des États-Unis a progressivement diminué jusqu’à atteindre 2,7 % du RNB en 2009. La ligne 2 montre qu’à partir des années 1980, les emprunts étasuniens à l’étranger, c’est-à-dire l’utilisation de capitaux importés d’autres pays, ont commencé à augmenter fortement. En 2002, pour la première fois, les emprunts étasuniens à l’étranger étaient supérieurs à la création nette de capital au niveau national, c’est-à-dire que pour la première fois, même l’augmentation immédiate du stock de capital étasunien était financée davantage par des capitaux provenant d’autres pays que par les États-Unis eux-mêmes. Cette tendance s’est légèrement inversée, puis a fluctué jusqu’en 2020, où, une fois de plus, une plus grande partie de l’augmentation du stock de capital étasunien a été financée par d’autres pays.

Pour résumer ce processus global, les États-Unis ont structuré l’économie mondiale à leur avantage. Ses entreprises obtiennent des quantités gargantuesques de plus-value grâce à l’arbitrage mondial dans les pays du Sud et l’ensemble du système impérial impose des dollars étasuniens aux pays étrangers : notamment via les processus économiques mais également via les bases militaires étasuniennes et d’autres moyens. L’objectif consiste à créer un système dans lequel les pays n’auront d’autre choix que de placer leurs dollars dans des titres étasuniens, finançant ainsi le déficit étasunien et les investissements intérieurs. C’est ainsi que fonctionne le capital financier monopolistique mondial, qui est une forme avancée d’impérialisme financier soutenu par le pouvoir militaire et politique.

Ce qui bouleverse ce système, c’est que le capital monopolistique est relativement stagnant en termes de production (l’économie réelle), ce qui a permis à la Chine et à d’autres pays du Sud de faire un bond en avant en matière de production. Le super-impérialisme d’Hudson fournit un aperçu utile des conséquences si les États-Unis perdaient leur hégémonie du dollar.114

La figure 36 montre que la Chine a dépassé les États-Unis en termes de formation nette de capital fixe, tandis que les États-Unis ont connu un déclin progressif. Bien que cette section ne couvre pas la montée en puissance de la Chine, il convient de noter ici que chaque année depuis 1992, pendant 30 ans, la Chine est un exportateur net de capitaux. C’est cet excédent de capital qui rend économiquement possible le financement d’initiatives internationales telles que la Belt and Road Initiative (BRI).

Cela devient un facteur essentiel pour comprendre le développement de deux noyaux de processus internationaux :

  • Les États-Unis constituent de plus en plus un obstacle au développement des forces productives au niveau national et mondial.
  • La Chine se concentre désormais sur le développement de ses forces productives nationales et sur la collaboration avec l’ensemble des pays en développement. Cela ouvre une nouvelle voie vers la modernisation à travers le développement des forces productives mondiales prises dans leur ensemble (à travers la BRI, la Global Development Initiative et divers projets d’industrialisation à l’échelle continentale).

La fin de la démocratie libérale bourgeoise

Certains, en dehors des États-Unis, ont longtemps entretenu l’illusion que la démocratie aux États-Unis existait depuis des siècles et qu’elle n’avait été que récemment écornée. En 1776, les deux ailes du capital étasunien, celles dirigées par Alexander Hamilton et celles dirigées par Thomas Jefferson (un propriétaire d’esclaves), garantissaient que seuls les hommes blancs propriétaires comme eux avaient le droit de vote. Depuis 1776, le droit de propriété est sacro-saint et subordonne tous les autres droits.

La «liberté d’expression» était en réalité limitée à ceux qui possédaient les moyens de production matérielle. Comme l’écrivaient Karl Marx et Friedrich Engels dans L’Idéologie allemande (1846), ce sont généralement ces personnes qui possédaient les moyens de production mentale, c’est-à-dire les médias, à commencer par l’imprimerie. Dans certains cas, ce droit s’étendait à ceux dont on savait qu’ils bénéficiaient d’un soutien marginal ou inexistant, ou à d’autres qui ne représentaient aucune menace pour le système. Ceux qui s’opposaient aux intérêts de la classe capitaliste et qui avaient la chance d’obtenir un soutien important ont été soumis à la répression, à l’emprisonnement et aux sanctions, ainsi qu’au meurtre ou à l’assassinat judiciaire. La démocratie bourgeoise a toujours été un moyen de protéger les droits de propriété. Seule la pression exercée par les États-Unis pour se défendre contre les projets socialistes internationaux au XXe siècle a temporairement étendu le droit de vote aux Noirs et accru en apparence la liberté d’expression et d’autres libertés civiles.

Il existe un grand malentendu au niveau international à propos des partis électoraux étasuniens. Depuis leur création, ni les partis démocrates ni les partis républicains n’ont été constitués en tant que partis de masse. Il s’agit principalement d’associations descendantes d’élites possédantes et d’alliés de la classe professionnelle, étroitement alignées sur le statu quo. Les tiers partis n’ont pratiquement aucune influence dans ce système, véritable duopole de partis politiques. Le Comité national démocrate et le Comité national républicain qui dirigent leurs partis respectifs sont formellement organisés en sociétés à but non lucratif et exonérées d’impôt. Il s’agit avant tout de machines à collecter des voix, basées sur l’argent, qui attirent périodiquement les électeurs dans le cadre de compétitions électorales et dont le fonctionnement diffère de celui des partis politiques d’adhésion, comme c’est le cas pour de nombreux partis européens. Bien qu’il y ait des démocrates et des républicains inscrits, cela affecte principalement le droit de vote lors de leurs primaires respectives. L’affiliation à un parti pour la grande majorité de la population ne va donc pas au-delà des votes exprimés lors d’élections particulières. Ainsi, environ la moitié des électeurs étasuniens se considèrent comme politiquement indépendants et non attachés à aucun des principaux partis. En effet, aucun des deux partis politiques, lorsqu’il est au pouvoir, ne reflète les intérêts de la majorité de la population.

L’un des mots écrits les plus poignants sur l’hypocrisie de la grandeur autoproclamée de l’Amérique se trouve dans un poème de Langston Hughes (traduction non officielle) :

Que l’Amérique redevienne l’Amérique.
Qu’elle soit le rêve qu’elle était.
Qu’elle soit pionnière dans les plaines
Cherchant un foyer où elle-même est libre.

(L’Amérique n’a jamais été l’Amérique pour moi.)

Que l’Amérique soit le rêve dont rêvaient les rêveurs—
Qu’elle soit cette grande et forte terre d’amour
Où jamais les rois comme les tyrans
Ne complotent pour qu’un homme soit écrasé par celui d’en haut.

(Pour moi, cela n’a jamais été l’Amérique.)

Oh, que ma terre soit une terre où la liberté
Est auréolée sans fausse couronne patriotique,
Mais où les opportunités sont réelles et la vie est libre,
L’égalité est dans l’air que nous respirons.

(Il n’y a jamais eu d’égalité pour moi,
ni de liberté dans cette « patrie des libres ».)

Qui a dit libre ? Pas moi ?
Sûrement pas moi ? Les millions de personnes pauvres aujourd’hui ?
Les millions abattus lors de nos conflits ?
Les millions qui dépendent de notre bon vouloir ?
Pour tous les rêves que nous avons rêvés
Et toutes les chansons que nous avons chantées
Et tous les espoirs que nous avons chéris
Et tous les drapeaux que nous avons hissés,
Les millions qui dépendent de notre bon vouloir —
D’un rêve presque désormais éteint.115

Des pans entiers de la classe capitaliste des pays du Nord et de ses affidés se sont laissés aller à une période d’euphorie provoquée par la disparition de l’Union soviétique en 1991. Ils se sont trompés en croyant à la « fin de l’histoire » et en aspirant à un monde unipolaire perpétuel. La campagne de guerre contre le terrorisme adoptée par les États-Unis était une méthodologie brillamment élaborée pour obtenir un soutien au militarisme.

Entre 2006 et 2009, de nouvelles réalités ont commencé à s’installer :

  • La disparition de l’Union soviétique n’a pas abouti à la promesse d’Eltsine d’une Russie dénucléarisée ni à l’établissement permanent d’un gouvernement russe suivant entièrement les instructions étasuniennes. Les interrogations habituelles du type : « Qui a échoué en Russie ? ont suivi.
  • Les cercles stratégiques étasuniens ont commencé à avancer l’idée (à la fois amorale et non scientifique) que les États-Unis pourraient atteindre une capacité de guerre nucléaire de première frappe.
  • Face à l’expansion continue de l’OTAN vers l’est et aux affirmations des États-Unis selon lesquelles ils sont sur le point d’acquérir la primauté nucléaire, Vladimir Poutine a prononcé son discours de Munich en février 2007, marquant la fin de toute illusion quant à l’entrée de la Russie dans le club anglo-américain. Dans ce discours, Poutine a critiqué « l’hyper-usage presque incontrôlé de la force (la force militaire) dans les relations internationales » et a suggéré que le monde ne doit pas être gouverné par « un maître, un souverain ».116
  • La création du Centre for New American Security en 2007 a marqué le mariage historique de deux groupes d’élites en matière de politique étrangère, les néoconservateurs, principalement républicains, et les faucons libéraux, largement démocrates. Leur stratégie commune consistait à cibler immédiatement la Russie via l’Ukraine.
  • Dirigé par des néofascistes populistes, le Tea Party a vu le jour en 2009. Il a séduit la petite bourgeoisie et une partie des couches supérieures (principalement, mais pas exclusivement blanches) de la classe ouvrière qui n’avaient fait que peu ou pas de progrès économiques et craignaient une perte de privilèges. Cela marquait la fin du soi-disant consensus bipartisan qui dominait le système étasunien depuis des décennies.
  • La bulle provoquée par la financiarisation s’est transformée en troisième Grande Dépression à partir de 2008, la crise économique la plus importante depuis les années 1930.
  • Il devenait de plus en plus évident qu’il n’y aurait pas de Gorbatchev en Chine pour diriger la capitulation de la révolution chinoise.
  • La « Transition vers l’Asie », qui est plus précisément la transition vers la Chine, et une stratégie de contrôle de l’Eurasie par les États-Unis, ont été conçues.

L’économie chinoise a continué à croître rapidement après le début de la Troisième Grande Dépression, alors que les économies occidentales étaient anémiques.117 En 2016, la Chine a dépassé les États-Unis en termes de PIB (PPA), et la crainte était palpable que d’ici 2030, la Chine dépasse les États-Unis en termes de PIB aux taux de change actuels (TCE). La classe dirigeante étasunienne avait besoin d’une réponse.

Le néofascisme et les forces d’extrême droite se sont développés à l’échelle mondiale. Obama, le président démocrate, a adopté des mesures intérieures régressives qui auraient fait l’envie des administrations républicaines précédentes. L’élection de Trump a affaibli l’identité commune des intérêts de la bourgeoisie et a fait prendre conscience des limites du système politique des États-Unis.

Au niveau international, cette situation a également marqué une reprise de la conscience mondiale de l’impérialisme comme du plus grand danger auquel l’humanité est confrontée. Face à l’échec évident du néolibéralisme, qui avait culminé avec la Troisième Grande Dépression, un nouveau mouvement visant à inverser certains aspects de l’affaiblissement de l’État produit par le néolibéralisme a commencé.

Pour bien comprendre les événements qui ont suivi le début de la troisième grande dépression, il faut évaluer les 60 années qui l’ont précédée. En 1964, le républicain Barry Goldwater, capitaliste d’extrême droite, a perdu les élections générales mais est parvenu à introduire l’extrême droite dans le courant dominant du Parti républicain et du pays. Les démocrates ont perdu les élections de 1968 face à Richard Nixon, un centriste républicain, qui s’est emparé du vote blanc du Sud et a introduit un nouveau système institutionnel d’incarcération fondé sur le racisme, que les deux partis ont suivi depuis lors. Le parti démocrate a entamé une période de fractures internes et a commencé à abandonner tout positionnement à gauche au nom de l’« électabilité » et de la « triangulation ». Au lieu de cela, il a tenté de tirer profit de l’élan vers la droite des Républicains.

L’élection de Ronald Reagan en 1980 a marqué la véritable prise de contrôle du Parti républicain par l’extrême droite. La formation en 1985 du Democratic Leadership Council (DLC), une société privée, a marqué le début d’une nouvelle phase du Parti démocrate : la montée des néo-démocrates. Parmi les anciens présidents du DLC, on trouve Dick Gephardt, Chuck Robb, Sam Nunn et Joe Lieberman, tous partisans d’une réorientation des dépenses sociales vers l’armée. Le DLC a réussi à vaincre la gauche, et sa victoire la plus éclatante a été l’obtention de la présidence par le candidat qu’il avait choisi, Bill Clinton, en 1992.

La vertu de Clinton, du point de vue du DLC, était qu’il pouvait ramener le Sud blanc au sein du parti démocrate en parlant à gauche et en marchant à droite. Par exemple, il a adopté des politiques anti-protection sociale et pro-incarcération (deux positions de code racial) tout en prétendant à un programme progressiste. Moins anti-ouvrier que Reagan, il représentait néanmoins la stratégie démocrate consistant à essayer de rester au « centre » dans une dynamique politique qui s’était fortement déplacée vers la droite, les démocrates représentant une version plus légère et plus douce du néolibéralisme.

En effet, il est intéressant de considérer les partis démocrate et républicain comme des sociétés privées dont les revenus proviennent principalement de divers capitalistes et qui servent les intérêts des actionnaires et des dirigeants de la société. Pour le Parti démocrate, cela inclut des groupes comme le Comité national démocrate (DNC) et le Center for American Progress (CAP).118 Le produit vendu est un élu qui met en œuvre les intérêts de ses bailleurs de fonds. Parmi les responsables bien connus figurent John Podesta et Debbie Wasserman Schultz.

Tony Blair et Hillary Clinton, une fois élus, sont devenus des parasites de l’État, ont gagné des dizaines de millions et ont rejoint les échelons supérieurs de la classe capitaliste. Au moins 85 des 154 personnes appartenant à des groupes d’intérêt privés qui ont rencontré ou eu des conversations téléphoniques programmées avec Hillary Clinton, alors qu’elle dirigeait le Département d’État sous le président Obama, ont fait un don total de 156 millions de dollars à la Fondation Clinton.119

Le modèle d’entreprise du DNC exige la réunion d’un ensemble disparate de blocs électoraux et la nécessité de manipuler de nombreuses couches sociales, groupes et mouvements. Il existe aujourd’hui plus que jamais un fossé entre les intérêts des personnes qui votent pour le parti démocrate et les intérêts très différents de ceux qui sont à la solde du parti démocrate.

Une évaluation plus complète dépasse la portée de ce document. Cependant, l’idée d’une démocratie entrepreneuriale, dans laquelle les concepts de concurrence entre capitalistes individuels et groupes et de lutte pour acquérir des voix comme un marché, remonte à Joseph Schumpeter.120

Au cours des vingt dernières années, le Parti républicain a connu une transformation idéologique. L’émergence du Tea Party en 2009 a marqué à la fois une idéologie néofasciste croissante et la création d’un noyau et d’une base plus engagés. Bien que le parti républicain connaisse également des fractures internes, la militarisation de larges pans de la classe moyenne inférieure a engendré une droite radicale qui déstabilise la démocratie libérale bourgeoise.

Toutes les contradictions antérieures liées à la race, à la classe, au sexe et à l’identité sociale ont été instrumentalisées par l’extrême droite et la corporation du DNC à des fins différentes. Le fossé social entre les différentes couches de la population étasunienne est profond. Les affirmations hyperboliques selon lesquelles les États-Unis se dirigent vers une guerre civile sont toutefois très trompeuses. Il n’y a aucune raison économique pour que la Californie fasse sécession des États-Unis. Nous ne sommes pas dans la période qui a précédé la guerre civile aux États-Unis.

À partir de 1970, la classe ouvrière étasunienne n’a reçu qu’une infime partie des énormes augmentations de richesse créées par la domination mondiale des États-Unis. Des millions d’enfants souffrent d’insécurité alimentaire et leurs parents ont un emploi et une vie précaires. Les États-Unis connaissent des changements démographiques importants, certaines estimations montrant que les Blancs non hispaniques deviendront une minorité aux États-Unis d’ici 2045, ce qui laisse présager une trajectoire du capitalisme racial étasunien vers une ségrégation accrue, voire vers l’apartheid.

Le narcissisme, le pessimisme, le nihilisme et le fatalisme sont désormais des caractéristiques fondamentales d’un capitalisme de plus en plus stagnant dans le Nord global. Les attributs traditionnels de la démocratie libérale bourgeoise deviennent des entraves aux besoins du capital, qui, ironiquement, est empêtré dans un processus d’auto-négation.

Ces fissures au sein du système politique étasunien sont importantes pour la classe ouvrière, qui connaît un développement très inégal de sa capacité révolutionnaire. Elle est confrontée à de grands dangers et à de grandes opportunités. Il n’y a pas d’illusion à avoir sur le fait que « le pire est le meilleur ».
Parallèlement à cette érosion de la démocratie libérale, des millions de jeunes, de Jakarta à Istanbul en passant par Johannesburg et Des Moines, dans l’Iowa, ont été amenés à participer à la vie politique sur la base de leur indignation morale, raciale, religieuse et politique. Washington, dans son rôle géopolitique, économique et militaire hégémonique à l’échelle mondiale, a réagi par une répression sévère. Les États-Unis sont une puissance hégémonique en déclin ; ils sont blessés et, par conséquent, plus dangereux.

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Une Europe et un Japon vaincus et soumis

Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis se sont engagés à intégrer militairement, politiquement et économiquement les pays d’Europe et le Japon dans un bloc sous leur contrôle. Grâce à la structure OTAN+, les États-Unis ont assuré une domination militaire totale au sein du groupe impérialiste, en déployant de nombreuses bases militaires dans les pays vaincus pendant la Seconde Guerre mondiale, notamment au Japon (120), en Allemagne (119) et en Italie (45). Cette dernière abrite plus de 12 000 militaires étasuniens.121

À partir des années 1950, les États-Unis ont placé les élites politiques européennes dans leur orbite. Grâce au plan Marshall, les intérêts économiques européens ont été subordonnés à ceux des États-Unis. Au cours des cinquante années suivantes, même les dirigeants impérialistes qui ont osé s’opposer partiellement aux intérêts étasuniens, comme Jacques Chirac (président français entre 1995 et 2007) ou Gerhard Schroeder (chancelier allemand entre 1998 et 2005), qui se sont tous deux opposés à l’invasion étasunienne de l’Irak, ont été pris pour cible par les États-Unis en vue de leur remplacement.

Après la Seconde Guerre mondiale, le Japon, en tant qu’État de la ligne de front contre le communisme soviétique et chinois, a été autorisé à développer rapidement son économie. Cependant, dans les années 1980, l’essor économique du Japon a commencé à constituer une menace potentielle pour l’hégémonie économique mondiale des États-Unis, entraînant une augmentation des frictions commerciales bilatérales. Les États-Unis ont imposé une appréciation rapide du yen japonais par le biais de l’« accord du Plaza » de 1985, réduisant les exportations et entraînant une perte de vitesse de l’économie japonaise.122 Puis, à la suite du krach de Wall Street en 1987, les États-Unis ont contraint le Japon à adopter des politiques monétaires et économiques ultra-souples. L’objectif était d’accroître les flux de capitaux vers les États-Unis afin de les aider à financer leur agression internationale contre l’URSS. Ce faisant, ils ont créé une « économie de bulles » au Japon, dont l’éclatement a plongé le pays dans une stagnation économique de plusieurs décennies.

Dans les domaines des technologies de l’information et des nouvelles énergies, parmi d’autres domaines de haute technologie, le Japon a également été confronté à la répression des États-Unis, ce qui a entravé sa modernisation industrielle. Toshiba était le leader mondial de la fabrication de semi-conducteurs en 1987 jusqu’à ce qu’il soit sanctionné par les États-Unis sous le prétexte de conclure des accords avec l’URSS (ce qui est très similaire à ce que les États-Unis ont fait avec Huawei en Chine). Les principaux concurrents de Toshiba, IBM et Intel, ont bénéficié de cette politique étatique.

Après la chute de l’Union soviétique et la réunification de l’Allemagne qui s’en est suivie, la bourgeoisie allemande a convoité les marchés et l’énergie à bas prix de la Russie. Elle souhaitait des liens économiques avec la Russie, mais seulement tant que ses membres et leurs compatriotes français pourraient maintenir leur domination sans entrave sur le projet européen, qu’ils détenaient depuis la Seconde Guerre mondiale. Il s’agissait de nouer des liens économiques avec la Russie, mais d’exclure les dirigeants politiques russes de toute participation égale aux affaires, décisions ou structures politiques de l’Europe. La stratégie étasunienne a consisté à éviter toute relation stratégique entre la Russie et l’Allemagne, car leur force combinée aurait créé un concurrent économique redoutable en Europe.

La propriété du capital et des moyens de production est toujours fondamentale. Au cours des 30 dernières années, la capacité des capitaux à se déplacer rapidement et sans heurts entre les frontières des pays impérialistes s’est accrue de manière exponentielle. Les investissements en capital se répartissent en un certain nombre de catégories primaires, dont les actions, les billets, les obligations, le capital-investissement, l’immobilier et de nombreuses formes de produits dérivés. Le marché boursier est l’un des instruments fondamentaux permettant à la plupart des capitalistes d’effectuer des investissements à long terme. Une entreprise allemande qui s’introduit en bourse peut le faire soit sur la place boursière étasunienne, soit sur la place boursière allemande. De grands fonds comme Vanguard achètent ces fonds, mais ils n’en sont pas les propriétaires réels. Ils ne sont que des fiduciaires efficaces des fonds du grand capital (un petit pourcentage de ce capital est détenu par la petite bourgeoisie et des secteurs privilégiés de la classe ouvrière par le biais de fonds de pension et d’autres instruments).

Les actionnaires initiaux de cette entreprise peuvent vendre leurs actions désormais publiques et le font. Ils ne sont plus dépendants de la gestion de leur patrimoine par le biais de leurs investissements dans une seule entreprise. Ils font plutôt appel à des gestionnaires de patrimoine, soit par l’intermédiaire de sociétés telles que Goldman Sachs, soit par leurs propres conseillers, qui investissent à leur tour les liquidités provenant de la vente d’actions. Pour de nombreux capitalistes, leurs conseillers leur demanderont d’investir bien plus de 50 % de leur portefeuille sur les marchés boursiers étasuniens. La « richesse familiale » du capitaliste allemand ne disparaît donc pas lorsque la valeur de l’entreprise allemande qu’il possédait à l’origine diminue.

Les conséquences économiques, politiques et sociales de cette évolution des marchés de capitaux et de la propriété sont considérables. Ce nouveau capitaliste mondial (anciennement « allemand ») se comporte de la même manière que ses homologues français, anglais, suédois ou étasuniens. Ce niveau d’intégration et de dénationalisation des capitaux se traduit par une économie beaucoup plus robuste et, en fin de compte, renforce l’allégeance politique aux États-Unis.

Un tel niveau d’intégration des marchés boursiers et des capitaux est rarement atteint dans les pays du Sud pour de nombreuses raisons historiques. Un capitaliste turc a beaucoup plus de mal à faire entrer son entreprise en bourse aux États-Unis. Ce que le capitaliste turc peut faire, c’est s’introduire en bourse en Turquie, vendre ses actions, convertir le produit de la vente en dollars , puis investir ces dollars dans des actions étasuniennes. C’est la voie la plus courante empruntée par les capitalistes turcs pour rejoindre l’élite mondiale. Ce processus est toutefois beaucoup plus compétitif, se produit en plus petites quantités, est moins fréquent et est plus long.

La figure 37 présente une étude de l’OCDE qui indique le pourcentage de propriété étrangère effective pour chacun des principaux marchés boursiers du monde.123 Ceux-ci montrent que l’Europe a globalement un pourcentage élevé de participations étrangères, alors que les États-Unis, la Chine et l’Arabie saoudite détiennent tous moins de 20 % de participations étrangères. Les différents impérialismes nationaux et leurs classes dirigeantes ne sont pas distincts ou économiquement divisés les uns des autres. Ils ne poursuivent pas d’objectifs stratégiques nationaux substantiellement divergents à une échelle comparable à celle d’avant la Seconde Guerre mondiale. Les forces progressistes et socialistes, cependant, utilisent toujours les différences partielles, économiques ou tactiques entre les puissances impérialistes lorsqu’elles sont utiles.

La situation de l’Allemagne aujourd’hui, par exemple, illustre clairement l’efficacité de ce processus d’intégration et de consolidation économique par les États-Unis, comme le montre la figure 38. Selon les données de 2020 d’IHS Markit, seuls 13,3 % de la valeur du marché boursier allemand sont détenus par des Allemands, tandis que les investisseurs d’Amérique du Nord et du Royaume-Uni en détiennent 58,3 %.124 Une étude réalisée en 2023 par Ernst & Young a révélé qu’au moins 52,1 % de la valeur de marché des 40 actions de premier ordre qui composent l’indice allemand DAX est détenue par des fonds situés hors d’Allemagne en 2022. Sur les actions restantes, 16,5 % de la propriété est non identifiée (très probablement également détenue par des capitaux étrangers), avec seulement 31,3 % de la valeur marchande détenue par des Allemands.125 Les principales entreprises de l’économie allemande n’appartiennent généralement pas à des Allemands.

La valeur ajoutée industrielle allemande est passée de 9 % de la valeur mondiale à un peu plus de 6 % au cours des 18 dernières années.126 La perte de l’énergie russe bon marché et l’adaptation de la Russie à un découplage géré par le risque pourraient être désastreuses pour sa compétitivité internationale. De plus, l’avènement des véhicules électriques (VE) a entraîné une perte énorme avec la fin de l’importance du moteur à combustion. Il s’agit d’une supériorité technologique de base dont jouit l’Allemagne depuis cent ans.

En 2022, les IDE en Allemagne ont diminué de 50,4 % sur un an.127 Sur une période de 15 trimestres, à partir du troisième trimestre 2019, le PIB de l’Allemagne a augmenté de seulement 0,6 % au total, en prix constants, alors que celui de la Chine a augmenté de 20,2 % au cours de la même période, et les États-Unis de 8,1 %.128

Dans le domaine des médias, les États-Unis dominent davantage que les pays du Sud. Le marché européen de la télévision est en grande partie une affaire étasunienne : «Environ une chaîne de télévision privée sur cinq (18 %) (à l’exclusion de la télévision locale) appartient aux États-Unis, et plus d’un tiers de tous les services de SVOD (39 %) et de TVOD (33 %) en Europe appartiennent à une société étasunienne … Environ la moitié de toutes les chaînes de télévision pour enfants en Europe appartiennent aux États-Unis (48 %), tout comme 59 % des services de vidéo à la demande par abonnement ».129

L’effondrement de la volonté nationale», la volonté de poursuivre une voie correspondant à ses intérêts capitalistes nationaux, démontré par l’Allemagne dans le contexte de la guerre en Ukraine, montre que l’Allemagne a été vaincue pour la troisième fois depuis le début du vingtième siècle (les deux premières étant les guerres mondiales, comme l’a noté Hudson).130 Malgré le coût que cela représente pour elle, l’Allemagne a soutenu les sanctions contre la Russie et l’aide militaire à l’Ukraine. Lorsque la guerre d’Israël contre Gaza est entrée dans son centième jour, après avoir tué plus de 23 000 Palestiniens, l’Allemagne, avec sa violence historique en Namibie et son holocauste national contre le peuple juif pendant la Seconde Guerre mondiale, a soutenu Israël lors de l’audience à la Cour internationale de justice intentée par l’Afrique du Sud.131

Au cours des derniers mois de l’année 2023, les représentants politiques du capital allemand au Bundestag ont évoqué en privé puis introduit des mesures visant à restreindre le commerce avec la Chine sous le couvert de la réduction des risques. Cela va clairement à l’encontre des intérêts à court et à moyen terme des entreprises allemandes. Marx a décrit les relations entre les capitalistes comme celles d’une bande de frères ennemis.132 En période de crise, l’État, en tant qu’organe de la classe dirigeante, exerce son rôle politique en dépit de la nature conflictuelle des relations intracapitalistes. Aujourd’hui, les intérêts à court terme des dirigeants d’entreprises prétendument allemandes sont subordonnés aux intérêts de l’hyper-impérialisme.

Avec la formation de l’Empire allemand (1871-1918), l’expansion politique et économique en Europe de l’Est, plutôt que la seule expansion territoriale, était une stratégie clé. Après la réunification en 1990, l’Allemagne a poursuivi une double stratégie : premièrement, elle a soutenu de manière décisive la stratégie étasunienne d’expansion de l’OTAN envers la Russie. Deuxièmement, elle a mené une stratégie simultanée de « pénétration du capital » en Russie dans le but d’assurer le contrôle politique dans cet État des groupes les plus liés aux intérêts occidentaux et allemands et de s’opposer à ceux qui poursuivaient une politique plus indépendante. Les capitaux allemands ont soutenu des mandataires comme le milliardaire russe (à l’époque) Mikhaïl Khodorkovski. En 2001, Khodorkovsky a créé l’Open Russia Foundation, dont Henry Kissinger est l’un des administrateurs.133 En 2004, il est emprisonné pour fraude et détournement de fonds après avoir tenté de mener des politiques contre Poutine.

La chancelière allemande Angela Merkel a poursuivi une double stratégie consistant à soutenir les préparatifs militaires contre la Russie et à organiser l’opposition interne à Poutine. Elle a également orchestré la construction de Nord Stream 2 malgré la forte résistance des États-Unis. Toutefois, ce dernier projet était dans l’intérêt de l’Allemagne, non pour apaiser la Russie, ni pour entraver l’expansion de l’OTAN. En 2014, elle a organisé la libération de Khodorkovsky et a permis une violation calculée des accords de Minsk. Mais cette double stratégie a pris fin en février 2022, lorsque l’Allemagne, en tant que partenaire volontaire aux côtés des États-Unis et avec l’aide de l’Ukraine, a décidé de lutter contre la Russie et de la renverser.

La réalité de l’Allemagne, cependant, est qu’à moins qu’elle ne soit prête à rompre totalement avec la politique des États-Unis, ce qu’aucune partie importante de la bourgeoisie allemande n’est prête à envisager, toutes ses stratégies sont vouées à l’échec sans le soutien des États-Unis, ce qui donne à ces derniers la mainmise sur cette relation. Un paradoxe est apparu : les États-Unis voulaient maintenir l’inimitié germano-russe, mais ne soutenaient pas une victoire totale de l’Allemagne contre la Russie. Cela explique en partie pourquoi les États-Unis semblent menacer d’interrompre le financement de l’Ukraine. L’objectif étasunien de détruire les relations germano-russes a déjà été atteint, de même que la vassalité de l’Europe et de l’Allemagne sous peine de désindustrialisation de l’Allemagne.

Les États-Unis continueront à priver la bourgeoisie allemande de toutes les options majeures pour affirmer des positions politiques indépendantes. Avec l’aide des liens de propriété du capital que nous avons décrits, la bourgeoisie allemande sera confrontée à une subsomption absolue des options d’action du capital allemand sous l’égide des États-Unis. L’hostilité à l’égard de la Russie agit comme un moteur de la subordination de l’Europe aux États-Unis et comme une perte de toute possibilité de développement indépendant.

La situation de contradictions antagonistes entre le capital étasunien et le capital européen sur des questions fondamentales a cessé. De petites différences existent, mais elles ne sont pas stratégiques. La profondeur de la subordination de l’Europe par rapport aux États-Unis est illustrée par le fait que seuls 11 des 49 pays du Nord ne font pas partie d’un réseau d’espionnage étasunien connu et n’ont pas participé à la réunion de l’OTAN+ à Vilnius. Il s’agit d’Andorre, de la Bosnie-Herzégovine, de Chypre, de l’Irlande, du Liechtenstein, de Malte, de la Moldavie, de Monaco, de Saint-Marin, de la Serbie et de la Suisse. Collectivement, ces pays comptent 28,3 millions d’habitants (presque l’équivalent de la population de Delhi) et un PIB combiné de 1,8 billion de dollars étasuniens (1 % du PIB mondial), soit une petite partie du Nord global.

Alors qu’elle était membre du groupe secret des « Quatorze yeux », l’impuissance de l’Allemagne s’est manifestée au grand jour lorsqu’il a été révélé que les États-Unis espionnaient ses dirigeants, et elle a été incapable de faire quoi que ce soit. Aujourd’hui, la bourgeoisie européenne est devenue la complice des opérations de renseignement étasuniennes.

L’OTAN a longtemps fait pression sur l’Allemagne pour qu’elle consacre un minimum de 2 % de son PIB à l’armée, conformément à ce que l’on appelait le principe Boucles d’or (établi dans les années 1950), visant à :

… encourager les contributions à la défense des alliés de taille moyenne (par exemple, la [République de] Corée pendant la guerre froide, ou la Pologne aujourd’hui) tout en faisant preuve de flexibilité lorsqu’il s’agit d’alliés plus importants comme l’Allemagne ou le Japon. Ce faisant, l’organisation cherche à maximiser les contributions des alliés qui sont suffisamment puissants pour fournir une puissance militaire significative à l’alliance, mais pas au point de pouvoir se passer de l’alliance.134

Les gouvernements japonais ont poursuivi des politiques de provocation politique à l’égard de la Chine, à la demande des États-Unis, malgré les avantages considérables pour l’économie japonaise qui découleraient de liens plus étroits avec la Chine. Au Royaume-Uni, l’opposition des États-Unis à la «l’âge d’or» des relations avec la Chine, menée sous le gouvernement de David Cameron, a contraint ses successeurs à inverser la tendance, avec des conséquences néfastes pour les capitaux britanniques.

En 2022, le Premier ministre Fumio Kishida a fixé des objectifs de dépenses de 43 000 milliards de yens (316 milliards de dollars) pour les cinq années suivantes.135 Le Japon possède déjà le deuxième plus grand nombre d’avions avancés F35 au monde (après les États-Unis) et a signé un accord en 2020 pour l’achat de 105 avions supplémentaires. Ces appareils peuvent être équipés d’armes nucléaires. Le pays a rédigé une stratégie de sécurité nationale révisée pour se permettre de développer une capacité de frappe préventive et de déployer des missiles à longue portée.136

Le réarmement des deux principales puissances fascistes de la Seconde Guerre mondiale doit être considéré comme un crime. Un dangereux mouvement revanchard réapparaît en Allemagne. La différence est que cette fois-ci, le pays fait partie du bloc militaire dirigé par les États-Unis.

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PARTIE V : Évolutions de l’ordre mondial

Un déplacement de la base économique vers le sud global

Alors que les pays du Nord ont été confrontés à un déclin prolongé de leur croissance économique, les pays du Sud, en particulier en Asie, ont affiché une trajectoire de croissance économique plus élevée au cours des trente dernières années. Comme le montre la figure 39, à la fin de la guerre froide en 1993, le Nord représentait 57,2 % du PIB mondial (PPA), tandis que le Sud n’en représentait que 42,8 %. Trente ans plus tard, ces proportions se sont définitivement inversées : la part du Sud atteint 59,4 %, celle du Nord s’établissant à 40,6 %.

Le G7 (États-Unis, Royaume-Uni, Canada, France, Allemagne, Italie et Japon) est le noyau dur des pays économiques du bloc du Nord. En 1993, ces sept pays représentaient 45,4 % de l’économie mondiale. Dans le même temps, les économies les plus importantes du Sud, connues plus tard sous le nom de BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), ne représentaient que 16,7 % de l’économie mondiale cette année-là. Parmi ces nations, la Russie venait d’émerger après la dissolution de l’Union soviétique, et la Chine approfondissait ses réformes économiques et mettait en place une économie de marché socialiste. Ni la Russie ni la Chine n’étaient des concurrents du G7 à l’époque. Trente ans plus tard, les pays BRICS représentaient 31,5 % de l’économie mondiale, ayant dépassé le G7 (30,3 %), comme le montre la figure 40.

En août 2023, les BRICS se sont élargis en invitant six pays : l’Égypte, l’Éthiopie, les Émirats arabes unis, l’Arabie saoudite, l’Iran et l’Argentine (bien que l’Argentine ait temporairement refusé). Les BRICS10 (à l’exclusion de l’Argentine) ont ajouté 4 % à la part des BRICS dans le PIB mondial (PPA), comme le montre la figure 41.

Au cours des trente dernières années, le leader absolu du Nord global, les États-Unis, a vu sa part de l’économie mondiale diminuer lentement en termes de PPA, passant de 19,7 % en 1993 à 15,5 % en 2022. Toutefois, dans le Sud, l’essor rapide de la Chine a été la variable la plus notable. En 1993, la Chine ne représentait que 5 % de l’économie mondiale (Figure 42) ; en 2016, l’économie chinoise avait dépassé celle des États-Unis en termes de PPA ; et en 2022, la part de la Chine dans l’économie mondiale avait atteint 18,4 %. C’est la première fois en plus de 600 ans qu’un pays dominé par des non-Blancs brise économiquement l’hégémonie des pays impérialistes blancs. Cette réalité économique a conduit les États-Unis à tenter d’urgence d’étouffer la montée en puissance de la Chine.

Toutefois, il serait erroné de considérer la Chine comme la seule source de croissance pour le Sud. Même sans la Chine, les économies du Sud avaient dépassé celles du Nord en 2022, leurs parts respectives dans l’économie mondiale s’élevant à 41 % et 40,6 % (figure 43). Le développement économique global du Sud leur a permis objectivement de se doter de la capacité et de la volonté d’instaurer un ordre international plus juste, ce qui va à l’encontre des souhaits du bloc impérialiste du Nord.

Nous avons identifié les 43 pays, dont la part du PIB mondial (PPA) s’élève à 41,1 % (Figure 44), qui font partie d’une ou plusieurs des trois nouvelles organisations internationales contrôlées par les non-impérialistes : les BRICS10 (fondés en 2009, élargis en 2010 et 2023), l’Organisation de coopération de Shanghai (fondée sous le nom de « Shanghai Five » en 1996, élargie en 2001, 2017 et 2023) et le Groupe des amis pour la défense de la Charte des Nations Unies (fondé en 2021). La liste complète est fournie dans une section ultérieure.

La figure 45 montre le taux de croissance annuel moyen du PIB (PPA) par habitant des 21 plus grandes économies du Sud et des pays du G7 au cours de la dernière décennie. Le taux de croissance de la Chine (5,8 %) reste le plus élevé des grands pays. Le taux de croissance de l’Asie est généralement plus élevé que celui des autres pays du Sud. Les cinq pays suivants ayant les taux de croissance les plus élevés sont le Bangladesh (5,3 %), le Viêt Nam (4,9 %), l’Inde (4,6 %), les Philippines (3,3 %) et l’Indonésie (3,1 %). À l’exception des États-Unis, les autres pays du G7 ont un taux de croissance moyen par habitant inférieur à 1 %. Malheureusement, les plus grandes économies d’Afrique et d’Amérique latine ont connu une croissance par habitant négative : le Nigéria et l’Afrique du Sud à -0,4 %, et le Brésil et l’Argentine à 0 % et -0,7 %, respectivement.

Bien sûr, nous reconnaissons que les taux de croissance eux-mêmes peuvent masquer les luttes de classes intenses dans ces pays, où la part de la croissance n’est pas répartie de manière équitable entre le capital et le travail. Cependant, ce serait une erreur d’ignorer les taux de croissance et ce que leurs lignes de tendance décrivent.

L’un des changements les plus importants survenus dans l’économie mondiale au cours des 20 dernières années a été la modification radicale de la géographie de la production industrielle mondiale.

La Banque mondiale publie le pourcentage de l’industrie dans le PIB en utilisant les prix et les taux de change courants, ce que cette étude appelle la méthode des taux de change courants (TCC). À l’heure actuelle, nous n’avons pas connaissance de pourcentages industriels publiés pour les calculs du PIB (PPA).

Les figures 46 et 47 montrent l’évolution du pourcentage de la valeur ajoutée de l’industrie dans le PIB en termes de TCC et de PPA au cours des 18 dernières années. Il est probable que les chiffres de la part mondiale de la valeur ajoutée de l’industrie se situent quelque part entre la RCE et la PPA. Les graphiques suivants de cette série ne sont présentés que pour la méthode de la PPA et sont assortis des mêmes réserves que celles formulées pour la première série.137

Ce que nous voyons, c’est qu’il y a effectivement un changement dans la base de l’économie, avec le Sud abritant la part majoritaire. Malgré les nombreuses prédictions d’une nouvelle société post-industrielle, aucun grand pays n’est parvenu à se moderniser sans s’industrialiser.

La part mondiale de la valeur ajoutée de l’industrie des BRICS10 est désormais le double de celle du G7 (figure 48).

Les résultats sont les suivants pour la valeur ajoutée de l’industrie en pourcentage du PIB mondial (PPA) :

  • La Chine est le premier pays industriel du monde avec une part de 25,7 % de la valeur ajoutée, tandis que les États-Unis n’en détiennent que 9,7 %.
  • Le Sud global a une part de 69,4 %, tandis que le Nord a une part de 30,6 %.
  • Les BRICS10 ont une part de 44 % et dépassent le G7.
  • La part du Japon, de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni diminue également, tandis que celle de l’Inde augmente (figure 49).

Nous avons utilisé le pourcentage industriel de la Banque mondiale multiplié par le PIB annuel (PPA) de chaque pays pour chaque année afin d’obtenir une valeur ajoutée industrielle par pays. Nous avons ensuite utilisé ces chiffres pour calculer le pourcentage de la valeur ajoutée industrielle mondiale totale pour chaque pays et chaque catégorie de groupes de pays. Cette méthodologie présente des limites et des problèmes complexes.

Certains économistes ont tenté de minimiser ce changement. Certains affirment que les monopoles en dollars étasuniens et la propriété des grandes sociétés multinationales signifient que les chiffres du PIB surestiment le changement. On ne peut pas dire que la Chine, au minimum, a toute sa production sous le contrôle des États-Unis. Même en Inde, il serait erroné de sous-estimer l’importance d’une grande bourgeoisie nationale en expansion (bien que de larges pans de celle-ci soient politiquement réactionnaires). Le déplacement de la production industrielle vers les pays du Sud n’a pu se faire qu’au prix d’améliorations massives de leurs infrastructures.

Dans ses mots d’adieu au président russe Vladimir Poutine lors de sa visite d’État en mars 2023, le président chinois Xi Jinping a déclaré : « Il y a actuellement des changements d’ampleur, comme nous n’en avons pas vu depuis 100 ans, et c’est nous qui les menons ensemble ».138 L’Eurasie est désormais au centre de la scène pour déterminer l’avenir de la prochaine période de l’existence humaine.

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Stratégie étasunienne visant à réduire la croissance économique et l’influence de la Chine

En 2007, Vladimir Poutine a prononcé son célèbre discours de Munich, critiquant la domination monopolistique des États-Unis, « l’hyperutilisation presque incontrôlée de la force (la force militaire) dans les relations internationales, une force qui plonge le monde dans un abîme de conflits permanents ».139 La même année, le Centre pour la nouvelle sécurité américaine (CNAS) a été créé. En 2009, des communications secrètes étasuniennes à Washington révélées par Wikileaks indiquaient ce qui suit :

Xi sait à quel point la Chine est corrompue et il est dégoûté par la commercialisation tous azimuts de la société chinoise, avec son cortège de nouveaux riches, de corruption officielle, de perte de valeurs, de dignité et de respect de soi, et de « maux moraux » tels que la drogue et la prostitution… Lorsque Xi prendra la tête du parti, il pourrait tenter de s’attaquer agressivement à ces maux, peut-être aux dépens de la nouvelle classe bourgeoise.140

Cela a alerté les services de la CIA. Le rêve occidental d’un « Gorbatchev chinois » s’est évanoui en 2012. Il est devenu évident qu’une Chine en pleine ascension économique ne serait pas vaincue de sitôt. C’est ainsi que la stratégie du pivot vers l’Asie a commencé à intégrer ses alliés pour contenir la Chine. La secrétaire d’État de l’époque, Hillary Clinton, a déclaré publiquement que « le XXIe siècle sera le siècle du Pacifique pour l’Amérique ».141 En revanche, Xi Jinping a déclaré au président étasunien Barack Obama : « L’océan Pacifique est suffisamment vaste pour accueillir le développement de la Chine et des États-Unis ».142

En 2016, le PIB de la Chine, calculé en parité de pouvoir d’achat, a dépassé celui des États-Unis. En 2020, le Centre for Economics and Business Research a prédit qu’en 2028, le PIB de la Chine, mesuré en dollars étasuniens, dépasserait celui des États-Unis, une prévision qui est devenue une « barrière démoniaque ».143 Les responsables étasuniens ont défini à plusieurs reprises la Chine comme la menace stratégique la plus importante à laquelle les États-Unis et le Nord global sont confrontés.

Le déclin relatif de la puissance étasunienne, la montée en puissance de la Chine socialiste et la croissance économique du Sud sont les principales raisons de la subordination active des États-Unis et de l’intégration ultérieure du reste des pays impérialistes. Cela a conduit à un bloc militaire, politique et économique complet sous le contrôle des États-Unis. En 1998, l’ancien conseiller à la sécurité nationale des États-Unis, Zbigniew Brzezinski, a averti : « Le scénario le plus dangereux serait une grande coalition de la Chine, de la Russie et peut-être de l’Iran… non pas par amour soudain l’un pour l’autre, mais par une opposition partagée à l’égard de la puissance prédominante (les États-Unis) ».144

Le CNAS (Center for a New American Security), formé par une combinaison de néo-conservateurs et de faucons libéraux, a donné naissance à un noyau d’élites politiques étasuniennes (des deux partis) qui se sont concentrées sur le développement d’une nouvelle stratégie géopolitique pour les États-Unis. En 2021, ignorant l’avertissement de Brzezinski, ils ont commencé à promouvoir publiquement la préparation de guerres simultanées. Parmi les personnalités importantes du CNAS figurent le secrétaire d’État Antony Blinken, le secrétaire d’État adjoint Kurt Campbell et l’ancien sous-secrétaire à la défense pour la politique Michele Flournoy. D’anciens employés et consultants du CNAS ont infiltré les organes stratégiques de l’État, y compris le Conseil national de sécurité.

Le conseiller à la sécurité nationale Jake Sullivan, bien qu’il ne soit pas membre du CNAS, joue désormais un rôle dominant au sein de la présidence et poursuit la même stratégie internationale. En avril 2023, Sullivan a prononcé un discours intitulé « Renouveler le leadership économique étasunien » à l’Institut Brookings.145 Ce discours est important pour trois raisons distinctes. Premièrement, il est très inhabituel qu’un discours aussi important sur l’économie soit prononcé par un conseiller à la sécurité nationale. Historiquement, les conseillers à la sécurité nationale, comme Henry Kissinger, sont restés dans le domaine de la sécurité nationale, de la géopolitique et des affaires militaires. Deuxièmement, le discours de M. Sullivan visait à créer un « nouveau consensus de Washington » afin de rétablir l’hégémonie économique des États-Unis. Troisièmement, M. Sullivan a reconnu la profondeur de la crise structurelle , y compris sa stagnation économique.

Ce plan économique est nécessaire pour soutenir l’expansion militaire. En juillet 2023, les États-Unis ont proposé un projet de loi visant à ajouter 345 millions de dollars d’aide militaire à Taïwan.146 De Tel Aviv à Kiev, en passant par Taipei, les États-Unis intensifient leurs opérations militaires aux portes de l’Eurasie.

Les guerres froides, nécessairement associées à des conflits entre puissances nucléaires, sont toujours dangereuses. En 1988, Edward Herman et Noam Chomsky ont publié Manufacturing Consent :  The Political Economy of the Mass Media, dans lequel ils dénoncent le « modèle de propagande » utilisé par les grands médias étasuniens, souvent en partenariat avec l’État. Ils l’ont écrit bien avant que ce système ne puisse se prévaloir des nouveaux outils technologiques de surveillance et de communication ciblée caractérisant l’ère numérique. Grâce au lanceur d’alerte Edward Snowden, le monde a pu avoir un aperçu de la vaste expansion du contrôle étasunien sur toutes les communications et de la manière dont il a intégré toutes les plateformes technologiques monopolistiques étasuniennes en tant qu’auxiliaires de l’infrastructure de sécurité nationale des États-Unis.

Un ancien haut responsable des services de renseignement a décrit l’approche de l’ancien directeur de l’Agence nationale de sécurité, Keith Alexander, en matière de collecte de données en ces termes : « Collecter tout ». Tous les courriels, appels téléphoniques et SMS de tous types (y compris ceux de WhatsApp, Telegram et Signal), chaque frappe de touche et chaque URL sont capturés pour la grande majorité de la population mondiale (en dehors de la Chine, de la Russie et de quelques autres pays). Ils sont stockés dans de vastes réseaux de disques durs situés dans des endroits comme Bluffdale, dans l’Utah. Les États-Unis ont créé un réseau mondial capable de capturer et de gérer presque chaque paquet de données sur tous les câbles optiques sous-marins, tout le trafic cellulaire et le trafic de données par satellite.

Malgré l’hégémonie militaire, le capital a toujours besoin de l’approximation du consentement. Au fil du temps, de nouvelles techniques, telles que l’apprentissage automatique, ont créé un saut qualitatif dans la capacité des États-Unis à mener une guerre secrète psychologique contre les peuples, le Sud et leurs populations.147 Les modèles économiques de toutes les entreprises de médias se sont effondrés avec l’avènement d’Internet et la création de monopoles économiques technologiques, qui ont désintermédié tous les profits des médias. Une nouvelle ère de médias entièrement militarisés a commencé, un développement qui fait partie de la stratégie globale de guerre hybride (y compris les sanctions économiques et l’isolement diplomatique) qui a été utilisée par l’establishment étasunien dans le monde entier.

Le pivot vers l’Asie, en réalité un pivot vers la Chine, a commencé officiellement en 2012 sous Obama. Les États-Unis ont combiné des stratégies de propagande, diplomatiques, économiques et politiques pour tenter de freiner, dans un premier temps, le développement économique de la Chine et, plus tard, son influence croissante dans des institutions telles que les BRICS. À partir de 2016, Trump a tenté d’éviter tout conflit avec la Russie et a commencé à concentrer toute l’énergie des États-Unis contre la Chine.

Au cours des huit dernières années, les États-Unis ont eu recours à une coterie de sujets sélectionnés pour définir le récit des médias occidentaux sur la Chine. Malgré les millions de musulmans morts aux mains des forces de l’OTAN au Yémen, en Syrie, en Irak et en Afghanistan, l’Occident a réussi à intégrer son formidable éventail de ressources de soft power pour mener une guerre froide féroce contre la Chine. Même le principal propagandiste des nazis, Joseph Goebbels, aurait pu être étonné de l’orgueil de l’Occident qui revendique la défense des droits de l’homme et tente d’utiliser le Xinjiang comme bouc émissaire contre la Chine.

Lawrence Wilkerson, ancien chef de cabinet du secrétaire d’État Colin Powell et ancien colonel de l’armée, a noté qu’un objectif stratégique important de l’invasion de l’armée étasunienne et de son stationnement à long terme en Afghanistan était de contenir l’initiative chinoise « la Ceinture et la Route » (2013-présent) et de créer des divisions ethniques et des troubles sociaux au Xinjiang.148 Le New York Times, le Guardian et la BBC sont devenus les principaux acteurs d’une campagne d’intox caractéristique des États-Unis.

Comme nous l’avons expliqué dans l’analyse économique des économies occidentales, il n’est pas irrationnel pour l’Occident de chercher à retarder la croissance de la Chine. La prochaine étape du développement de l’économie chinoise consistera essentiellement à promouvoir une économie à double circulation, c’est-à-dire à accroître le poids du marché intérieur tout en continuant à développer son commerce international, à passer à un développement de haute qualité et à faire progresser le développement économique des provinces occidentales de la Chine. Attaquer le Xinjiang répond simultanément à de nombreux intérêts occidentaux : affaiblir les stratégies de croissance intérieure de la Chine, isoler la Chine sur le plan international, masquer la violence étasunienne contre les pays musulmans et continuer de soutenir des groupes extrémistes pour déstabiliser leurs adversaires.

De fausses allégations de génocide parmi la population ouïghoure du Xinjiang, totalement infondées par le département d’État, ont permis au gouvernement étasunien d’imposer des sanctions à la Chine, visant à frapper l’ensemble de la chaîne de l’industrie textile chinoise, qui exporte pour plus de 300 milliards de dollars et représente plus d’un tiers des exportations mondiales de textile, se classant ainsi au premier rang mondial.149 Mais malgré les sanctions étasuniennes, le commerce extérieur du Xinjiang a bondi de 51,25 % en glissement annuel, atteignant 30 milliards de dollars au cours des trois premiers trimestres de 2023, les échanges avec cinq nations d’Asie centrale ayant augmenté de 59,1 %.150 La Chine vient d’annoncer une zone de libre-échange dans le Xinjiang pour promouvoir la connectivité avec les pays régionaux de la Ceinture et de la Route.

Outre la guerre des « soft powers », les États-Unis n’ont pas ménagé leurs efforts pour contenir le développement de la Chine dans les secteurs de haute technologie, en particulier pour affaiblir la capacité de la Chine à produire ou même à acheter des puces semi-conductrices haut de gamme. En imposant une juridiction de longue portée sur des technologies telles que les machines de lithographie à ultraviolet extrême (EUV) fabriquées par la société néerlandaise ASML, les États-Unis cherchent à empêcher la Chine d’entrer dans l’avenir de la technologie des puces. L’administration Biden estime que l’impact de cette mesure ira bien au-delà de l’affaiblissement des progrès militaires de la Chine, mais qu’elle menacera également la croissance économique et le leadership scientifique de la Chine.

Gregory C. Allen, directeur du projet de gouvernance de l’intelligence artificielle et chercheur principal du programme des technologies émergentes au Centre d’études stratégiques et internationales de Washington, estime que le message véhiculé par les contrôles à l’exportation contre la Chine émis par le Bureau américain de l’industrie et de la sécurité (BIS) en octobre 2022, fait partie d’une « nouvelle politique étasunienne visant à étrangler activement de larges segments de l’industrie technologique chinoise, un étranglement avec l’intention de tuer ».151 C.J. Muse, un analyste du secteur aux États-Unis, a déclaré : « Si vous m’aviez parlé de ces règles il y a cinq ans, je vous aurais dit qu’il s’agit d’un acte de guerre. Nous devrions être en guerre avec ce type d’action ».152

Malgré les restrictions sévères imposées par les États-Unis, la Chine continue de dépasser le Nord global (figure 50).

Grâce à l’initiative « la Ceinture et la Route », la Chine renforce ses liens économiques avec le Sud global. Entre 2013 et 2022, le volume total des échanges commerciaux de la Chine avec les pays participant à l’initiative « la Ceinture et la Route » a atteint 19 100 milliards de dollars, avec une augmentation annuelle moyenne de 6,4 %. L’investissement bilatéral cumulé a dépassé 380 milliards de dollars, et l’investissement direct étranger de la Chine a dépassé 240 milliards de dollars. Les nouveaux projets contractés par la Chine ont atteint 2 000 milliards de dollars, avec un chiffre d’affaires cumulé de 1 300 milliards de dollars réalisés.153

Paradoxalement, l’endiguement des États-Unis dans les domaines de la haute technologie n’a fait que renforcer la détermination de la Chine à être autonome en matière d’innovation. Ces dernières années, la Chine a réalisé des percées significatives en matière d’innovation indépendante dans les domaines des puces haut de gamme, des véhicules électriques et de la technologie numérique, rendant de plus en plus irréalistes le blocus et l’endiguement des États-Unis dans les domaines de la haute technologie.

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Le Nord global pousse le monde sur la voie de la guerre

L’essor pacifique des pays du Sud, emmenés par l’Asie et en particulier la Chine, pose un défi économique global à la domination impérialiste mondiale. Pour la première fois en 600 ans, les puissances impérialistes atlantiques sont confrontées à une force économique non blanche capable de les contrer.

Pour contenir la montée en puissance de la Chine, les États-Unis intensifient l’intégration interne au sein du camp impérialiste, en permettant et en exigeant que deux pays fascistes vaincus lors de la Seconde Guerre mondiale (le Japon et l’Allemagne) se réarment. Les dirigeants politiques étasuniens considèrent unanimement qu’il est essentiel d’endiguer et de vaincre la Chine en tant qu’ennemi stratégique fondamental et ont entamé une nouvelle guerre froide. Les chefs militaires étasuniens font des déclarations alarmantes au sujet de la Chine. L’objectif géopolitique des États-Unis est de renverser les régimes de la Chine et de la Russie, de dénucléariser et, si possible, de démembrer les deux pays, de les diviser en plusieurs petits pays et de s’assurer qu’ils ne pourront plus jamais contester l’hégémonie militaire ou économique des États-Unis.

À la frontière occidentale de la Russie, l’expansion de l’OTAN vers l’est a porté la question de la sécurité de l’Ukraine à un point critique d’ébullition. Avant la dissolution de l’Union soviétique, les États-Unis avaient promis à Gorbatchev que l’OTAN ne s’étendrait pas vers l’est puisque sa mission initiale (contrer l’Union soviétique et contenir le communisme européen) s’était achevée avec la fin de la guerre froide. Cependant, l’OTAN n’a pas respecté ce « gentlemen’s agreement » et a accueilli 14 nouveaux États membres, dont plusieurs anciennes républiques soviétiques. En 2018, l’Ukraine a modifié sa constitution pour faire de l’adhésion à l’OTAN et à l’Union européenne sa stratégie nationale, ce qui constitue une menace importante pour la sécurité nationale de la Russie. Kiev n’étant qu’à 760 km de Moscou, permettre à l’OTAN de déployer des armes nucléaires en Ukraine constituerait une menace militaire incontrôlable pour la Russie.

Simultanément, les forces néonazies se développent dans l’ouest de l’Ukraine. En janvier 2022, des processions aux flambeaux ont été organisées dans des villes comme Kiev et Lviv pour commémorer l’anniversaire du collaborateur nazi Stepan Bandera. Lors des conflits précédents, les extrémistes nationalistes de l’Ukraine occidentale ont hissé des drapeaux nazis et menacé d’anéantir les Ukrainiens de l’Est et les éléments pro-russes. Les ressortissants Russes de l’Ukraine orientale ont dû organiser la résistance et demander l’aide de la Russie. Dans ces circonstances, la Russie a lancé une « opération militaire spéciale » en Ukraine, faisant face à une confrontation directe avec la force militaire de l’OTAN.

Dans le Pacifique occidental, les États-Unis tentent continuellement d’attiser les tensions concernant la mer de Chine méridionale et Taïwan. En août 2022, malgré une forte opposition et des représentations solennelles de la Chine, la présidente de la Chambre des représentants des États-Unis, Nancy Pelosi, s’est rendue à Taïwan, violant gravement le principe d’« une seule Chine » et les dispositions des trois communiqués conjoints américano-chinois, affectant gravement les fondements politiques des relations sino-américaines. Il est important de rappeler qu’en 1972, dans le communiqué de Shanghai, les États-Unis ont accepté la politique « d’une seule Chine », qui reconnaît qu’il n’y a qu’une seule Chine et que Taïwan n’est pas un État séparé et souverain. En août 2023, la marine étasunienne, ainsi que des forces du Canada et de la République de Corée, ont mené des exercices militaires conjoints dans la mer du Japon et la mer Jaune.154 Cependant, les exercices ont pris fin abruptement après seulement cinq heures en raison des mobilisations militaires ciblées de la Chine.155 Depuis que Ferdinand Marcos Jr. est devenu président des Philippines en juin 2022, les Philippines ont ouvert plusieurs bases militaires aux États-Unis, renforcé les liens de sécurité avec l’Australie et le Japon, et déclenché des conflits avec la Chine sur des questions de souveraineté en mer de Chine méridionale. Les navires de guerre des États-Unis, du Canada, de l’Australie et d’autres pays patrouillent et s’exercent fréquemment en mer de Chine méridionale, provoquant plusieurs rencontres et frictions avec la marine chinoise.

Jusqu’à présent, face aux provocations incessantes des États-Unis et de leurs alliés, la Chine a maintenu une attitude de retenue, s’efforçant d’éviter les conflits militaires avec les États-Unis et leurs alliés, une confrontation qui pourrait dégénérer en une guerre nucléaire mondiale. Cependant, Taïwan revêt une importance particulière pour la Chine. En tant que partie intégrante de la Chine, historiquement et en vertu du droit international, le maintien de la séparation de Taïwan signifie que la guerre civile chinoise, et même le « siècle d’humiliation » qui a commencé avec les guerres de l’opium en 1840, n’ont pas pris fin. La division de Taïwan est inacceptable pour la Chine, même si cela implique le risque d’une guerre directe contre les États-Unis.

Avec le soutien direct de M. Biden et de M. Blinken, Israël procède à un nettoyage ethnique et à un génocide des civils palestiniens à Gaza. La situation à Gaza révèle clairement le vrai visage du camp impérialiste du Nord global en tant que collectif de colons blancs : lorsque des conflits éclatent entre les colons blancs et les colonisés de couleur, le camp impérialiste se tient uniformément aux côtés des colons.

Les lignes de fracture de l’Ukraine et de la Palestine ont exacerbé la polarisation des sociaux-démocrates, dont une partie s’est avérée incapable de surmonter son désir d’acceptabilité et de se joindre à un mouvement robuste en faveur de la paix.

Revenons à la citation de l’OTAN et de l’UE selon laquelle elles « protégeront notre milliard de citoyens, préserveront notre liberté et notre démocratie… contre toutes les menaces ». Cette phrase, qui apparaît dans le premier paragraphe du communiqué OTAN-UE 2023, décrit clairement la structure du monde d’aujourd’hui : le camp impérialiste, centré autour des États-Unis et basé sur les infrastructures de l’OTAN, est pleinement uni et mobilisé militairement, politiquement et économiquement, prêt à étouffer toute force émergente susceptible de constituer une menace pour leur statut hégémonique. Cette immense pression impérialiste sans précédent a contraint de nombreux habitants du « reste du monde » (ceux qui ne font pas partie du camp impérialiste) à identifier des structures et des identités alternatives pour assurer leur propre préservation.

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ÉPILOGUE : une alternative économique et politique crédible à l’ordre mondial

Vingt-cinq ans après la publication de Le Grand Échiquier (1997) de Zbigniew Brzezinski (qui l’identifiait comme le plus grand danger géopolitique pour les États-Unis) la Chine, la Russie et l’Iran se sont en effet rapprochés dans divers domaines, notamment l’économie, la politique et la sécurité. Ce n’est pas une coïncidence si ces trois pays sont les seuls à faire partie des BRICS10, de l’Organisation de coopération de Shanghai et du Groupe d’amis pour la défense de la Charte et des Nations unies (figure 51). La force motrice de cette convergence, précisément comme Brzezinski l’avait prédit, est l’escalade de la pression hégémonique exercée par le groupe impérialiste dirigé par les États-Unis. Aucune organisation internationale anti-impérialiste n’est comparable à l’OTAN, dont l’idéologie, le commandement militaire et l’échange de renseignements sont très unifiés. Néanmoins, trois organisations internationales influentes ont émergé au sein du Sud global :

  • L’organisation BRICS, initiée par le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud, est un mécanisme de coopération économique qui s’est étendu à 17 partenaires de coopération officiels et non officiels après le sommet des BRICS en août 2023. Les BRICS10 représentent 45,5 % de la population mondiale, 35,6 % du PIB (PPA) et 44 % de la production industrielle mondiale. La nouvelle banque de développement des BRICS a démarré avec un investissement en capital de 100 milliards de dollars étasuniens et sa structure de réserve contingente détient également 100 milliards de dollars étasuniens.156
  • L’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) a commencé par se concentrer sur les questions de sécurité. Elle rassemble des pays du continent eurasien, des grands acteurs économiques comme la Chine, l’Inde et la Turquie aux principaux pays de l’OPEP comme l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, ainsi que les pays membres de la Ligue des États arabes, pour relever les défis en matière de sécurité grâce à des approches de développement à multiples facettes. L’OCS représente 60 % du territoire eurasien, un quart du PIB mondial et 40 % de la population mondiale.157 En juillet 2023, Xi Jinping a proposé la création d’une banque de développement de l’OCS.
  • Le Groupe des amis pour la défense de la Charte des Nations unies (FUNC), récemment créé, cherche à défendre le multilatéralisme et à s’opposer à l’hégémonie et à l’unilatéralisme dans le cadre de la Charte des Nations unies. Ce groupe compte actuellement 20 pays membres, le Venezuela en étant l’initiateur. Sur la question de la Palestine, le groupe soutient la juste demande d’indépendance nationale du peuple palestinien, appuie la candidature de la Palestine pour devenir un membre officiel des Nations unies et soutient la création d’un État palestinien indépendant avec Jérusalem-Est comme capitale.

L’initiative « la Ceinture et la Route » (ICR), qui a franchi le cap des dix ans, a également eu un impact significatif sur le Sud global. À ce jour, avec un investissement dépassant les 1 000 milliards de dollars, l’ICR a été une force centrale dans le développement des infrastructures dans le Sud.158

Contrairement au camp impérialiste, les aspirations premières des pays du Sud sont la souveraineté et le développement, ainsi que l’instauration de la paix. Plus précisément, ils sont confrontés à au moins huit défis et opportunités communs (figure 52), détaillés ci-dessous :

  • Multilatéralisme : engager des dialogues multilatéraux approfondis et une coopération entre les pays du Sud sans dépendre des plateformes fournies par les pays du Nord.
  • Nouvelle modernisation : construire une intégration économique régionale par le biais de corridors et de ceintures économiques au sein du Sud afin de réaliser des économies d’échelle au niveau continental.
  • Dédollarisation : réduire la dépendance à l’égard du dollar étasunien (en particulier pour les pays confrontés à des sanctions) dans le commerce international grâce à des mécanismes tels que les transactions en monnaie locale, les échanges de devises et les monnaies communes régionales.
  • Innovation menée par le Sud : promouvoir l’innovation technologique démocratique et ouverte parmi les pays du Sud. Cela inclut la réduction de la prime économique causée par les monopoles de propriété intellectuelle dans des domaines tels que la médecine, les nouvelles énergies et les technologies de l’information.
  • Réparations et règlement de la dette : s’attaquer au piège de la dette centenaire imposée par les pays impérialistes par le biais de négociations collectives en vue de réductions et de compensations.
  • Souveraineté alimentaire : garantir le droit des peuples et des États à définir leur politique agricole et alimentaire, sans aucun dumping vis-à-vis des pays tiers, des sociétés transnationales et des accords de libre-échange.
  • Souveraineté numérique : renforcer la capacité des pays du Sud à contrôler les espaces numériques en matière de matériel, de logiciels, de données, de contenu, de normes et de réglementations, et construire des alternatives aux plates-formes numériques monopolisées par les États-Unis.
  • Justice environnementale : formuler des plans d’attribution de droits d’émission équitables et exhorter les pays impérialistes à compenser leur pollution cumulative à long terme. La financiarisation de la nature est une impasse pour les pays du Sud.

L’humanité est confrontée à une puissance militaire dangereuse et impitoyable. Les États-Unis sont en train de réarmer les deux principales puissances fascistes de la Seconde Guerre mondiale, alors qu’ils se tournent de plus en plus vers une politique d’extrême droite et néofasciste.

Il est malheureusement vrai que les forces de gauche en dehors du camp socialiste sont faibles et que l’aspect subjectif de la révolution dans la plupart des pays n’est pas prêt à mener une révolution. Mais nous assistons à des changements significatifs et à des ruptures de conscience, même si ce n’est pas une pleine conscience de classe. Des millions de personnes sont dans les rues, révoltées par la maladie des régimes génocidaires des États-Unis et d’Israël, mais aussi de la France et du Royaume-Uni. Les quatre puissances nucléaires de l’impérialisme se sont unies, démontrant ainsi leur puissance. Le prix à payer sera probablement la création d’une future génération de jeunes dans le monde arabe et musulman qui n’oubliera ni ne pardonnera cet étalage de brutalité et d’humiliation. Mao Zedong a décrit cette dialectique historique :

L’impérialisme et tous les réactionnaires, considérés au fond, d’un point de vue à long terme, d’un point de vue stratégique, doivent être considérés pour ce qu’ils sont : des tigres de papier. C’est sur cette base que nous devons construire notre réflexion stratégique. D’un autre côté, ce sont aussi des tigres vivants, des tigres de fer, de vrais tigres qui peuvent dévorer les gens. C’est sur cette base que nous devons développer notre pensée tactique.159

Sous la direction du président Xi Jinping, la Chine a proposé des recommandations visionnaires pour l’humanité. Le modèle chinois de modernisation, résultat du socialisme aux caractéristiques chinoises, indique une voie pour les pays du Sud qui ne repose pas sur l’exploitation et l’oppression des autres nations. Il établit un équilibre entre la civilisation matérielle et spirituelle, le développement économique et l’environnement écologique, offrant ainsi une référence essentielle pour le développement des pays du Sud.

Après plus de 600 ans d’humiliation, de violence raciale et d’exploitation économique par le Nord global, nous sommes arrivés à ce stade d’hyper-impérialisme. Cependant, l’émergence d’un Sud global, même avec ses contradictions, nous rappelle que les êtres humains ne sont pas contraints de rester des victimes de l’histoire. Malgré le contexte différent des facteurs subjectifs, l’appel final du Manifeste communiste (1848) reste convaincant aujourd’hui :

Nous avons un monde à gagner.

***

«Femme noire» (traduction non officielle)

par la poétesse cubaine
Nancy Morejón

Je sens encore l’écume de la mer qu’ils m’ont forcée à traverser.
La nuit, je ne peux me souvenir de la nuit.
L’océan lui-même ne pourrait s’en souvenir.
Mais je n’ai jamais oublié la première mouette que j’ai aperçue.
En haut, les nuages, comme des témoins innocents et omniprésents.
Peut-être n’ai-je pas oublié ma côte perdue, ni même ma langue ancestrale.
Ils m’ont déposée ici et c’est ici que j’ai vécu.
Et parce que je travaille comme un chien,
c’est ici que je renais.
Et j’ai cherché à m’appuyer sur l’épopée des Mandingues.

Je me suis rebellée.

Sa Majesté m’a achetée sur une place publique.
J’ai brodé le manteau de Sa Majesté et je lui ai donné un fils.
Mon fils n’a pas eu de nom.
Et Sa Majesté est morte entre les mains d’un seigneur anglais.

J’ai avancé péniblement.

C’est le pays où j’ai été fouettée et battue la tête en bas.
J’ai pagayé le long de toutes ses rivières.
Sous son soleil, j’ai cousu, récolté et je n’ai rien mangé.
J’ai eu une caserne d’esclaves en guise de maison.
J’ai porté moi-même les pierres pour la construire,
mais j’ai chanté au rythme naturel des oiseaux de la nation.

Je me suis révoltée.

Sur cette même terre, j’ai touché le sang chaud
et les os pourris de beaucoup d’autres comme moi,
amenés ici, ou non, comme je l’ai été.
J’ai alors cessé à jamais de penser au chemin de la Guinée.
Vers la Guinée ou le Bénin ? Est-ce que je pensais à Madagascar ou au Cap-Vert ?

J’ai travaillé encore plus.

J’ai alors jeté les bases de mon meilleur chant millénaire et de mon espoir.
C’est là que j’ai construit mon monde.
Je suis allée dans les montagnes.
Ma véritable indépendance est arrivée dans the palenque
et j’ai chevauché avec la cavalerie de Maceo.

Seulement un siècle plus tard, aux côtés de mes descendants,
du haut d’une montagne bleue,

je suis descendue de la Sierra

pour en finir avec les capitalistes et les usuriers,
les généraux et les petits bourgeois.
Maintenant, je suis : c’est seulement maintenant que nous détenons et créons.
Rien ne nous échappe.
Notre terre.
À nous la mer et le ciel.
À nous la magie et les rêves extraordinaires.
Mes égaux, je vous vois danser
autour de l’arbre que nous avons planté pour le communisme.
Son bois généreux tinte clairement.

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ANNEXE

Méthodologie

Ce rapport a été compilé avec des données et des graphiques de Global South Insights (GSI), basés sur diverses sources, dont la Banque mondiale, le Fonds monétaire international, les Nations unies, l’OCDE, le Conference Board, l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm, Monthly Review, et World Beyond War, entre autres (voir figure 55). Dans cette section, nous présentons les définitions et les critères méthodologiques qui ont guidé l’élaboration de ce rapport.

Les 193 États membres des Nations unies et la Palestine en tant qu’État observateur sont tous inclus dans les groupes du Nord ou du Sud.

En analysant les pays du Nord, nous avons constaté que parmi les facteurs inclus dans notre enquête (relations historiques, militaires et de renseignement) un facteur essentiel était la relation de chaque pays avec les services de renseignement étasuniens. En conséquence, nous avons divisé le Nord global en quatre aires, comprenant 49 pays dans le camp impérialiste dirigé par les États-Unis. Notre analyse du Sud a mis en évidence des facteurs tels que l’indépendance économique et politique du pays vis-à-vis de l’impérialisme et les relations stratégiques entre les pays du Sud. Toutefois, le degré relatif auquel ces pays ont été la cible d’un changement de régime et le rôle qu’ils ont joué dans la promotion publique des positions anti-impérialistes internationales ont constitué un facteur essentiel. C’est pourquoi les 145 pays du Sud sont répartis en six groupes.

Outre les pays membres de l’ONU, nous avons inclus le nombre de bases militaires dans les pays non membres de l’ONU et dans les territoires, parfois litigieux, où se trouvent les bases étrangères.

D’autres calculs comparatifs dans ce rapport incluent tous les pays et territoires à partir de leur base de données source respective.

Bien qu’inestimables, les bases de données internationales, telles que celles du FMI et de la Banque mondiale, sont grevées par des limitations découlant des disparités dans les processus de production statistique nationaux, en particulier dans les méthodologies de mesure des variables. Cela conduit à la non-harmonisation des données nationales compilées par les bases de données internationales à leurs sources. De même, les bases de données internationales peuvent présenter des limites en termes d’exhaustivité. La gouvernance des données et les procédures d’audit rigoureuses menées par GSI visent à garantir une cohérence maximale des données.

En ce qui concerne les données relatives au PIB, ce rapport utilise principalement les données du FMI. Notamment, la base de données du FMI n’inclut pas les données de quatre pays : Cuba et la République populaire démocratique de Corée, en raison de leur décision souveraine de ne pas être soumis aux diktats du FMI, ainsi que Monaco et le Liechtenstein. Le champ PIB (PPA) dans les tableaux concernant ces quatre pays est laissé vide.

Les données économiques de la Banque mondiale ne sont utilisées que pour calculer la valeur ajoutée de l’industrie mondiale. La Banque mondiale publie la valeur ajoutée de l’industrie en pourcentage du PIB en utilisant les prix et les taux de change courants, ce que l’on appelle dans cette étude la méthode des taux de change courants (TCC). Ce n’est que dans ce cas que les valeurs des TCC et du PIB (PPA) sont présentées.

Dans ce document, le PIB (PPA) est adopté comme norme. Ce choix n’est pas exempt de controverse et, compte tenu de la portée de ce rapport, nous n’entrerons pas dans nos réflexions méthodologiques sur ces controverses. Les facteurs de conversion des PPA sont des estimations statistiques basées sur des paniers de biens et de services pour des années de référence, appliquées ensuite au PIB pour les estimations du PIB (PPA). Bien qu’il y ait des arguments selon lesquels les données du PIB (PPA) pourraient surestimer les pays du Sud, il s’agit d’une mesure plus précise pour comparer les performances économiques et les niveaux de vie entre différents pays, car elle tient compte des différences de niveaux de prix et fournit une métrique plus stable pour les comparaisons internationales. Dans le même temps, le PIB (PPA) constitue une base plus significative pour classer les pays en fonction de leur taille économique et de leur contribution à l’économie mondiale, par rapport aux classements du PIB utilisant les TCC. Dans ces classements, les pays à monnaie forte peuvent être mieux classés, même si leur production économique réelle n’est pas aussi importante.

Les figures 53 et 54 montrent les comparaisons entre les calculs TCC et PPA du pourcentage du PIB mondial total pour 1) la Chine par rapport aux États-Unis et 2) le Sud global par rapport au Nord. Tant les TCC que les PPA montrent une augmentation spectaculaire des pourcentages relatifs pour la Chine et le Sud.

Toutefois, les facteurs de conversion des PPA pour mesurer les dépenses militaires sont nécessairement moins fiables que les taux de change courants, car aucune donnée sur les prix n’est collectée pour les dépenses militaires. Par conséquent, il est impossible de disposer de telles informations pour effectuer des comparaisons internationales. Le SIPRI reconnaît que l’utilisation de l’ajustement PPA pour les dépenses militaires est inexacte et donc moins fiable que l’utilisation des taux de change. En ce qui concerne les dépenses militaires, nous avons combiné les données de la Monthly Review pour les dépenses militaires réelles des États-Unis, avec les données du SIPRI, pour calculer les dépenses militaires mondiales réelles à l’aide des TCC.

Comme pour les autres données militaires, diverses sources ont été utilisées pour aborder de manière globale ce phénomène central afin d’analyser l’hyper-impérialisme ; cependant, des limites persistent en raison des différentes méthodologies, variables de mesure, rareté des données et secret. Nous avons utilisé les données du Congressional Research Service étasunien combinées au Military Intervention Project (MIP) pour la quantité d’interventions. Bien que le premier soit une publication officielle des États-Unis qui sert de source de données primaire sur les interventions militaires étasuniennes, il n’inclut pas certaines missions secrètes et n’agrège pas ses données pour différencier les divers types d’interventions des forces armées à l’étranger. Ce dernier utilise une définition plus complète de l’intervention militaire, bien qu’il ne publie qu’un résumé des données. Enfin, nous avons utilisé les listes publiées par World Beyond War, Declassified UK et le rapport sur la structure des bases du ministère étasunien de la défense pour obtenir des données sur les bases militaires.

Outre les sources de données susmentionnées, l’élaboration du présent rapport par GSI s’appuie sur un ensemble plus large de sources de données énumérées ci-dessous. GSI a soigneusement créé de nouvelles catégories et construit des plateformes complexes d’intégration de données pour fournir l’analyse du point de vue du Sud global. Les processus de classification sont intrinsèquement difficiles et susceptibles d’être modifiés, car les politiques nationales et régionales peuvent changer rapidement. La collecte et l’intégration de données étendues dans divers pays ont permis de tester des hypothèses. Par exemple, pour déterminer qui sont les alliés les plus proches des États-Unis, nous avons évalué la proximité avec les services de renseignement étasuniens. Les données utilisées pour cette analyse ont été révélées par Edward Snowden lorsqu’il a montré qu’en plus des « Cinq Yeux » (le plus ancien partenariat de renseignement au monde entre cinq États occidentaux anglophones, qui a débuté avec l’accord de communication et de renseignement entre le Royaume-Uni et les États-Unis en 1946) il existait deux autres groupes cachés, les « Neuf Yeux » et les « Quatorze Yeux » (SIGINT Seniors Europe, créé en 1982).

Le présent rapport repose sur l’intégration de bases de données, l’analyse de données et l’élaboration de GSI.

Figure 55

Sources et description des données utilisées dans le cadre des recherches

Source Base de données Explication de GSI URL
The Conference Board (CB) Growth Accounting and Total Factor Productivity Contribution de la qualité du travail à la croissance du PIB réel https://data-central.conference-board.org/
Conference Board (CB) Growth Accounting and Total Factor Productivity Contribution de la quantité de travail à la croissance du PIB réel https://data-central.conference-board.org/
Conference Board (CB) Growth Accounting and Total Factor Productivity Contribution du total des services du capital à la croissance du PIB réel https://data-central.conference-board.org/
Conference Board (CB) Growth Accounting and Total Factor Productivity Contribution de la productivité totale des facteurs à la croissance du PIB réel https://data-central.conference-board.org/
Conference Board (CB) Growth Accounting and Total Factor Productivity Croissance du PIB réel https://data-central.conference-board.org/
Congressional Research Service (CRS) Recours à la force armée à l’étranger reconnu par les États-Unis, 1798–avril 2023 https://crsreports.congress.gov/product/pdf/R/R42738/41
Declassified UK Bases de Declassified UK, 2020 https://www.declassifieduk.org/revealed-the-uk-militarys-overseas-base-network-involves-145-sites-in-42-countries/
Encyclopedia Britannica Membres du Commonwealth britannique
Enerdata Données mondiales sur l’énergie et le CO2 Data Données mondiales sur l’énergie et le CO2 Data https://www.enerdata.net/
Enerdata Efficacité énergétique mondiale et demande Efficacité énergétique mondiale et demande https://www.enerdata.net/
Energy Information Administration (EIA) Gaz naturel Réserves de gaz naturel https://www.eia.gov/naturalgas/
Ernst & Young Who owns the DAX? Analysis of the shareholder structure of DAX companies in 2018 – abridged version Structure actionnariale des sociétés du DAX en 2018 https://assets.ey.com/content/dam/ey-sites/ey-com/de_de/news/2019/06/ey-wem-gehoert-der-dax-2019.pdf?download=.
Federation of American Scientists Partage des armes nucléaires, 2023 https://fas.org/wp-content/uploads/2023/11/Nuclear-weapons-sharing-2023.pdf
Federation of American Scientists Statut des forces nucléaires mondiales https://fas.org/initiative/status-world-nuclear-forces/
G-77 Groupe des 77 aux Nations Unies https://www.g77.org/doc/
Global South Insights (GSI) Statut colonial
Global South Insights (GSI) Histoire commune des pays impérialistes
Global South Insights (GSI) Nord ou Sud
Global South Insights (GSI) Aire du Nord ou groupe du Sud
Global South Insights (GSI) Bloc militaire dirigé par les États-Unis
Green Finance & Development Center Pays signataires du protocole d’entente BRI https://greenfdc.org/countries-of-the-belt-and-road-initiative-bri/
Groupe d’amis pour la défense de la Charte des Nations Unies Amis de la Charte des Nations Unies https://www.gof-uncharter.org/
IHS Markit Répartition de l’actionnariat par région en 2020 https://cdn.ihsmarkit.com/www/pdf/0621/DAX-Study-2020—DIRK-Conference-June-2021_IHS-Markit.pdf
International Institute for Strategic Studies (IISS) Informations relatives aux déploiements de troupes https://www.iiss.org/publications/the-military-balance/
Fonds monétaire international (FMI) Perspectives de l’économie mondiale (PEM) PIB en taux de change courants (TCC) en prix constants https://www.imf.org/en/Publications/WEO/weo-database/2023/October
Fonds monétaire international (FMI) Perspectives de l’économie mondiale (PEM) PIB en termes de taux de change courants (TCC) en prix courants https://www.imf.org/en/Publications/WEO/weo-database/2023/October
Fonds monétaire international (FMI) Perspectives de l’économie mondiale (PEM) PIB en parité de pouvoir d’achat (PPA) en prix constants https://www.imf.org/en/Publications/WEO/weo-database/2023/October
Fonds monétaire international (FMI) Perspectives de l’économie mondiale (PEM) PIB en parité de pouvoir d’achat (PPA) en prix courants https://www.imf.org/en/Publications/WEO/weo-database/2023/October
Fonds monétaire international (FMI) Perspectives de l’économie mondiale (PEM) PIB par habitant en taux de change courants (TCC) en prix courants https://www.imf.org/en/Publications/WEO/weo-database/2023/October
Fonds monétaire international (FMI) Perspectives de l’économie mondiale (PEM) PIB par habitant en parité de pouvoir d’achat (PPA) en prix constants https://www.imf.org/en/Publications/WEO/weo-database/2023/October
Fonds monétaire international (FMI) Perspectives de l’économie mondiale (PEM) PIB par habitant en parité de pouvoir d’achat (PPA) en prix courants https://www.imf.org/en/Publications/WEO/weo-database/2023/October
Fonds monétaire international (FMI) Perspectives de l’économie mondiale (PEM) Population https://www.imf.org/en/Publications/WEO/weo-database/2023/October
International Organization for Standardization (ISO) Pays et territoire ISO https://www.iso.org/iso-3166-country-codes.html
International Renewable Energy Agency (IRENA) Statistiques des énergies renouvelables 2023 https://www.irena.org/Publications/2023/Jul/Renewable-energy-statistics-2023
Maddison Statistiques historiques de l’économie mondiale https://www.rug.nl/ggdc/historicaldevelopment/maddison/releases/maddison-database-2010
Monthly Review Dépenses militaires réelles des États-Unis, 2022 https://monthlyreview.org/2023/11/01/actual-u-s-military-spending-reached-1-53-trillion-in-2022-more-than-twice-acknowledged-level-new-estimates-based-on-u-s-national-accounts/
National Bureau of Statistics of China(NBS) PIB trimestriel de la Chine du troisième trimestre 2019 au troisième trimestre 2023 https://data.stats.gov.cn/english/easyquery.htm?cn=B01
Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) Participants au Sommet OTAN de Vilnius 2023 https://www.nato.int/cps/en/natohq/events_216418.htm?selectedLocale=en
Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) Pays membres de l’OTAN https://www.nato.int/cps/en/natohq/topics_52044.htm
Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) Série sur les marchés financiers Capital entre les mains d’investisseurs étrangers, 10 000 plus grandes entreprises de l’OCDE https://www.oecd.org/corporate/Owners-of-the-Worlds-Listed-Companies.pdf
Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) Série sur les marchés financiers Appartenance étrangère et nationale des sociétés cotées sur les principales bourses https://www.oecd.org/corporate/Owners-of-the-Worlds-Listed-Companies.pdf
Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) PIB trimestriel de la zone euro du troisième trimestre 2019 au troisième trimestre 2023 https://data.oecd.org/gdp/quarterly-gdp.htm
Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) Annual Statistical Bulletin (ASB) Réserves mondiales prouvées de pétrole brut par pays https://asb.opec.org/
Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) Membres des OPEC https://www.opec.org/opec_web/en/about_us/25.htm
SanctionsKill Campaign Pays sanctionnés par les États-Unis https://sanctionskill.org/
Organisation de coopération de Shanghai (OCS) Membres des SCO https://eng.sectsco.org/
Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI) Dépenses militaires du SIPRI Dépenses militaires mondiales (USD constants) https://www.sipri.org/databases/milex
Stockholm International Peace Research Institute (SIPRI) Dépenses militaires du SIPRI Dépenses militaires mondiales (USD courants) https://www.sipri.org/databases/milex
Stuart Laycock (2012) Invasions britanniques 927-2012
The Economist Cent ans de statistiques économiques Compte courant de la balance des paiements du Royaume-Uni
The Economist Cent ans de statistiques économiques PIB britannique aux prix du marché
The Economist Cent ans de statistiques économiques Compte courant de la balance des paiements du Royaume-Uni 1885–1987
The Economist Cent ans de statistiques économiques Produit national brut (PNB) des États-Unis 1889-1987
Nations Unies (ONU) Perspectives de la population mondiale (WPP) Estimations de l’espérance de vie par région, sous-région et pays, annuellement pour 1950-2021 https://population.un.org/wpp/
Nations Unies (ONU) Perspectives de la population mondiale (WPP) Estimations de l’espérance de vie par région, sous-région et pays, annuellement pour 2022-2100 https://population.un.org/wpp/
Nations Unies (ONU) Perspectives de la population mondiale (WPP) Régions, sous-régions et intermédiaires définies par l’ONU https://population.un.org/wpp/Download/Documentation/Documentation/
Nations Unies (ONU) Perspectives de la population mondiale (WPP) Estimations démographiques par région, sous-région et pays, annuellement pour 1950-2021 https://population.un.org/wpp/
Nations Unies (ONU) Perspectives de la population mondiale (WPP) Estimations démographiques par région, sous-région et pays, annuellement pour 2022-2100 https://population.un.org/wpp/
Nations Unies (ONU) Membres des UN https://www.un.org/en/about-us/member-states
Nations Unies (ONU) Données relatives aux votes à l’ONU https://digitallibrary.un.org/search?cc=Voting+Data&ln=en&c=Voting+Data
US Bureau of Economic Analysis (BEA) Tableaux des transactions internationales, des services internationaux et du bilan des investissements internationaux Compte courant de la balance des paiements https://apps.bea.gov/itable/?reqid=62&step=1&_gl=1*xxlwzz*_ga*Mjk5NDQ2MTIxLjE2OTA0NjEwMzA.*_ga_J4698JNNFT*MTcwMjMxNjAyMC4xNS4xLjE3MDIzMTYwMjkuMC4wLjA.#eyJhcHBpZCI6NjIsInN0ZXBzIjpbMSwyLDYsNl0sImRhdGEiOltbIlByb2R1Y3QiLCIxIl0sWyJUYWJsZUxpc3QiLCIxIl0sWyJGaWx0ZXJfIzEiLFsiMCJdXSxbIkZpbHRlcl8jMiIsWyIwIl1dLFsiRmlsdGVyXyMzIixbIjAiXV0sWyJGaWx0ZXJfIzQiLFsiMCJdXSxbIkZpbHRlcl8jNSIsWyIwIl1dXX0=
US Bureau of Economic Analysis (BEA) Comptes nationaux des revenus et des produitss Produit intérieur brut (PIB), indices de quantité https://apps.bea.gov/itable/?reqid=19&step=2&isuri=1&categories=survey#eyJhcHBpZCI6MTksInN0ZXBzIjpbMSwyLDMsM10sImRhdGEiOltbImNhdGVnb3JpZXMiLCJTdXJ2ZXkiXSxbIk5JUEFfVGFibGVfTGlzdCIsIjMiXSxbIkZpcnN0X1llYXIiLCIyMDIxIl0sWyJMYXN0X1llYXIiLCIyMDIzIl0sWyJTY2FsZSIsIjAiXSxbIlNlcmllcyIsIkEiXSxbIlNlbGVjdF9hbGxfeWVhcnMiLCIxIl1dfQ==
US Bureau of Economic Analysis (BEA) Comptes nationaux des revenus et des produits Produit national brut https://apps.bea.gov/itable/?reqid=19&step=2&isuri=1&categories=survey&_gl=1*es60tl*_ga*Mjk5NDQ2MTIxLjE2OTA0NjEwMzA.*_ga_J4698JNNFT*MTcwMjMxNjAyMC4xNS4xLjE3MDIzMTYyODEuMC4wLjA.#eyJhcHBpZCI6MTksInN0ZXBzIjpbMSwyLDMsM10sImRhdGEiOltbImNhdGVnb3JpZXMiLCJTdXJ2ZXkiXSxbIk5JUEFfVGFibGVfTGlzdCIsIjMxNyJdLFsiRmlyc3RfWWVhciIsIjIwMjEiXSxbIkxhc3RfWWVhciIsIjIwMjMiXSxbIlNjYWxlIiwiLTkiXSxbIlNlcmllcyIsIkEiXSxbIlNlbGVjdF9hbGxfeWVhcnMiLCIxIl1dfQ==
US Bureau of Economic Analysis (BEA) Comptes nationaux des revenus et des produits Épargne nette en pourcentage du revenu national brut https://apps.bea.gov/itable/?reqid=19&step=2&isuri=1&categories=survey#eyJhcHBpZCI6MTksInN0ZXBzIjpbMSwyLDNdLCJkYXRhIjpbWyJjYXRlZ29yaWVzIiwiU3VydmV5Il0sWyJOSVBBX1RhYmxlX0xpc3QiLCIxMzciXV19
US Department of Defense Base Structure Reports FY2023Rapports sur la structure de base pour l’exercice 2023 >Bâtiments sous contrôle militaire américain dans des pays étrangers https://www.acq.osd.mil/eie/Downloads/BSI/Base%20Structure%20Report%20FY23.xlsx
Banque mondiale (BM) Indicateurs de développement dans le monde (WDI) Épargne ajustée : consommation de capital fixe (USD courants) https://datatopics.worldbank.org/world-development-indicators/
Banque mondiale (BM) Indicateurs de développement dans le monde (WDI) PIB exprimé en taux de change actuels (TCC) en utilisant le dollar américain actuel https://datatopics.worldbank.org/world-development-indicators/
Banque mondiale (BM) Indicateurs de développement dans le monde (WDI) PIB en parité de pouvoir d’achat (PPA) en dollars internationaux courants https://datatopics.worldbank.org/world-development-indicators/
Banque mondiale (BM) Indicateurs de développement dans le monde (WDI) Formation brute de capital fixe (USD courants) https://datatopics.worldbank.org/world-development-indicators/
Banque mondiale (BM) Indicateurs de développement dans le monde (WDI) Industrie (y compris construction), valeur ajoutée (% du PIB)/td> https://datatopics.worldbank.org/world-development-indicators/
World BEYOND War L’empire militaire des États-Unis : une base de données visuelle 902 bases militaires américaines actuelles https://worldbeyondwar.org/no-bases/
World Nuclear Report Rapport sur la situation de l’industrie nucléaire mondiale, 2022 https://www.worldnuclearreport.org/IMG/pdf/wnisr2022-v3-hr.pdf
World Resources Institute (WRI) Fichiers de formes et frontières des pays, perspective de l’Inde, dernière mise à jour le 4 mai 2017 https://github.com/wri/wri-bounds
XV BRICS Summit 2023 Déclaration de Johannesburg II des BRICS et de l’Afrique : Partenariat pour une croissance mutuellement accélérée, un développement durable et un multilatéralisme inclusif Membres des BRICS https://brics2023.gov.za/wp-content/uploads/2023/08/Jhb-II-Declaration-24-August-2023-1.pdf
Source : Global South Insights
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Global South Insights

Global South Insights (GSI) est un réseau de chercheurs qui s’engagent à faire progresser la recherche quantitative axée sur les données dans le domaine des sciences humaines et sociales. Il est partenaire de Tricontinental: Institute for Social Research.

GSI a utilisé des technologies de données avancées axées sur des bases de données statistiques provenant de plusieurs institutions faisant autorité, en intégrant des mécanismes complets de gouvernance et d’audit des données.

Les problèmes courants auxquels sont confrontés les chercheurs sont les suivants :

  • Sources de données complexes, difficultés d’intégration des données. Pour les données couramment utilisées, telles que les statistiques sur la population et le PIB, des organisations comme les Nations unies, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international ont chacune des approches statistiques différentes. Les données publiées par ces institutions manquent de normalisation, ce qui entraîne divers problèmes de compatibilité et d’interopérabilité lors de l’intégration des données.
  • Mauvaise qualité des données, difficulté de l’audit des données. Des données manquantes et erronées existent dans les ensembles de données publiés par diverses organisations. L’audit des données originales et des données intégrées/analysées repose en grande partie sur des opérations manuelles, qui nécessitent beaucoup de main-d’œuvre, sont inefficaces, sujettes aux erreurs et manquent de répétabilité.
  • Outils de traitement de base, difficultés dans l’analyse avancée. L’intégration et l’analyse des données dépendent fortement d’outils de base tels qu’Excel, qui sont inefficaces et encombrants pour des opérations telles que les moyennes glissantes sur dix ans et la régression linéaire. Ces défis rendent difficile la réalisation d’analyses abstraites de plus haut niveau.
  • Visualisation limitée, difficultés pour la présentation de l’information. En s’appuyant sur les formats de graphiques limités fournis par Excel, il est difficile de créer des présentations de données plus expressives telles que des graphiques composites, des cartes, des cartes thermiques, etc. Les graphiques créés à l’aide d’outils de conception professionnels ne peuvent pas être mis à jour automatiquement en cas de modification des données.
  • Absence de gestion des données, difficultés de collaboration en équipe. Les processus de recherche quantitative basés sur des fichiers Excel ne permettent pas d’accumuler et de gérer les données telles que les données sources, les résultats des audits de données, les flux de traitement des données, les données de processus et les résultats intermédiaires, ce qui rend difficile le soutien de la recherche collaborative à long terme entre plusieurs personnes et plusieurs sujets.
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Liste complète des « Cent onze pays du Sud global diversifiés »

Figure 56

Groupe 5 : Pays du Sud divers

Informations sélectionnées, tous les pays, triés par PIB (PPA), 2022

Partie 1

Pays Généralités Histoire coloniale
Nations Uniesannée d’adhésion Population
(millions)
PIB (PPA)
(milliards)
Taux de croissance
moyenne
annuelle mobile sur 10 ans
PIB (PPA)
par habitant
Statut
colonial
Principales puissances
coloniales
Année de
l’indépendance
Égypte 1945 111 1 676 4,3% 16 174 Colonie Royaume-Uni 1922
Pakistan 1947 236 1 520 4,0% 6 695 Colonie Royaume-Uni 1947
Thaïlande 1946 72 1 482 1,8% 21 154 Semi-Colonie Royaume-Uni France
Bangladesh 1974 171 1 343 6,5% 7 971 Colonie Royaume-Uni 1971
Nigéria 1960 219 1 281 2,2% 5 909 Colonie Royaume-Uni 1960
Argentine 1945 46 1 226 0,3% 26 484 Colonie Espagne, Royaume-Uni 1816
Malaisie 1957 34 1 137 4,1% 34 834 Colonie Royaume-Uni 1957
Emirates arabes unis 1971 9 835 3,1% 84 657 Colonie Royaume-Uni 1971
Singapour 1965 6 719 3,3% 127 563 Colonie Royaume-Uni 1965
Kazakhstan 1992 19 603 2,9% 30 523 Indépendant
Chili 1945 20 579 2,2% 29 221 Colonie Espagne 1818
Pérou 1945 34 523 2,8% 15 310 Colonie Espagne 1821
Irak 1945 44 505 2,7% 11 948 Colonie Royaume-Uni 1932
Maroc 1956 37 363 2,4% 9 900 Colonie France, Espagne 1956
Éthiopie 1945 123 358 8,4% 3 435 Indépendant
Ouzbékistan 1992 35 340 5,9% 9 634 Indépendant
Sri Lanka 1955 22 320 1,8% 14 267 Colonie Royaume-Uni 1948
Kenya 1963 54 311 4,5% 6 151 Colonie Royaume-Uni 1963
Qatar 1971 3 309 2,2% 109 160 Colonie Royaume-Uni 1971
Myanmar 1948 54 261 3,3% 4 847 Colonie Royaume-Uni 1948
République dominicaine 1945 11 256 5,2% 24 117 Colonie Espagne 1844
Koweït 1963 4 249 0,3% 51 238 Colonie Royaume-Uni 1961
Angola 1976 36 248 0,4% 6 944 Colonie Portugal 1975
Équateur 1945 18 231 1,0% 12 818 Colonie Espagne 1822
Ghana 1957 33 217 4,5% 6 752 Colonie Royaume-Uni 1957
Tanzanie 1961 65 209 6,2% 3 394 Colonie Royaume-Uni 1961
Soudan 1956 47 204 0,6% 4 366 Colonie Royaume-Uni 1956
Oman 1971 5 191 2,1% 38 699 Colonie Portugal 1650
Guatemala 1945 18 188 3,5% 10 076 Colonie Espagne 1821
Côte d’Ivoire 1960 28 184 6,8% 6 486 Colonie France 1960
Azerbaïdjan 1992 10 181 1,6% 17 800
Panama 1945 4 173 4,1% 39 397 Colonie Espagne 1903
Tunisie 1956 12 154 1,2% 12 723 Colonie France 1956
Libye 1955 7 143 -4,4% 21 104 Colonie Italie 1951
RD Congo 1960 99 136 5,3% 1 409 Coloniey Belgique 1960
Ouganda 1962 47 134 4,8% 3 062 Colonie Royaume-Uni 1962
Costa Rica 1945 5 131 3,0% 25 000 Colonie Espagne 1821
Jordanie 1955 11 124 2,0% 12 055 Colonie Royaume-Uni 1946
Cameroun 1960 28 124 4,0% 4 431 Colonie France, Royaume-Uni 1960
Turkménistan 1992 6 119 1,1% 19 028 Indépendant
Paraguay 1945 7 108 3,1% 14 535 Colonie Espagne 1811
Uruguay 1945 3 99 1,6% 27 770 Colonie Espagne 1825
Bahreïn 1971 1 90 2,7% 58 426 Colonie Royaume-Uni 1971
Cambodge 1955 17 90 5,5% 5 613 Colonie France 1953
Liban 1945 5 78 -4,0% 11 794 Colonie France 1943
Zambie 1964 20 78 3,2% 3 894 Colonie Royaume-Uni 1964
Sénégal 1960 17 73 5,1% 4 117 Colonie France 1960
Salvador 1945 6 70 2,1% 11 097 Colonie Espagne 1821
Yémen 1947 34 68 -4,8% 2 035 Colonie Royaume-Uni 1967
Bénin 1960 13 54 5,5% 4 048 Colonie France 1960
Arménie 1992 3 53 4,1% 17 795
Madagascar 1960 30 53 2,6% 1 817 Colonie France 1960
Tadjikistan 1992 10 49 7,1% 4 943 Indépendant
Mongolie 1961 3 48 4,4% 13 996 Colonie 1911
Mozambique 1975 33 48 3,9% 1 469 Colonie Portugal 1975
Botswana 1966 3 48 3,8% 18 323 Colonie Royaume-Uni 1966
Kirghizistan 1992 7 42 4,0% 6 127 Indépendant
Trinité-et-Tobago 1962 2 41 -1,4% 29 050 Colonie Royaume-Uni 1962
Gabon 1960 2 39 2,4% 18 207 Colonie France 1960
Papouasie Nouvelle Guinée 1975 10 39 3,8% 3 252 Colonie Australie 1975
Rwanda 1962 14 38 6,3% 2 904 Colonie Belgique 1962
Haïti 1945 12 38 0,6% 3 161 Colonie France 1804
Malawi 1964 20 36 3,6% 1 628 Colonie Royaume-Uni 1964
Maurice 1968 1 34 2,1% 26 934 Colonie Royaume-Uni 1968
Guyane 1966 1 34 13,4% 42 699 Colonie Royaume-Uni 1966
Jamaïque 1962 3 34 0,6% 12 302 Colonie Royaume-Uni 1962
Brunei 1984 1 31 -0,5% 70 576 Colonie Royaume-Uni 1984
Mauritanie 1961 5 31 3,9% 7 113 Colonie France 1960
Somalie 1960 18 30 3,1% 1 928 Colonie Royaume-Uni, Italie 1960
Tchad 1960 18 30 1,2% 1 724 Colonie France 1960
Guinée équatoriale 1968 2 29 -4,2% 19 465 Colonie Espagne 1968
Rép. du Congo 1960 6 26 -1,4% 5 277 Colonie France 1960
Togo 1960 9 23 5,0% 2 594 Colonie France 1960
Bahamas 1973 1 17 0,6% 42 023 Colonie Royaume-Uni 1973
Sierra Leone 1961 9 17 2,5% 2 009 Colonie Royaume-Uni 1961
Fidji 1970 1 14 2,0% 14 950 Colonie Royaume-Uni/td> 1970
Maldives 1965 1 13 5,3% 33 663 Colonie Royaume-Uni 1965
Eswatini 1968 1 13 2,5% 11 217 Colonie Royaume-Uni 1968
Surinam 1975 1 11 -1,7% 17 498 Colonie Pays-Bas 1975
Burundi 1962 13 11 1,4% 856 Colonie Belgique 1962
Bhoutan 1971 1 10 3,4% 13 219 Colonie Royaume-Uni 1947
Timor-Leste 2002 1 9 8,5% 7 064 Colonie Portugal 2002
Libéria 1945 5 9 1,5% 1 690 Colonie Royaume-Uni 1847
Gambie 1965 3 7 3,6% 2 670 Colonie Royaume-Uni 1965
Soudan du sud 2011 11 7 0,3% 456 Colonie Royaume-Uni 2011
Djibouti 1977 1 7 5,1% 6 502 Colonie France 1977
Lesotho 1966 2 7 0,3% 3 092 Colonie Royaume-Uni 1966
Guinée-Bissau 1974 2 6 4,1% 2 911 Colonie Portugal 1973
République centrafricaine 1960 6 5 -2,3% 1 081 Colonie France 1960
Cap-Vert 1975 1 5 2,2% 9 263 Colonie Portugal 1975
Barbade 1966 1 5 -0,3% 17 339 Colonie Royaume-Uni 1966
Bélize 1981 1 5 2,8% 10 564 Colonie Royaume-Uni 1981
Seychelles 1976 < 1 4 5,3% 39 079 Colonie Royaume-Uni 1976
Sainte-Lucie 1979 1 3 0,7% 17 840 Colonie Royaume-Uni 1979
Comores 1975 1 3 2,5% 3 363 Colonie France 1975
Antigua-et-Barbuda 1981 1 2 2,2% 23 575 Colonie Royaume-Uni 1981
Grenade 1974 1 2 2,6% 18 843 Colonie Royaume-Uni 1974
Saint-Vincent-et-les Grenadines 1980 1 2 1,8% 16 216 Colonie Royaume-Uni 1979
Îles Salomon 1978 1 2 1,3% 2 325 Colonie Royaume-Uni 1978
Saint-Kitts-et-Nevis 1983 1 2 1,4% 27 767 Colonie Royaume-Uni 1983
Samoa 1976 1 1 0,1% 5 883 Colonie Nouvelle-Zélande 1962
Dominique 1978 1 1 0,0% 13 293 Colonie Royaume-Uni 1978
Vanuatu 1981 1 1 1,8% 2 890 Colonie Royaume-Uni, France 1980
Sao Tomé-et-Principe 1975 1 1 3,2% 4 067 Colonie Portugal 1975
Tonga 1999 1 1 1,0% 6 686 Colonie Royaume-Uni 1970
Micronésie 1991 1 0 -0,2% 3 693 Colonie Emp. allemand. Japon
Kiribati 1999 1 0 2,3% 2 271 Colonie Royaume-Uni 1979
Palaos 1994 1 0 -1,2% 14 515 Colonie Emp. allemand. Japon États-Unis 1994
Îles Marshall 1991 1 0 1,9% 5 497 Colonie Espagne, Emp. allemand., Japon, États-UnisS 1986
Nauru 1999 1 0 4,4% 10 930 Colonie Royaume-Uni, Australie, Nouvelle-Zélande 1968
Tuvalu 2000 1 0 3,5% 5 376 Colonie Royaume-Uni 1978
Total 2 242 21 171 9 687 103 Col+SemiCol
Pourcentage du monde 28,1% 12,9%
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données des Nations Unies, du FMI
Figure 56

Groupe 5 : Pays du Sud divers

Informations sélectionnées, tous les pays, triés par PIB (PPA), 2022

Partie 2

Pays Militaire Cible militaire étasunienne
Dépenses militaires
ajustées (millions)
Dépenses militaires
ajustées par habitant
moyenne mondiale (fois)
Liste de sanctions
étasunienne
Intervention militaire
étasunienne
hist.
Bases étasuniennes
Égypte 4 646 0,1 O 7
Pakistan 10 337 0,1 8
Thaïlande 5 724 0,2 O 3
Bangladesh 4 806 0,1
Nigéria 3 109 < 0.1
Argentine 2 578 0,2 O 3
Malaisie 3 671 0,3
Émirats arabes unis 3
Singapour 11 688 5,4 2
Kazakhstan 1 133 0,2
Chili 5 566 0,8 O 1
Pérou 2 845 0,2 O 5
Irak 4 683 0,3 O O 10
Maroc 4 995 0,4 O
Éthiopie 1 031  0.1 O O
Ouzbékistan
Sri Lanka 1 053 0,1 O
Kenya 1 138 0,1 O 3
Qatar 15 412 15,9 5
Myanmar 1 857 0,1 O
République dominicaine 761 0,2 O 2
Koweït 8 244 5,4 O 8
Angola 1 623 0.1 O
Équateur 2 489 0,4 O
Ghana 229 0,1 2
Tanzanie 832 10,1 O
Soudan O O
Oman 5 783 3,5 8
Guatemala 431 0,1 O 8
Côte d’Ivoire 607 0,1 O
Azerbaïdjan 2 991 0,8
Panama 0,1 O 15
Tunisie 1 156 0,3 O O 2
Libye O O
RD Congo 371 0,1 O O 1
Ouganda 923 0,1 O O 2
Costa Rica 0,1 O 4
Jordanie 2 323 0,6 O 8
Cameroun 417 0,1 O 4
Turkménistan
Paraguay 366 0,1 O O
Uruguay 1 376 1,1 O 1
Bahreïn 1 381 2,6 10
Cambodge 611 0.1 O 1
Lyban 4 739 2.4 O O
Zambie 326 0.1
Senegal 433 0.1 O 1
Salvador 422 0,2 O 6
Yémen O O 2
Benin 97 0,1
Armenia 795 0,8
Madagascar 98 0,1
Tajikistan 103 0,1
Mongolie 118 0,1
Mozambique 282 0.1
Botswana 489 0.5 1
Kyrgyzstan 150 0,1
Trinité-et-Tobago 201 0,4 O
Gabon 278 0,3 O 2
Papouasie Nouvelle Guinée 97 </td
Rwanda 177 </td
Haïti 13 0,1 O O
Maurice 76 0,1
Mauritanie 20 0,1
Guyane 84 0,3 O
Jamaïque 215 0,2 O
Brunei 436 2,7
Mauritanie 225 0,1 3
Somalie 115 0,1 O O 6
Tchad 357 0,1 O 3
Guinée équatoriale 157 0,3
Rép. du Congo 266 0,1
Togo 337 0,1
Bahamas O 9
Sierra Leone 24 0,1 O
Fidji 67 0,2 O
Maldives
Eswatini 74 0,2
Surinam O 2
Burundi 101 O 1
Bhoutan
Timor-Leste 44 0,1 O
Libéria 19 0,1 O O
Gambie 15 0,1
Soudan du sud 379 0,1 O O 1
Djibouti O 2
Lesotho 35 0,1
Guinée-Bissau 25 0,1 O O
République centrafricaine 42 0,1 O O 3
Cap-Vert 10 0,1
Barbade
Belize 24 0.2 9
Seychelles 26 0,7 1
Sainte-Lucie O
Comores O
Antigua-et-Barbuda O
Grenade O
Saint-Vincent-et-les Grenadines
Îles Salomon O
Saint-Kitts-et-Nevis
Samoa O 1
Dominica O
Vanuatu
Sao Tomé-et-Principe
Tonga O
Micronésie
Kiribati O
Palaos 3
Îles Marshall O 10
Nauru
Tuvalu
Total 131 182 17 63 192
Pourcentage du monde
4,6%
Source : élaboration de Global South Insights basée sur les données de SIPRI et de Monthly Review, des Nations Unies, du CRS, de World Beyond War
Figure 56

Groupe 5: Pays du Sud divers

SInformations sélectionnées, tous les pays, triés par PIB (PPA), 2022

Part 3

Pays Affiliations internationales Votes à l’ONU
« Amis de la Charte
des Nations Unies »
« Org.
de coop. de Shanghai »
BRICS10 Cessez-le-feu à Gaza
10/2023
Retrait de
la Russie
02/2023
Égypte Dialogue Nouveau O O
Pakistan Complet O Abstention
Thaïlande O O
Bangladesh O Abstention
Nigerie O O
Argentine O O
Malaisie O O
Émirats arabes unis Dialogue Nouveau O O
Singapour O O
Kazakhstan Complet O Abstention
Chili O O
Pérou O O
Irak Abstention O
Maroc O O
Éthiopie Nouveau Abstention Abstention
Ouzbékistan Complet O Abstention
Sri Lanka Dialogue O Abstention
Kenya O O
Qatar Dialogue O O
Myanmar Dialogue O O
République dominicaine O O
Koweït Dialogue O O
Angola O Abstention
Équateur O O
Ghana O O
Tanzanie O N’a pas voté
Soudan O Abstention
Oman O O
Guatemala N O
Côte d’Ivoire O O
Azerbaijan Dialogue O N’a pas voté
Panama Abstention O
Tunisie Abstention O
Libye O O
RD Congo O O
Ouganda O Abstention
Costa Rica O O
Jordanie O O
Cameroun Abstention N’a pas voté
Turkmenistan N’a pas voté N’a pas voté
Paraguay N O
Uruguay Abstention O
Bahreïn Dialogue O O
Cambodge O Dialogue N’a pas voté
Liban O N’a pas voté
Zambie Abstention O
Senegal O N’a pas voté
Salvador O Abstention
Yemen O O
Benin N’a pas voté O
Armenia Dialogue O Abstention
Madagascar O O
Tajikistan Complet O Abstention
Mongolia Observer O Abstention
Mozambique O Abstention
Botswana O O
Kyrgyzstan Complet O Abstention
Trinité-et-Tobago O O
Gabon O Abstention
Papouasie Nouvelle Guinée N O
Rwanda N’a pas voté O
Haiti Abstention O
Malawi O O
Maurice O O
Guyane O O
Jamaïque N’a pas voté O
Brunei O O
Mauritanie O O
Somalie O O
Tchad O O
Guinée équatoriale O O N’a pas voté
RD Congo O Abstention
Togo N’a pas voté Abstention
Bahamas O O
Sierra Leone O O
Fidji N O
Maldives Dialogue O O
Eswatini N’a pas voté N’a pas voté
Suriname O O
Burundi N’a pas voté Abstention
Bhutan O O
Timor-Leste O O
Libéria N’a pas voté O
Gambie O O
Soudan du sud Abstention O
Djibouti O O
Lesotho O O
Guinée-Bissau O N’a pas voté
République centrafricaine O Abstention
Cap-Vert Abstention O
Barbade O O
Belize O O
Seychelles N’a pas voté O
Sainte-Lucie O O
Comores O O
Antigua-et-Barbuda O O
Grenade O N’a pas voté
Saint-Vincent-et-les Grenadines O O O
Îles Salomon O O
Saint-Kitts-et-Nevis O O
Samoa N’a pas voté O
Dominique O N’a pas voté
Vanuatu Abstention O
SSao Tomé-et-Principe N’a pas voté O
Tonga N O
Micronesie N O
Kiribati Abstention O
Palaos Abstention O
Îles Marshall N O
Nauru N O
Tuvalu Abstention O
Total 3 17 3 77 O 20 Abstention
Source : Global South Insights
Top

Notes de fin

1 Vijay Prashad. Struggle Makes Us Human: Learning from Movements for Socialism. New York. Haymarket Books, 2022. Tricontinental: Institute for Social Research, Ten Theses on Marxism and Decolonisation, dossier n° 56, 20 septembre 2022, https://staging.thetricontinental.org/dossier-ten-theses-on-marxism-and-decolonisation/.

2 Tricontinental: Institute for Social Research, Popular Agrarian Reform and the Struggle for Land in Brazil, dossier n° 27, 6 avril 2020, https://staging.thetricontinental.org/dossier-27-land/.

3 Tricontinental: Institute for Social Research, The Strategic Revolutionary Thought and Legacy of Hugo Chávez Ten Years After His Death, dossier n 61, 28 février 2023, https://staging.thetricontinental.org/dossier-61-chavez/; Tricontinental: Institute for Social Research, A Map of Latin America’s Present: An Interview with Héctor Béjar, dossier n° 49, 7 février 2022, https://staging.thetricontinental.org/dossier-hector-bejar-latin-america/; Tricontinental: Institute for Social Research, The US Ministry of Colonies and Its Summit, red alert no. 14, 25 Mai 2022, https://staging.thetricontinental.org/red-alert-14-summit-of-the-americas/.

4 Immanuel Wallerstein, « The Three Instances of Hegemony in the History of the Capitalist World-Economy’ » ed. Lenski, Current Issues and Research in Macrosociology, 1 janvier 1984, 100–108, https://doi.org/10.1163/9789004477995_008.

5 Jens Stoltenberg, Ursula von der Leyen, et Charles Michel. Déclaration conjointe sur la coopération entre l’UE et l’OTAN. Organisation du Traité de l’Atlantique Nord. 10 janvier 2023, https://www.nato.int/cps/en/natohq/official_texts_210549.htm.

6 Leila Khaled, « Where There is Repression, There is Resistance », Capire, 27 octobre 2023, https://capiremov.org/en/interview/leila-khaled-where-there-is-repression-there-is-resistance/.

7 Vladimir I. Lenin, Imperialism, the Highest Stage of Capitalism: A Popular Outline (New York: International Publishers, 1939) ; Walter Rodney, How Europe Underdeveloped Africa (London: Bogle-L’Ouverture Publications, 1972) ; Kwame Nkrumah, Neo-Colonialism: The Last Stage of Imperialism, Reprinted (Londres : Panaf, 2004).

8 Julian Assange, When Google Met WikiLeaks (New York : OR Books, 2014).

9 Donald Trump, « President Donald J. Trump Is Ending United States Participation in an Unacceptable Iran Deal », La Maison Blanche, 8 mai 2018, https://trumpwhitehouse.archives.gov/briefings-statements/president-donald-j-trump-ending-united-states-participation-unacceptable-iran-deal/.

10 « US Completes Open Skies Treaty Withdrawal », Arms Control Association, décembre 2020, https://www.armscontrol.org/act/2020-12/news/us-completes-open-skies-treaty-withdrawal ; C. Todd Lopez, « US Withdraws From Intermediate-Range Nuclear Forces Treaty », US Department of Defence, 2 août 2019, https://www.defense.gov/News/News-Stories/article/article/1924779/us-withdraws-from-intermediate-range-nuclear-forces-treaty/ ; George W. Bush, « Statement by the President », La Maison Blanche, 13 juin 2002, https://georgewbush-whitehouse.archives.gov/news/releases/2002/06/20020613-9.html.

11 Gisela Cernadas et John Bellamy Foster. Actual US Military Spending Reached US$ 1.53 trillion in 2022 – More than Twice Acknowledged Level: New Estimates Based on US National Accounts. Monthly Review. 1er novembre 2023. https://monthlyreview.org/2023/11/01/actual-u-s-military-spending-reached-1-53-trillion-in-2022-more-than-twice-acknowledged-level-new-estimates-based-on-u-s-national-accounts/.

12Le Quincy Institute et d’autres auteurs ont également publié des estimations des dépenses militaires étasuniennes nettement plus élevées. Andrew Cockburn, « Getting the Defense Budget Right: A (Real) Grand Total, over $1.4 Trillion », Responsible Statecraft, 7 mai 2023, https://responsiblestatecraft.org/2023/05/07/getting-the-defense-budget-right-a-real-grand-total-over-1-4-trillion/.

13 SIPRI Military Expenditure Database. Stockholm International Peace Research Institute. Consultation le 20 décembre 2023. https://www.sipri.org/databases/milex.

14 Chen Zhuo. Explainer: Prudent Chinese Defense Budget Growth Ensures Broad Public Security. Ministère de la Défense nationale. République populaire de Chine. 6 mars 2022. http://eng.mod.gov.cn/xb/News_213114/TopStories/4906180.html. Bureau national de la statistique chinois. Consultation le 20 décembre 2023. https://data.stats.gov.cn/english/adv.htm?m=advquery&cnC01.

15L’ajustement 2022 du SIPRI concerne les dépenses liées (a) à la Police armée du peuple (PAP) ; (b) aux indemnités de démobilisation et de retraite des soldats versées par le ministère des Affaires civiles ; (c) au financement supplémentaire consacré à la recherche, au développement, aux essais et à l’évaluation (RDT&E) militaires en dehors du budget de la défense nationale ; (d) aux dépenses supplémentaires dans la construction militaire ; (e) aux revenus commerciaux de l’Armée populaire de libération (zéro depuis 2015) ; (f) aux subventions accordées à l’industrie de l’armement (zéro depuis 2010) ; (e) aux importations d’armes chinoises (zéro en 2020) ; et (g) aux garde-côtes chinois (depuis 2013). La nouvelle série reste cohérente sur la période 1989-2019. Cf. Nan Tian et Fei Su. A New Estimate Of China’s Military Expenditure. Stockholm International Peace Research Institute. Janvier 2021. https://www.sipri.org/sites/default/files/2021-01/2101_sipri_report_a_new_estimate_of_chinas_military_expenditure.pdf. Sources and Methods. Stockholm International Peace Research Institute. Consultation le 20 décembre 2023. https://www.sipri.org/databases/milex/sources-and-methods#sipri-estimates-for-china.

16 Les chiffres 2021 du SIPRI pour la Chine étaient en moyenne 1,36 fois supérieurs au budget officiel de la défense nationale de la Chine, bien qu’ils viennent limiter les estimations faites par le passé. Par exemple, pour l’année 2019, la nouvelle estimation du SIPRI s’élève à 1 660 milliards de yuans, soit 240 milliards de dollars, un chiffre légèrement inférieur à l’ancienne estimation de 1 803 milliards de yuans, soit 261 milliards de dollars. Selon les estimations précédentes, le SIPRI a augmenté le budget officiel de la défense de la Chine de 48,6 % pour 2021. Selon les nouvelles estimations, le budget de la Chine pour 2021 a été augmenté de 36,8 % par le SIPRI. Avec les nouveaux ajustements, les dépenses militaires de la Chine correspondent à 1,6 % du PIB, contre 1,3 % dans le budget officiel. Les calculs du PIB sont basés sur les données PIB en TCC des Perspectives économiques mondiales du FMI.

17 Office of Management and Budget. Historical Tables. Table 3.2. Outlays by Function and Subfunction: 1962–2028. Maison blanche. Consultation le 20 décembre 2023. https://www.whitehouse.gov/omb/budget/historical-tables/.

18 Calculs basés sur les estimations des dépenses militaires réelles des États-Unis pour l’année 2022 réalisées par Gisela Cernadas et John Bellamy Foster. Cf remarque 11.

19 « USA’s Military Empire: A Visual Database », World Beyond War, consulté le 27 novembre 2023, https://worldbeyondwar.org/no-bases/.

20 Depuis des décennies, des chercheurs indépendants reconnaissent que les dépenses militaires réelles des États-Unis sont environ deux fois supérieures au niveau officiellement reconnu. Les recherches indépendantes ne se limitent pas aux cercles de gauche. Les mêmes conclusions sont avancées par le Quincy Institute for Responsible Statecraft, financé par le milliardaire de droite George Soros, le Project on Government Oversight (POGO) et le Center for American Progress, réputé « libéral ». Voir Lawrence J. Krob and Kaveh Toofan, « A Trillion-Dollar Defense Budget? – Centre for American Progress », Centre for American Progress, 12 juillet 2022, https://www.americanprogress.org/article/a-trillion-dollar-defense-budget/ ; Cockburn, « Getting the Defense Budget Right: A (Real) Grand Total, over $1.4 Trillion » ; William Hartung and Mandy Smithberger, « Making Sense of the $1.25 Trillion National Security State Budget », Project on Government Oversight, 7 mai 2019, https://www.pogo.org/analysis/making-sense-of-the-1-25-trillion-national-security-state-budget.

21Nos chiffres sur les dépenses militaires mondiales sont données aux taux de change courants (TCC). Les facteurs de conversion PPA utilisés pour mesurer les dépenses militaires sont nécessairement moins fiables que les taux de change. Les taux PPA sont des estimations statistiques, calculées sur la base des données de prix collectées pour des paniers de biens et services pour des années de référence. Aucune donnée tarifaire de ce type n’est collectée pour les dépenses militaires. Par conséquent, il est impossible de disposer de telles informations pour effectuer des comparaisons internationales. Ainsi, le calcul des dépenses militaires en appliquant les taux de PPA via des facteurs de conversion du PIB est méthodologiquement invalide, car il repose sur l’hypothèse implicite selon laquelle le ratio des prix militaires est égal au ratio des prix relatifs du PIB, argument pour lequel aucune preuve n’est présentée. Le SIPRI reconnaît que l’utilisation de l’ajustement PPA pour les dépenses militaires est inexacte et donc moins fiable que l’utilisation des taux de change. Cf. Stockholm International Peace Research Institute. Frequently Asked Questions. SIPRI Military Expenditure Database. Consultation le 25 novembre 2023. https://www.sipri.org/databases/milex/frequently-asked-questions#PPP.

22 Les dépenses militaires de la Chine sont concentrées uniquement sur le territoire chinois. Il existe donc des limites claires à l’expansion militaire de la Chine. Le pays ne dispose pas de bases militaires importantes à l’étranger, contrairement aux États-Unis qui en avaient 902 en 2022. Cette idée est confirmée par le Quincy Institute for Responsible Statecraft : « La Chine n’a jusqu’à présent établi qu’une seule base militaire opérationnelle à l’étranger, dans la corne de l’Afrique, à Djibouti, et est probablement en train d’établir une installation navale au Cambodge. Mais il existe de réelles limites à la possibilité que la Chine s’installe dans de tels endroits. Comme l’a souligné Isaac Kardon du Carnegie Endowment, la Chine n’a pas d’alliances militaires formelles (au-delà du cas douteux de la RPD de Corée) et il est peu probable qu’elle en acquière dans un avenir proche, ce qui impose des contraintes majeures à sa capacité à établir des bases militaires sérieuses. Il n’existe que peu de pays, voire aucun, qui souhaitent s’engager à accueillir des installations militaires à part entière et de taille importante qui pourraient projeter la puissance militaire chinoise dans leur région et, ce faisant, inviter une réponse étasunienne. Voir Michael D. Swaine, « Actually, China’s Military Isn’t Going Global », Responsible Statecraft, 8 septembre 2023, https://responsiblestatecraft.org/china-military/.

23 Les éditeurs, « US Military Bases and Empire », Monthly Review, 1 mars 2002, https://monthlyreview.org/2002/03/01/u-s-military-bases-and-empire/.

24 « USA’s Military Empire: A Visual Database », World Beyond War, consulté le 27 novembre 2023, https://worldbeyondwar.org/no-bases/.

25 The Military Balance 2023 , Institut international d’études de sécurité, 15 février 2023, https://www.iiss.org/en/publications/the-military-balance/.

26 Sally Williamson. Logistics Contractors and Strategic Logistics Advantage in US Military Operations. Logistics In War. 4 juin 2023. https://logisticsinwar.com/2023/06/04/logistics-contractors-and-strategic-logistics-advantage-in-us-military-operations/.

27 Agreement Between the United States of America and Ghana. Treaties and Other International Acts, series 18–531. US Department of State, https://www.state.gov/wp-content/uploads/2019/02/18-531-Ghana-Defense-Status-of-Forces.pdf.

28 Vijay Prashad, « Why Does the United States Have a Military Base in Ghana? », Peoples Dispatch. 15 juin 2022. https://peoplesdispatch.org/2022/06/15/why-does-the-united-states-have-a-military-base-in-ghana/.

29 Matthew P. Goodman et Matthew Wayland. Securing Asia’s Subsea Network: US Interests and Strategic Options. Centre for Strategic International Studies. 4 avril 2022. https://www.csis.org/analysis/securing-asias-subsea-network-us-interests-and-strategic-options.

30 Utah Data Centre, Domestic Surveillance Directorate, consultation le 27 novembre 2023, https://nsa.gov1.info/utah-data-center/.

31 Nick Turse, « Pentagon Misled Congress About US Bases in Africa », The Intercept, 8 septembre 2023, https://theintercept.com/2023/09/08/africa-air-base-us-military/.

32 « USA’s Military Empire: A Visual Database », World Beyond War, consulté le 27 novembre 2023, https://worldbeyondwar.org/no-bases/.

33 The Military Balance 2023.

34 The Military Balance 2023.

35 Barbara Salazar Torreon et Sofia Plagakis. Instances of Use of United States Armed Forces Abroad, 1798–2023. Congressional Research Service. 7 juin 2023. https://crsreports.congress.gov/product/pdf/R/R42738.

36 Kushi et Toft. « Introducing the Military Intervention Project ». 4.

37 Salazar Torreon et Plagakis, Instances of Use of United States Armed Forces Abroad, 1798–2023.

38 Sidita Kushi et Monica Duffy Toft. Introducing the Military Intervention Project: A New Dataset on US Military Interventions, 1776–2019. Journal of Conflict Resolution 67, n° 4 (2023), p. 752–779. https://journals.sagepub.com/doi/10.1177/00220027221117546?icid=int.sj-full-text.citing-articles.1.

39 Le Military Intervention Project (MIP) a une estimation légèrement inférieure à celle des listes plus larges provenant de sources telles que Congressional Research Services (CRS), dont les chiffres sont plus fréquemment cités par les chercheurs. Le MIP utilise plusieurs des bases de données publiées connues. Cependant, en raison de sa définition plus complète, le processus d’agrégation aboutit à un chiffre total légèrement inférieur en raison du reclassement. Le MIP et CRS disposent donc d’ensembles de données et de chiffres bruts incomparables, en raison de la manière différente dont ils traitent la datation, l’échelle, la durée, la légalité et l’intention. Le MIP et CRS ont des approches méthodologiques incomparables. Nous utilisons CRS, car il s’agit de la plus grande donnée publiée disponible. Cf. Kushi et Toft. Introducing the Military Intervention Project.

40 Claudia Jones, « International Women’s Day and the Struggle for Peace », discours prononcé lors d’un rassemblement le 8 mars 1950, Liberation School, 29 mars 2023, https://www.liberationschool.org/claudia-jones-1950-iwd-speech/.

41 Anthony Lake. Confronting Backlash States. Foreign Affairs. 1er mars 1994. https://www.foreignaffairs.com/articles/iran/1994-03-01/confronting-backlash-states.

42 Francisco R. Rodríguez. The Human Consequences of Economic Sanctions. Centre for Economic Policy Research. 4 mai 2023. https://cepr.net/press-release/new-report-finds-that-economic-sanctions-are-often-deadly-and-harm-peoples-living-standards-in-target-countries/.

43 Agence France-Presse, « US Commerce Chief Warns against China “Threat”’ » South China Morning Post, 3 décembre 2023, https://www.scmp.com/news/world/united-states-canada/article/3243657/us-commerce-chief-warns-against-china-threat.

44 Deutscher Bundestag. China-Strategie der Bundesregierung [Stratégie chinoise du gouvernement fédéral], 20/7770. 13 juillet 2023. https://dserver.bundestag.de/btd/20/077/2007770.pdf.

45 Élaboration propre sur la base des données de Christoph Nedopil Wang, « Countries of the Belt and Road Initiative (BRI) – Green Finance & Development Centre », consulté le 2 décembre 2023, https://greenfdc.org/countries-of-the-belt-and-road-initiative-bri/.

46 Élaboration de Global South Insights, à partir des WDI de la Banque mondiale et des Perspectives de l’économie mondiale du FMI.

47 Tricontinental: Institute for Social Research. Eight Contradictions of the Imperialist “Rules-Based Order”. Studies on Contemporary Dilemmas. 13 mars 2023. https://staging.thetricontinental.org/eight-contradiction-of-the-imperialist-rules-based-order/.

48 Toutes les illustrations de l’« Histoire commune des pays impérialistes » sont dans le domaine public ou protégées par une licence Creative Commons. Cf. attribution, dans l’ordre chronologique : Joseph Swain. On Board a Slave Ship. Circa 1835. https://commons.m.wikimedia.org/wiki/File:On_Board_a_Slave-Ship,_engraving_by_Swain_c._1835_Colorized.jpg ; Inconnu. The Destruction of the Pequots. Circa 19è siècle. https://en.m.wikipedia.org/wiki/File:Mystic_Massacre_1637_Destruction_Of_The_Pequots_in_Connecticut.png ; Inconnu. The Berlin Conference on Partition of Africa. Circa 1884. https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Afrikakonferenz.jpg ; William Heysham Overend. Chinese Officers Tear Down the British Flag on the Arrow. 8 octobre 1856. https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Chinese_officers_tear_down_the_British_flag_on_the_arrow.JPG ; Edward N. Jackson. Council of Four at the WWI Paris peace conference. 27 mai 1919. https://en.wikipedia.org/wiki/File:Big-Four-Paris_1919.jpg ; Charles Levy. Atomic Cloud Rises Over Nagasaki, Japan. 9 août 1945. https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Nagasakibomb.jpg.

49 Utsa Patnaik. Revisiting the “Drain”, or Transfer from India to Britain in the Context of Global Diffusion of Capitalism dans Agrarian and Other Histories: Essays for Binay Bhushan Chaudhuri, publié par Shubhra Chakrabarti et Utsa Patnaik (New Delhi. Tulika. 2017).

50 Michael Johnson. Teaching about Slavery. Foreign Policy Research Institute. Août 2008. https://www.fpri.org/article/2008/08/teaching-about-slavery/.

51 Wendy Sawyer and Peter Wagner, « Mass Incarceration: The Whole Pie 2023 », Prison Policy Initiative, 14 mars 2023, https://www.prisonpolicy.org/reports/pie2023.html.

52 Trans-Atlantic Slave Trade – Database. SlaveVoyage. 2019. https://www.slavevoyages.org/voyage/database.

53 Rachel Nuwer. Mississippi Officially Ratifies Amendment to Ban Slavery, 148 Years Late. Smithsonian Magazine. 20 février 2013. https://www.smithsonianmag.com/smart-news/mississippi-officially-ratifies-amendment-to-ban-slavery-148-years-late-21328041/.

54 Maria Mies, Patriarchy and Accumulation on a World Scale: Women in the International Division of Labour (Londres : Zed Books, 2001).

55 Jean Enriquez, « From “Comfort Women” to Prostitution in Military Bases », Capire, 18 juillet 2023, https://capiremov.org/en/interview/from-comfort-women-to-prostitution-in-military-bases/.

56 Cori Bush and et. al., « Calling for an Immediate De-escalation and Cease-Fire in Israel and Occupied Palestine », Pub. L. No. H.Res.786, 118e Congress (2023–2024) (2023), https://www.congress.gov/bill/118th-congress/house-resolution/786/cosponsors.

57 Rosalind C. Morris. Ursprüngliche Akkumulation: The Secret of an Originary Mistranslation, boundary 2 43, n° 3 (1er août 2016), pp. 29–77. https://doi.org/10.1215/01903659-3572418.

58 Daniel Larsen, Plotting for Peace: American Peacemakers, British Codebreakers, and Britain at War, 1914–1917, (Cambridge : Cambridge University Press, 2021), https://doi.org/10.1017/9781108761833.

59 Lénine. Impérialisme ; Rudolf Hilferding. Finance Capital: A Study of the Latest Phase of Capitalist Development. Londres. Routledge & Kegan Paul. 1985.

60 Vladimir Lénine. Imperialism and the Split in Socialism dans V. I. Lenin Collected Works. Vol. 23. Moscou. Progress Publishers. 1964. 114. https://www.marxists.org/archive/lenin/works/1916/oct/x01.htm.

61 « 2023 Bilderberg Meeting Participant List », Public Intelligence, 19 mai 2023, https://publicintelligence.net/2023-bilderberg-participant-list/.

62 Tricontinental: Institute for Social Research, The Coup Against the Third World: Chile, 1973, dossier n° 68, 5 septembre 2023, https://staging.thetricontinental.org/dossier-68-the-coup-against-the-third-world-chile-1973/.

63 Nalu Faria, « O Feminismo Latino-Americano e Caribenho: Perspectivas Diante Do Neoliberalismo [Féminisme latino-américain et caribéen : perspectives sur le néolibéralisme] », in Desafios Do Livre Mercado Para o Feminismo [Les défis du marché libre pour le féminisme], Cadernos Sempreviva 9 (São Paulo : SOF, 2005).

64 Assange, When Google Met WikiLeaks.

65 Michael Hudson, Super Imperialism: The Origin and Fundamentals of US World Dominance (Londres : Pluto Press, 2003).

66 The Transistor Revolution: How Transistors Changed the World. Arrow. 22 décembre 2022. https://www.arrow.com/en/research-and-events/articles/the-transistor-revolution-how-transistors-changed-the-world ; Omar Sohail,  Apple’s M3 Max Has the Highest Generational Leap in Transistor Count with a 37 Percent Difference Compared to the M2 Max. WCCF Tech. 3 novembre 2023. https://wccftech.com/apple-m3-max-highest-transistor-count-for-any-m-series-chip/.

67 2023 Year in Review – India Review. Comscore. Décembre 2023. https://www.comscore.com/Insights/Events-and-Webinars/Webinar/2023/2023-Year-in-Review-India-Edition.

68 Kevin Townsend. Bad Bots Account for 73% of Internet Traffic: Analysis. Security Week. 16 novembre 2023. https://www.securityweek.com/bad-bots-account-for-73-of-internet-traffic-analysis/; Unheard Voices: Evaluating Five Years of pro-Western Covert Influence Operations, Graphika et l’Observatoire de l’Internet de Stanford, 24 août 2022, https://public-assets.graphika.com/reports/graphika_stanford_internet_observatory_report_unheard_voice.pdf.

69 Janan Ganesh. America’s Cultural Supremacy and Geopolitical Weakness. Financial Times. 19 décembre 2023. https://www.ft.com/content/dce07860-f39e-432b-a0f6-1a2124e4e1a3.

70 Voir Karl Marx, « Component Parts of Bank Capital », dans  Capital, vol. III (New York: International Publishers, 1995), https://www.marxists.org/archive/marx/works/1894-c3/ch15.htm, 336–337.

71 OTC Derivatives Statistics at End-June 2023. Banque des règlements internationaux. 16 novembre 2023. https://www.bis.org/publ/otc_hy2311.pdf.

72 OTC Derivatives Statistics at End-June 2023.

73 Samir Amin, « How to Defeat the Collective Imperialism of the Triad », Monthly Review, 5 décembre 2022, https://mronline.org/2022/12/05/samir-amin-how-to-defeat-the-collective-imperialism-of-the-triad/ ; Samir Amin, Globalisation and Its Alternative, interviewé par Tricontinental: Institute for Social Research, 30 octobre 2018, https://staging.thetricontinental.org/globalisation-and-its-alternative/.

74 .Religion and the Founding of the American Republic. Exhibitions, Library of Congress. https://www.loc.gov/exhibits/religion/rel01.html.

75 Mohammad Shahid Alam. Israeli Exceptionalism: The Destabilising Logic of Zionism. New York. Palgrave Macmillan. 2009, p. 109.

76 Stuart Laycock. All the Countries We’ve Ever Invaded: And the Few We Never Got Round To. Londres. The History Press. 2012.

77 Israel Hits Gaza Strip with the Equivalent of Two Nuclear Bombs. Euro-Mediterranean Human Rights Monitor. 2 novembre 2023. https://euromedmonitor.org/en/article/5908/Israel-hit-Gaza-Strip-with-the-equivalent-of-two-nuclear-bombs.

78 Jeremy M. Sharp. US Foreign Aid to Israel. Congressional Research Service. 1er mars 2023. https://crsreports.congress.gov/product/pdf/RL/RL33222/, i.

79 How Much Aid Does the US Give to Israel?. USA FACTS. 12 octobre 2023. https://usafacts.org/articles/how-much-military-aid-does-the-us-give-to-israel/.

80 Vladimir Lénine, Once Again on the Trade Unions: The Current Situation and the Mistakes of Trotsky and Bukharin dans V. I. Lenin Collected Works, vol. 32. Moscou. Progress Publishers. 1965, p. 70–107.

81 Justin Cremer. Denmark Is One of the NSA’s “9-Eyes”. The Copenhagen Post. 4 novembre 2013. https://web.archive.org/web/20131219010450/http:/cphpost.dk/news/denmark-is-one-of-the-nsas-9-eyes.7611.html.

82 Ryan Gallagher. The Powerful Global Spy Alliance You Never Knew Existed. The Intercept. 1er mars 2018. https://theintercept.com/2018/03/01/nsa-global-surveillance-sigint-seniors/.

83 Office of Press Secretary. Remarks By President Obama to the Australian Parliament. La Maison blanche. 17 novembre 2011. https://obamawhitehouse.archives.gov/the-press-office/2011/11/17/remarks-president-obama-australian-parliament.

84 Japan Defence: China Threat Prompts Plan to Double Military Spending. BBC. 16 décembre 2022. https://www.bbc.com/news/world-asia-64001554.

85 Selon la Banque mondiale, « les économies à revenu élevé sont celles dont le RNB par habitant est de 13 846 $ ou plus », cf. World Bank Country and Lending Groups. Banque mondiale. Consultation le 20 décembre 2023. https://datahelpdesk.worldbank.org/knowledgebase/articles/906519#High_income ; RNB per Capita, Atlas Method (Current US$) – China. Données de la Banque mondiale. Consultation le 20 décembre 2023. https://data.worldbank.org/indicator/NY.GNP.PCAP.CD?end=2022&locations=CN&start=2005.

86 Xi Jinping, discours lors de la cérémonie de clôture du BRICS Business Forum 2023. Texte intégral : https://newsaf.cgtn.com/news/2023-08-23/Full-text-Xi-Jinping-s-speech-at-the-Closing-Ceremony-of-the-BRICS-Business-Forum-2023-1mulkZSzuso/index.html.

87 Pour en savoir plus, voir Tricontinental: Institute for Social Research, The World Needs a New Socialist Development Theory, dossier n° 66, 4 juillet 2023, https://staging.thetricontinental.org/dossier-66-development-theory/.

88 Larissa Mies Bombardi, Agrotóxicos e Colonialismo Químico [Agrotoxines et colonialisme des pesticides] (São Paulo, SP : Elefante, 2023).

89 Larissa Packer et Camila Moreno. O Brasil Na Retomada Verde: Integrar Para Entregar. Brasília. Grupo Carta de Belém, 2021.

90 Analyse personnelle reposant sur les données du FMI.

91 Tricontinental: Institute for Social Research. Serve the People: The Eradication of Extreme Poverty in China. Studies in Socialist Construction n° 1. 23 juillet 2021. https://staging.thetricontinental.org/studies-1-socialist-construction/.

92 Xi Jinping. Hold High the Great Banner of Socialism with Chinese Characteristics and Strive in Unity to Build a Modern Socialist Country in All Respects, discours lors du 20e Congrès national du Partie communiste chinois. 16 octobre 2022. http://my.china-embassy.gov.cn/eng/zgxw/202210/t20221026_10792358.htm.

93 Karl Marx et Friedrich Engels, Le Manifeste communiste, 22e impression de l’édition du 100e anniversaire (New York : International Publishers, 1979).

94 Bureau of Political-Military Affairs. US Security Cooperation with Ukraine. US Department of State. 12 décembre 2023. https://www.state.gov/u-s-security-cooperation-with-ukraine/.

95 Joe Biden, « Déclarations du président Biden sur la fin de la guerre en Afghanistan », Maison Blanche, 31 août 2021, https://www.whitehouse.gov/briefing-room/speeches-remarks/2021/08/31/remarks-by-president-biden-on-the-end-of-the-war-in-afghanistan/.

96 Tricontinental : Institut de recherche sociale, Syria’s Bloody and Unforgiving War, dossier n° 3, 5 avril 2018, https://staging.thetricontinental.org/dossier-3-syrias-bloody-war/.

97 « Fabrication, valeur ajoutée (% du PIB) – Afrique du Sud », Données de la Banque mondiale, consultation le 20 décembre 2023, https://data.worldbank.org/indicator/NV.IND.MANF.ZS?locations=ZA.

98 Rodríguez, « The Human Consequences of Economic Sanctions ».

99 Tricontinental: Institute for Social Research, « The Emergence of a New Non-Alignment », newsletter n° 24, 15 juin 2023, https://staging.thetricontinental.org/newsletterissue/new-non-alignment/.

100 Patrick Wintour, « Gulf States Fend off Call From Iran to Arm Palestinians at Riyadh Summit », The Guardian, 12 novembre 2023, https://www.theguardian.com/world/2023/nov/12/gulf-states-fend-off-call-from-iran-to-arm-palestinians-at-riyadh-summit.

101 Analyse personnelle reposant sur les données de la Banque mondiale.

102 Kyunghoon Kim and Andy Sumner, « Bringing State-Owned Entities Back into the Industrial Policy Debate: The Case of Indonesia », Structural Change and Economic Dynamics 59 (Décembre 2021) : 496–509, https://doi.org/10.1016/j.strueco.2021.10.002.

103 « Exportations de biens et de services ($ US courants) – Indonésie », Données de la Banque mondiale, consultation le 20 décembre 2023, https://data.worldbank.org/indicator/NE.EXP.GNFS.CD?locations=ID.

104 Daniel Kritenbrink et al., « Joint Statement on the United States-Indonesia Senior Officials’ 2+2 Foreign Policy and Defense Dialogue », Département de la défense des États-Unis, 23 octobre 2023, https://www.defense.gov/News/Releases/Release/Article/3566363/joint-statement-on-the-united-states-indonesia-senior-officials-22-foreign-poli/ ; « US Embassy Tracked Indonesia Mass Murder 1965’, National Security Archive », 17 octobre 2017, https://nsarchive.gwu.edu/briefing-book/indonesia/2017-10-17/indonesia-mass-murder-1965-us-embassy-files.

105 Ana Esther Ceceña et David Rodriguez, « La Guerra Contra El Narco En México Como Política de Reordenamiento Social », OLAG, n° 157 (2022), https://geopolitica.iiec.unam.mx/index.php/node/1294.

106 Timothy A. Wise, « The US Assault on Mexico’s Food Sovereignty », Global Issues, 6 juin 2023, https://www.globalissues.org/news/2023/06/06/33954.

107 Chaba Brahim, « “Until Our Territories Are Free”: Women From Western Sahara in Ceaseless Struggle », Capire, 18 février 2021, https://capiremov.org/en/interview/until-our-territories-are-free/.

108 « L’esprit de Camp David : déclaration commune du Japon, de la République de Corée et des États-Unis », communiqué de presse, Maison Blanche, https://www.whitehouse.gov/briefing-room/statements-releases/2023/08/18/the-spirit-of-camp-david-joint-statement-of-japan-the-republic-of-korea-and-the-united-states/.

109 Shanna Khayat, « GSOMIA vs. TISA: What Is the Big Deal? », Pacific Forum, 10 février 2020, https://pacforum.org/publication/yl-blog-19-gsomia-vs-tisa-what-is-the-big-deal.

110 Les données et les graphiques de cette section du document s’appuient largement sur les recherches publiées par l’économiste John Ross.

111 Calculé par John Ross à partir de One Hundred Years of Economic Statistics: United Kingdom, United States of America, Australia, Canada, France, Germany, Italy, Japan, and Sweden, compilé par T. Liesner (The Economist, 1989) et « International Transactions », tableau 1, Bureau of Economic Analysis Data, consultation le 13 novembre 2022, https://www.bea.gov/data/intl-trade-investment/international-transactions.

112 Lenin, « Once Again on the Trade Unions ».

113 Atish Rex Ghosh et Uma Ramakrishnan, « Current Account Deficits », Fonds monétaire international, consulté le 7 décembre 2023, https://www.imf.org/en/Publications/fandd/issues/Series/Back-to-Basics/Current-Account-Deficits.

114 Hudson, Super Imperialism, 77.

115 Langston Hughes, The Collected Poems of Langston Hughes , 1ère éd. (New York : Knopf, distribué par Random House, 1994).

116Vladimir Poutine, discours prononcé au Conseil de sécurité de Munich, Munich, Allemagne, 10 février 2007, https://is.muni.cz/th/xlghl/DP_Fillinger_Speeches.pdf.

117 Pour comprendre pourquoi nous nous abstenons d’utiliser les termes « grande récession » ou « grande crise financière », voir notre étude : The World in Economic Depression: A Marxist Analysis of Crisis, cahier n° 4, 10 octobre 2023, https://staging.thetricontinental.org/dossier-notebook-4-economic-crisis/.

118 Projet des électeurs indépendants, « DNC to Court: We Are a Private Corporation With No Obligation to Follow Our Rules », Independent Voter News , 14 août 2022, https://ivn.us/posts/dnc-to-court-we-are-a-private-corporation-with-no-obligation-to-follow-our-rules.

119Associated Press, « Many Who Met with Clinton as Secretary of State Donated to Foundation », CNBC, 23 août 2016, https://www.cnbc.com/2016/08/23/most-of-those-who-met-with-clinton-as-secretary-of-state-donated-to-foundation.html.

120 Joseph A. Schumpeter, « Capitalism, Socialism, and Democracy » (New York: Harper Perennial Modern Thought, 2008).

121 The Military Balance 2022, Institut international d’études de sécurité, 15 février 2023, https://www.iiss.org/en/publications/the-military-balance/.

122 Vijay Prashad, The Poorer Nations: A Possible History of the Global South (Londres & New York : Verso, 2014).

123 A. De La Cruz, A. Medina, Y. Tang, « Owners of the World’s Listed Companies », OECD Capital Market Series, 17 Octobre 2019, https://www.oecd.org/corporate/Owners-of-the-Worlds-Listed-Companies.htm.

124 Who Owns the German DAX? The Ownership Structure of the German DAX 30 in 2020 – A Joint Study of IHS Markit and DIRK, IHS Markit, juin 2021, https://cdn.ihsmarkit.com/www/pdf/0621/DAX-Study-2020—DIRK-Conference-June-2021_IHS-Markit.pdf.

125 Henrik Ahlers, Wem gehört der DAX? Analyse der Aktionärsstruktur der im Deutschen Aktienindex vertretenen Unternehmen [À qui appartient le Dax ? Analyse de la structure actionnariale des sociétés représentées dans l’indice boursier allemand] (Ernst & Young, juillet 2023), https://www.ey.com/de_de/forms/download-forms/2023/07/wem-gehoert-der-dax-2023.

126 Who Owns the German DAX?.

127 « Foreign Direct Investment, Net Inflows (BoP, Current US$) – Germany », Données de la Banque mondiale, consultation le 20 décembre 2023, https://data.worldbank.org/indicator/BX.KLT.DINV.CD.WD?end=2022&locations=DE&start=1971.

128 John Ross, « 事实表明,中国经济表现继续远优于G7国家 [Les faits montrent que l’économie chinoise continue de surpasser de loin les économies du G7] », Weibo (blog), 12 avril 2023, https://weibo.com/ttarticle/p/show?id=2309404975244548113063.

129 « US Companies Dominating European TV Market », Moonshot News (blog), 20 janvier 2022, https://moonshot.news/news/media-news/us-companies-dominating-european-tv-market/ ; Agnes Schneeberger, « Les services de médias audiovisuels en Europe – édition 2023 », juin 2023, Observatoire européen de l’audiovisuel et Conseil de l’Europe, https://rm.coe.int/audiovisual-media-services-in-europe-2023-edition-a-schneeberger/1680abc9bc#:~:text=Around%20one%20in%20five%20(18,in%20documentary%20and%20children’s%20programming, 7.

130 Hudson, Super Imperialism.

131 « La Namibie condamne l’Allemagne pour avoir défendu Israël dans l’affaire du génocide de la CIJ », Al Jazeera, 14 janvier 2024, https://www.aljazeera.com/news/2024/1/14/namibia-condemns-germany-for-defending-israel-in-icj-genocide-case.

132 Marx, « L’exposé des contradictions internes du droit ».

133 David Hoffman, « Russia’s Billionaire Matchmaker To the West », Washington Post, 24 septembre 2002, https://www.washingtonpost.com/archive/lifestyle/2002/09/24/russias-billionaire-matchmaker-to-the-west/e6c98740-ac21-4933-a445-674ea6149102/.

134 Brian D. Blankenship, « NATO and the Persistent Problem of German Defense Spending », Cornell University Press (blog), 1er novembre 2023, https://www.cornellpress.cornell.edu/burden-sharing-dilemma-coercive-diplomacy-brian-blankenship-11-01-2023/.

135 Mari Yamguchi, « Japan to Jointly Develop New Fighter Jet with UK, Italy », Associated Press, 9 décembre 2022, https://apnews.com/article/business-japan-united-kingdom-government-states-219e0adadd5f14b115766141cd0c5f6f.

136 Valerie Insinna, « US Gives the Green Light to Japan’s $23B F-35 Buy », 10 juillet 2020, https://www.defensenews.com/smr/2020/07/09/us-gives-the-green-light-to-japans-massive-23b-f-35-buy/.

137 S’il est prouvé que la conversion de l’industrie est nettement inférieure à celle d’autres éléments du PIB, les chiffres de la PPA que nous avons présentés surestimeraient les pourcentages pour les pays du Sud. Nous pensons qu’en dépit de cette erreur possible, l’orientation de cette approche fournit des informations utiles. La composition en pourcentage du PIB par secteur dépend des données de prix utilisées pour mesurer la valeur ajoutée de chacun d’entre eux. Les facteurs de conversion en PPA sont des estimations statistiques basées sur des paniers de biens et de services pour des années de référence qui sont ensuite appliquées aux estimations du PIB pour le PIB (PPA).

138 Barbara Kollmeyer, « “Right Now There Are Changes, the Likes of Which We Haven’t Seen in 100 Years.” Here’s What China’s Xi Said to Putin before Leaving Russia », Market Watch, 22 mars 2023, https://www.marketwatch.com/story/right-now-there-are-changes-the-likes-of-which-we-havent-seen-in-100-years-what-china-president-xi-said-to-putin-before-leaving-russia-d15150ce.

139 Agnieszka Bryc, « The Russian Federation and Reshaping a Post-Cold War Order », Politeja 5, n° 62 (31 octobre 2019) : 161–74, https://doi.org/10.12797/Politeja.16.2019.62.09; Vladimir Poutine, discours prononcé au Conseil de sécurité de Munich, Allemagne, 10 février 2007, https://is.muni.cz/th/xlghl/DP_Fillinger_Speeches.pdf.

140 « Special Report: Cables Show US Sizing up China’s Next Leader », Reuters, 17 février 2011, https://www.reuters.comarticle/idUSTRE71G5WH/.

141 Luke Hunt, « The World’s Gaze Turns to the South Pacific », The Diplomat, 4 septembre 2012, https://thediplomat.com/2012/09/the-worlds-gaze-turns-to-the-south-pacific/.

142 Xi Jinping, « Remarks by President Obama and President Xi Jinping in Joint Press Conference », 12 novembre 2014, La Maison Blanche, https://obamawhitehouse.archives.gov/the-press-office/2014/11/12/remarks-president-obama-and-president-xi-jinping-joint-press-conference#:~:text=At%20the%20same%20time%2C%20I,instead%20of%20mutually%20exclusive%20ones.

143 « China to Leapfrog US as World’s Biggest Economy by 2028 – Think Tank » Reuters, 26 décembre 2020, https://www.reuters.com/article/idUSKBN290003/.

144 Zbigniew Brzezinski, The Grand Chessboard: American Primacy and Its Geostrategic Imperatives (New York: Basic Books, 1997), 55 ; 30–31.

145 Les éditeurs, « Notes from the Editors », Monthly Review 75, n° 4 (1 septembre 2023), https://monthlyreview.org/2023/09/01/mr-075-04-2023-08_0/ ; Jake Sullivan, « Remarques du conseiller à la sécurité nationale Jake Sullivan sur le renouvellement du leadership économique américain à la Brookings Institution », La Maison Blanche, 27 avril 2023, https://www.whitehouse.gov/briefing-room/speeches-remarks/2023/04/27/remarks-by-national-security-advisor-jake-sullivan-on-renewing-american-economic-leadership-at-the-brookings-institution/.

146 Nomaan Merchant et al., « US Announces $345 Million Military Aid Package for Taiwan », TIME, 29 juillet 2023, https://time.com/6299419/us-military-aid-taiwan/.

147 Malgré les récentes révélations de pratiques frauduleuses, l’économie comportementale a été utilisée avec succès par les services de renseignement étasuniens dans le cadre de campagnes médiatiques en ligne.

148 Daniel McAdams, « “What Is The Empire’s Strategy?” – Col Lawrence Wilkerson Speech At RPI Media & War Conference », The Ron Paul Institute for Peace & Prosperity, 22 août 2018, https://ronpaulinstitute.org/what-is-the-empires-strategy-col-lawrence-wilkerson-speech-at-rpi-media-war-conference/.

149 Colum Lynch, « State Department Lawyers Concluded Insufficient Evidence to Prove Genocide in China », Foreign Policy, 19 février 2021, https://foreignpolicy.com/2021/02/19/china-uighurs-genocide-us-pompeo-blinken/ ; « Textile Exports by Country 2023 », World Population Review, consultation le 26 décembre 2023, https://worldpopulationreview.com/country-rankings/textile-exports-by-country ; « China’s Major Exports by Quantity and Value, December 2022 (in USD) », Administration générale des douanes, République populaire de Chine, 8 janvier 2023, http://english.customs.gov.cn/Statics/aeb5aefa-b537-4ef3-8e13-59244228cb0e.html.

150 Li Xuanmin, « A Decade of BRI Development Transforms China’s Xinjiang Region into a Core Area of the Silk Road Economic Belt – Global Times », Global Times, 1er octobre 2023, https://www.globaltimes.cn/page/202310/1299158.shtml.

151 Gregory C. Allen, « Choking off China’s Access to the Future of AI », Centre d’études stratégiques et internationales, 11 octobre 2023, https://www.csis.org/analysis/choking-chinas-access-future-ai.

152 Alex W. Palmer, « “An Act of War”: Inside America’s Silicon Blockade Against China », The New York Times, 12 juillet 2023, https://www.nytimes.com/2023/07/12/magazine/semiconductor-chips-us-china.html.

153 Xinhua, « The Belt and Road Initiative: A Key Pillar of the Global Community of Shared Future », Bureau d’information du Conseil d’État, République populaire de Chine, 10 octobre 2023, http://english.scio.gov.cn/whitepapers/2023-10/10/content_116735061_5.htm.

154 David Choi, « US, South Korean, Canadian Warships Train in Yellow Sea Ahead of Incheon Anniversary », Stars and Stripes, 15 septembre 2023, https://www.stripes.com/branches/navy/2023-09-15/trilateral-naval-drill-yellow-sea-incheon-11383145.html.

155 An Dong, « 黄海军演仅5小时,美准航母跑路,舰载机坠毁,美军被迫发帖寻找 [Cinq heures seulement après le début de l’exercice naval en mer Jaune, un quasi-porte-avions étasunien a pris la fuite, son porte-avions s’est écrasé et l’armée a été contrainte de le rechercher.] », IFENG, 18 septembre 2023, https://i.ifeng.com/c/8TBMF5tH2bY.

156 « Investor FAQs », New Development Bank, consulté le 26 novembre 2023, https://www.ndb.int/investor-relations/inverstor-faqs/ ; BRICS Information Centre, « Treaty for the Establishment of a BRICS Contingent Reserve Arrangement », University of Toronto, consulté le 26 novembre 2023, http://www.brics.utoronto.ca/docs/140715-treaty.html.

157 « Answers to the Questions of the Video Conference “SCO – Shaping Eurasia” », Organisation de coopération de Shanghai, 27 octobre 2020, https://eng.sectsco.org/20201027/686658.html.

158 Christoph Nedopil Wang, « China Belt and Road Initiative (BRI) Investment Report 2023 H1 », Green Finance & Development Centre, 1er août 2023, https://greenfdc.org/china-belt-and-road-initiative-bri-investment-report-2023-h1/.

159 Mao Zedong, « Discours prononcé à la réunion de Wuchang du Bureau politique du Comité central du Parti communiste chinois », dans Selected Works of Mao Tse-Tung, vol. IV (Pékin : Foreign Languages Press, 1958), 98-99, https://www.marxists.org/reference/archive/mao/works/red-book/ch06.htm.

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